La société Arrago lève 250 millions d’euros ce 8 avril pour industrialiser son “prêt 60”, destiné aux propriétaires de résidences principales âgés de plus de 60 ans.
Pas simple de décrocher un crédit bancaire une fois la soixantaine passée, avec une espérance de vie moindre et des revenus en baisse à la retraite. En France, moins de 4% des personnes âgées de plus de 60 sont parvenues à en obtenir un en 2022 (dernières données disponibles), assure Arrago. Spécialisée dans le prêt viager hypothécaire, octroyé en contrepartie d’une hypothèque sur un logement, cette jeune société, née en 2017, annonce une levée de fonds de 250 millions d’euros auprès d’investisseurs institutionnels européens, ce mardi 8 avril. Des capitaux qui doivent lui permettre «d’industrialiser» son “prêt 60”, «une adaptation du prêt viager hypothécaire», explique à Capital Alexis Rouëssé, CEO (chief executive officer) d’Arrago.
Ce prêt 60 s’adresse aux personnes de plus de 60 ans propriétaires de leur résidence principale, pour la simple raison qu’il est garanti par la valeur du bien immobilier. Concrètement, ce dernier est hypothéqué. «Le montant du prêt dépend de cette valeur, de la localisation du bien et de l’âge de l’emprunteur», détaille Alexis Rouëssé. En moyenne, les clients d’Arrago sont âgés de 76 ans et empruntent 130 000 euros, auprès des banques partenaires de la société, comme le Crédit municipal de Nantes et le Crédit foncier communal d’Alsace et de Lorraine. «Il n’y a pas de questionnaire médical mais, au-delà de 75 ans, un avis médical est nécessaire pour s’assurer que la personne comprend bien quel type de prêt elle souscrit», précise le dirigeant. Un prêt délivré entre 45 jours et trois mois après la demande, ajoute-t-il.
Un prêt pour financer toutes sortes de projets
Si la loi interdit à ce type de prêt de financer une activité professionnelle, il n’est cependant pas «affecté» : l’emprunteur peut l’utiliser pour financer des projets divers. «La principale raison qui conduit à souscrire au prêt 60 est le remboursement des soldes de crédit immobilier ou à la consommation, qui, avec la baisse de revenus liée à la retraite, peut peser lourd dans le budget des ménages», indique Alexis Rouëssé. Autre utilisation du prêt 60 : le financement de travaux de rénovation énergétique pour pouvoir continuer à percevoir les revenus locatifs d’un logement noté G sur le diagnostic de performance énergétique (DPE) et, donc, interdit de mise en location depuis le 1er janvier.
Ce prêt peut également financer l’adaptation de la résidence principale aux vieux jours, en transformant la baignoire en douche ou encore en installant un monte-escalier. Mais les emprunteurs peuvent tout aussi bien l’utiliser pour payer les études de leurs petits-enfants ou les aider à acheter un logement.
Un remboursement in fine
Le prêt est remboursé in fine, à son échéance, du vivant de l’emprunteur ou lors de sa succession, ou encore au moment de son choix. Prenons l’exemple de Bernard, âgé de 78 ans et propriétaire d’une maison estimée à 560 000 euros. Via Arrago, dont les revenus sont constitués de commissions reçues des banques, il emprunte 170 000 euros pour réaliser des travaux dans sa maison, aider sa petite-fille à passer son permis de conduire et faire un beau voyage. Dix ans plus tard, au moment de sa succession, sa maison est évaluée à 630 000 euros par un expert indépendant. Sur la base d’un taux d’intérêt nominal (hors assurance) de l’ordre de 6%, le montant du capital et des intérêts à rembourser s’élève à 317 618 euros. Deux options s’offrent aux héritiers de Bernard. Soit ils ont les moyens de rembourser cette somme et de garder la maison, soit ils la vendent pour rembourser la banque et récupérer l’excédent de 312 382 euros.
Bien développé dans d’autres pays d’Europe, par des concurrents, le prêt viager hypothécaire «ne rencontre pas d’obstacle culturel en France», affirme Alexis Rouëssé. Après avoir octroyé quelque 400 prêts en 2024, pour un montant global de 55 millions d’euros, la société, qui a réellement démarré son activité en 2023, vise la distribution de 1 000 prêts par an d’ici 2026, pour un montant total de 135 millions d’euros, puis de 7 000 dans trois à cinq ans, soit un milliard d’euros par an.