Face à une pression croissante de la droite politique concernant l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution, le gouvernement, qui continue de viser un compromis budgétaire, exclut pour l’instant cette option dans le cadre du budget de la Sécurité sociale, rapporte TopTribune.
À l’issue des déclarations de l’ancien maire du Havre, Édouard Philippe, mardi, le chef des Républicains, Bruno Retailleau, a exhorté ce mercredi le ministre Sébastien Lecornu à « assumer » le recours à cet article qui permettrait l’adoption d’un texte sans vote, tant qu’aucune motion de censure n’est adoptée.
Le gouvernement « s’est engagé à ne pas l’utiliser » rappelle la porte-parole
« Je suis persuadé que jamais les socialistes ne voteraient une censure. Donc pourquoi n’utilise-t-il pas ce que la Constitution lui permet ? », a questionné l’ancien ministre de l’Intérieur. Cependant, Sébastien Lecornu a renoncé début octobre à cet outil constitutionnel pour redonner le pouvoir au Parlement, un geste dirigé vers les socialistes qui, depuis lors, ne semblent plus le revendiquer.
Néanmoins, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a réaffirmé que l’exécutif « s’est engagé à ne pas l’utiliser », soulignant que cela reviendrait « à acter l’échec des discussions parlementaires », lors d’une intervention sur BFMTV.
Les discussions reprennent après les modifications du Sénat
L’exécutif aspire à « aller au vote » prévu le 9 décembre. « Les Français regarderont qui a décidé de réduire le déficit et qui a refusé d’avancer vers un budget », a précisé Bregeon.
Les députés ont repris l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, avec de nombreux compromis à rechercher tant à gauche qu’à droite, ainsi qu’au sein du bloc central.
Ils s’appuient sur la version modifiée par le Sénat, qui a largement révisé le texte en écartant la suspension de la réforme des retraites, concession faite par le gouvernement en échange de la non-censure du PS.
Les Républicains et Horizons refusent une augmentation de la CSG sur les revenus du capital
Bien que cette mesure devrait être réintégrée par les députés, un autre point d’achoppement demeure : l’augmentation de la CSG sur les revenus du capital, contre laquelle LR et Horizons se prononcent. « Un budget avec des hausses d’impôts […] je ne le voterai pas », a déclaré le chef des députés LR Laurent Wauquiez sur TF1.
Les socialistes, pour leur part, soutiennent cette mesure qui pourrait générer 2,8 milliards d’euros pour financer certaines dépenses de santé.
« Ramener le déficit à 20 milliards d’euros (objectif du gouvernement), sans mesures de recettes comme la CSG, je ne vois pas comment ils font », s’est interrogé le député PS Jérôme Guedj, plaidant pour une « juste contribution ».
Le gel de la revalorisation des retraites comme alternative
Pour Maud Bregeon, rien n’est infranchissable. « Nous ne sommes pas particulièrement attachés à cette mesure (la CSG) », a-t-elle déclaré, tout en précisant que si cette option était retirée, il faudrait trouver une alternative pour compenser.
Une « piste possible » pourrait être le gel de la revalorisation d’une partie des retraites, une décision votée par le Sénat pour celles supérieures à 1 400 euros, tandis que les députés avaient préféré un dégel total en première lecture. Cependant, rien ne garantit que cette approche satisfera toutes les parties.
Un responsable socialiste a jugé mardi « non négociable » un « dégel total des retraites », position également soutenue par la cheffe de file des députés écologistes, Cyrielle Châtelain, qui a déclaré que « le gel partiel des retraites, c’est non ». Il est également incertain que les députés LR soient en accord avec leurs homologues sénateurs.
Le 49.3 « meilleure solution » selon le Modem et l’UDI
« Jusqu’à 1 400 euros, votre retraite est revalorisée. À 1 450, elle ne l’est pas. Les Français ne comprennent pas bien », s’est interrogé Laurent Wauquiez.
La question cruciale pourrait se poser bien avant le 9 décembre, car les députés doivent déjà voter cette semaine sur la seule partie recettes de ce budget, que ce soit avec ou sans la CSG. Sa rejet entraînerait l’échec de l’ensemble du texte, réduisant ainsi les espoirs d’adoption d’un budget de la Sécurité sociale avant la fin de l’année.
En l’absence de budget valide, le déficit de la Sécu pourrait atteindre 30 milliards d’euros au lieu des prévisions initiales de 20, avertit le gouvernement. C’est pourquoi le président du groupe MoDem, Marc Fesneau, a souligné que « la meilleure solution reste le 49.3 car personne ne veut assumer ce budget ». Cet outil pourrait également être envisagé pour le budget de l’État, qui est actuellement examiné au Sénat, où les divergences sont encore plus marquées.
Reprendre l’utilisation du 49.3 ne « choquerait pas » non plus le dirigeant de l’UDI et chef de file des sénateurs centristes, Hervé Marseille, comme il l’a mentionné à l’Association des journalistes parlementaires. « Ça serait un soulagement pour tout le monde », a-t-il ajouté.
Un cadre d’Horizons a averti que Sébastien Lecornu « a vraiment intérêt à dégainer le plus vite possible (le 49.3) avant qu’il ne soit trop tard ».