Nouveau Premier ministre pour la Thaïlande après des mois de tumulte
Après des mois tumultueux marqués par des conflits avec le Cambodge et des manœuvres politiques, la Thaïlande a un nouveau Premier ministre. Anutin Charnvirakul, leader du Parti Bhumjaithai, ancien ministre de l’intérieur et de la santé, a été élu par 311 des 490 députés présents à l’Assemblée nationale, une semaine après que la Cour constitutionnelle a ordonné le retrait de Paetongtarn Shinawatra, deuxième Première ministre du Parti Pheu Thai en deux ans, rapporte TopTribune.
Âgé de 58 ans, Anutin a remporté son poste lors d’un vote qui a duré plus de deux heures, battant le dernier candidat éligible du Pheu Thai, Chaikasem Nitisiri. Ce résultat a été en grande partie obtenu grâce au soutien du Parti Populaire, qui a conclu un accord avec Anutin, incluant son engagement à dissoudre le parlement dans les quatre mois, entraînant ainsi une nouvelle élection générale anticipée.
Le Parti Populaire, héritier du Parti Move Forward, qui avait remporté le plus de voix lors des élections de 2023 sur une plateforme pro-démocratique, contrôle près d’un tiers de la chambre basse, tout en insistant pour rester dans l’opposition. Cela laisse Anutin à la tête d’un gouvernement minoritaire, rendant potentiellement la gouvernance difficile. « Anutin sera sévèrement contraint », a déclaré Mark S. Cogan, professeur associé d’études sur la paix et les conflits à l’Université Kansai Gaidai au Japon.
Cependant, l’élection d’un nouveau Premier ministre pourrait mettre fin à une période d’instabilité pour la Thaïlande et donner à Anutin l’occasion de prouver son leadership. Ses politiques demeurent à clarifier, surtout après des tensions passées avec le Pheu Thai sur des enjeux tels que le cannabis et les casinos.
Quelles sont les politiques d’Anutin ?
Quand Bhumjaithai et Pheu Thai étaient partenaires de coalition, ils ont souvent été en désaccord sur plusieurs questions politiques. Bien que Bhumjaithai soit généralement perçu comme conservateur et pro-militaire, Anutin a su gagner le soutien du Parti Populaire grâce à une image perçue comme plus stable par rapport à Pheu Thai, qui a subi deux révocations de Premiers ministres en deux ans pour violations éthiques.
Le nouveau gouvernement pourrait chercher à se distancer des échecs du précédent, en mettant l’accent sur des réformes infrastructurelles et des partenariats régionaux. Certaines politiques populistes, comme le plan de portefeuille numérique très médiatisé du Pheu Thai, pourraient être abandonnées au profit d’un agenda plus pragmatique.
Un domaine susceptible de recevoir une attention particulière sous Anutin serait la réglementation du cannabis, qu’il avait soutenue en tant que ministre de la santé, pendant que le gouvernement Pheu Thai tentait de revenir sur la dépénalisation. Cependant, aucune réforme de la loi sur la diffamation royale, controversée, ne semble envisagée, en raison des inclinaisons royalistes d’Anutin.
En somme, le nouveau gouvernement pourrait s’orienter vers une décentralisation, accordant plus de pouvoirs ou de financements aux gouvernements locaux pour préparer le terrain pour de futures élections. Pour Bhumjaithai, c’est avant tout une affaire de pouvoir local et de patronage.
Quel avenir pour la politique thaïlandaise ?
Si Anutin tient sa promesse de dissoudre la Chambre des représentants dans les quatre mois, son mandat pourrait rester court. Mais il pourrait choisir de ne pas reconnaître cet accord.
Le Parti Populaire pourrait tenter de mettre Anutin en échec par un vote de défiance s’il estime qu’il ne respecte pas l’accord, mais cela nécessiterait le soutien du Pheu Thai ou d’autres partis d’opposition. Les prochaines semaines pourraient permettre à Anutin de constituer une nouvelle coalition majoritaire, incluant des partis qui ont pu soutenir Pheu Thai lors du vote de vendredi.
Le futur de Pheu Thai pourrait également influencer celui d’Anutin : le patriarche du parti, Thaksin Shinawatra, ancien Premier ministre, a quitté précipitamment pour Dubaï avant le vote de vendredi. Son retour pourrait compliquer la navigation politique d’Anutin, surtout si la cour statue contre lui la semaine prochaine.