Scandale des eaux en bouteille : ce qu'il faut retenir du rapport sénatorial sur les pratiques du groupe Nestlé Waters
Scandale des eaux en bouteille : ce qu'il faut retenir du rapport sénatorial sur les pratiques du groupe Nestlé Waters

Scandale des eaux en bouteille : ce qu’il faut retenir du rapport sénatorial sur les pratiques du groupe Nestlé Waters

19.05.2025
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Les pratiques industrielles dans les eaux en bouteille sont au cœur d’un rapport sénatorial publié lundi après les révélations de Radio France d’une affaire de traitements illicites chez Nestlé Waters qui commercialise les marques Perrier, Hépar ou encore Contrex.

Des bouteilles d'eau de la marque Vittel dans une usine française de la marque Nestlé Waters. (JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP)
Des bouteilles d’eau de la marque Vittel dans une usine française de la marque Nestlé Waters. (JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP)

Des conclusions accablantes. La commission d’enquête parlementaire du Sénat les pratiques des industriels de l’eau en bouteille a publié, lundi 19 mai, son rapport après six mois de travaux et plus de 70 auditions. La fraude aux eaux minérales du groupe Nestlé a été dévoilée il y a un an et demi par la Cellule investigation de Radio France et le journal Le Monde. Voici ce qu’il faut retenir.

Un rapport sur la qualité sanitaire modifié à la demande de Nestlé

Les eaux Hépar, Perrier, Contrex ou Vittel, vendues comme eaux minérales naturelles, sont en réalité traitées en toute illégalité en raison de contaminations à la source. On découvre dans ce rapport sénatorial que le gouvernement, mais aussi le préfet du Gard, où est produite la marque Perrier, et l’Agence régionale de santé (ARS) d’Occitanie se sont entendus avec Nestlé pour faire disparaître d’un rapport des éléments importants sur la qualité sanitaire des forages exploités pour produire la marque Perrier.

Ce rapport démontrait la contamination dès fin 2023 des puits de l’usine du Gard par des bactéries issues de matières fécales et des pesticides. Les noms des bactéries et des pesticides ont été effacés à la demande de Nestlé au point qu’un agent de contrôle sanitaire décide de retirer sa signature du rapport.

La qualité des filtres remise en cause

De nombreux échanges de mails dévoilés par la commission d’enquête prouvent cette manœuvre. Un mail par exemple dans lequel le directeur de l’ARS Occitanie écrit au ministère de la santé : « Ci-dessous mes échanges la présidente de Nestlé Waters. Nous avons modifié ensemble le document. ». Et il ajoute : « J’ai demandé à la présidente ses éléments de langage pour qu’on soit raccord pour la suite. » Parmi ces éléments, cette phrase suggérée par la dirigeante de Nestlé : « Il est important de noter que la qualité des produits est conforme et ne présente aucun danger pour la santé et la sécurité. »

Pourtant, selon le rapport de la commission d’enquête parlementaire, la tromperie mise en place par le groupe Nestlé comporte bien des risques sanitaires car tous les forages exploités par Nestlé sur le site de Perrier sont pollués par des bactéries et des pesticides. Or les filtres installés dans les usines ne suffisent pas à désinfecter l’eau correctement. Ils laissent passer jusqu’à 30 % des bactéries.

D’ailleurs en janvier 2023 le directeur général de la santé, Jérôme Salomon, avait dit au gouvernement qu’il ne fallait pas laisser l’entreprise continuer d’utiliser ces filtres que ce serait inacceptable en raison de la tromperie commerciale mais aussi en raison des risques sanitaires.

Des soupçons sur une tromperie toujours en cours

Car comme les filtres laissent passer des bactéries, ces bactéries se retrouvent dans les bouteilles, comme révélé récemment. Il y a eu 300 000 bouteilles de Perrier contaminées par des bactéries pathogènes au mois de mars et trois millions de bouteilles il y a un an. Selon nos informations, deux autres épisodes de contamination ont eu lieu en 2022, sans que Nestlé apporter la preuve de destruction des lots. On voit bien que les filtres ne sont pas efficaces pour purifier l’eau correctement et Nestlé gère le risque en détruisant les bouteilles au fil de l’eau encore aujourd’hui.

Et la tromperie continue. Dans le Gard, des scientifiques agréés par le ministère de la Santé ont dit récemment que tous les puits étaient contaminés. Dans la foulée, le directeur de l’ARS a demandé l’arrêt de la production d’eau minérale à Perrier mais des milliers de bouteilles labellisées « eaux minérales naturelles » continuent de sortir chaque jour de l’usine, alors qu’elles n’ont plus rien de naturelles.

La commission d’enquête sénatoriale sur les eaux en bouteille formule 28 recommandations pour préserver la pureté des eaux minérales, dont certaines sont à mettre en œuvre « immédiatement », rappelle Le Monde. Au-delà du cas Nestlé, les sénateurs recommandent notamment de vérifier l’absence de traitements interdits sur l’ensemble des 104 sites minéraliers que compte la France ou diffuser rapidement l’instruction interdisant la microfiltration en dessous de 0,45 micron. Car comme le révélaient la Cellule investigation de Radio France et Le Monde, un rapport demandé par le gouvernement de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) avait conclu en 2022 que 30% des marques d’eaux en bouteille « subiss(aient) des traitements non conformes ».

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