Le silence des cigales suscite à la fois inquiétude et interrogations parmi les habitants des régions de Provence. Philippe, un résident du Gard, exprime son désarroi sur Facebook, déclarant : « Les cigales ont disparu ! Habitants depuis quatorze ans, je me réjouissais chaque été d’entendre les cigales ». Ce constat est partagé par plusieurs observateurs, qui s’interrogent sur la diminution de leur chant cet été. Les autorités environnementales, y compris des experts, tentent d’analyser cette situation, rapporte TopTribune.
Une analyse cautionnée par la science
Cette disparition apparente des cigales est préoccupante, car pour les Provençaux, leur chant marque la fin des vacances d’été. Cependant, Kevin Gurcel, entomologiste spécialisé, appelle à la prudence avant de tirer des conclusions hâtives. Il précise que « l’abondance de cigales varie d’année en année » et que certaines espèces, dont les larves vivent sous terre pendant deux à cinq ans, peuvent connaître des fluctuations indépendamment des conditions climatiques.
Celui-ci souligne également que la plupart des gens se concentrent sur les deux espèces les plus connues, la cigale grise et la cigale plébéienne, tandis que 22 autres espèces existent. « La majorité de ces espèces n’émettent pas des chants facilement identifiables », ajoute-t-il, fournissant un aperçu de la diversité que représente ce groupe d’insectes. Néanmoins, la climatologie joue un rôle indéniable, notamment en ce qui concerne la pluviosité printanière. Un sol trop sec peut entraver les émergences au sortir de la terre, créant ainsi une ambiance sonore plus calme.
Les impacts de la sécheresse et de la chaleur
La sécheresse du mois de juin, qui n’a vu que 3 mm de pluie, s’ajoute aux préoccupations. Les conditions climatiques extrêmes peuvent également jouer un rôle dans la survie des cigales, surtout en cette année où la canicule a frappé particulièrement tôt. Selon Gurcel, « les chaleurs extrêmes favorisent la reproduction, ce qui raccourcit leur cycle de vie », ce qui pourrait expliquer l’absence de chant observée. Cette situation rappelle l’été 2022, durant lequel les cigales avaient pratiquement disparu à partir de la mi-août.
Des observations rapportent cependant la présence de cigales dans des régions plus au Nord, y compris à Lyon et en Île-de-France. Mais le Dr Gurcel remet en question l’idée d’un déplacement naturel des cigales vers le Nord. « Les cas observés sont en réalité liés à des importations accidentelles via des plantes, et non à une migration des espèces. Les cigales ne se déplacent pas sur de grandes distances », affirme-t-il.
La perspective des importations
Ce phénomène d’« importations accidentelles » se produit lorsque des larves de cigales, attachées à des plantes achetées dans le Sud de la France, émergent dans de nouvelles localités. « C’est un sujet polémique, car bien que des cigales aient été aperçues dans ces zones, ces observations restent sporadiques », clarifie l’entomologiste. Si les cigales volent, la colonisation de nouvelles régions se ferait à une échelle d’éternité, ce qui diminue la probabilité d’une migration massive vers le Nord.
Kevin Gurcel conclut en affirmant que « vivre sans le chant des cigales ne signifie pas qu’elles ne sont pas présentes », rappelant que certaines espèces de cigales existent même dans des climats beaucoup plus frais, allant jusqu’à l’Angleterre et la Finlande. Cela indique une résilience et une diversité au sein de ce groupe d’insectes, qui continuent de fasciner et d’inquiéter à la fois.
