La motion du RN pour dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 sans effet juridique

La motion du RN pour dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 sans effet juridique

31.10.2025 14:24
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Jeudi, à l’Assemblée nationale, Marine Le Pen et les députés du Rassemblement National (RN) ont obtenu un succès politique en faisant adopter, à une voix près, leur motion visant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968. Bien que cette victoire soit historique pour le RN, qui a vu son premier texte voté par l’hémicycle, il est important de noter que cette motion ne modifiera pas l’accord en question, étant donné que les questions de traités internationaux relèvent de l’exécutif, rapporte TopTribune.

Pour comprendre les implications de la motion, il convient d’examiner l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Ce texte découle de la renégociation des accords d’Evian de 1962, et établit les règles de circulation, d’emploi et de séjour des ressortissants algériens et de leurs familles. Selon Derge Slama, professeur de droit public à l’Université Grenoble-Alpes, cet accord était globalement favorable aux Algériens à l’époque, mais l’est beaucoup moins depuis les renégociations de 1994 et de 2001.

Un accord moins avantageux pour les Algériens

Bien que l’accord facilite encore le « regroupement familial », cela reste subordonné à l’autorisation de l’autorité française compétente. Il permet également d’obtenir un titre de séjour de dix ans, mais le droit d’obtenir ce titre est devenu plus restrictif, excluant notamment les conjoints algériens de ressortissants français ainsi que les étudiants. De plus, puisque l’accord est figé depuis 2001, les ressortissants algériens ne profitent pas des évolutions législatives récentes, telles que les cartes de séjour pluriannuelles.

En résumé, l’accord de 1968 n’est pas aussi favorable aux Algériens que le RN le prétend. Il est important de noter que cet accord ne régule pas les attributions de visas et n’interfère pas avec les entrées sur le territoire français. De plus, un avenant du 18 juillet 1994 stipule que les autorités algériennes s’engagent à coopérer avec les préfectures pour faciliter les éloignements des ressortissants algériens.

« Aucune partie juridique contraignante »

Qu’implique donc la résolution adoptée par l’Assemblée ? Selon Laurence Dubin, professeur en Droit public à l’Université Paris Sorbonne, dénoncer un accord international transcende la compétence de l’Assemblée nationale, étant une prérogative réservée au chef de l’État. Elle précise que la motion adoptée n’a aucune force juridique contraignante. Emmanuel Macron pourrait donc choisir de ne pas en tenir compte.

Dénoncer un accord international constitue une décision unilatérale. Pourtant, l’accord de 1968 ne comporte aucune clause permettant une telle dénonciation. Selon l’article 56 de la convention de Vienne sur le droit des traités, la France ne peut dénoncer ce traité à moins de prouver que celui-ci le permet implicitement, ce qui n’est pas le cas.

Une dénonciation unilatérale de cet accord mettrait la France en contradiction avec le droit international. En pratique, cela n’entraîne rien tant que la France n’a pas reconnu la compétence de la Cour internationale de justice. Toutefois, l’Algérie pourrait adopter des contre-mesures proportionnées en réponse à une telle action.

Emmanuel Macron a déjà fait savoir qu’il ne souhaitait pas dénoncer cet accord. Les deux experts en droit estiment que la solution la plus probable pourrait être une renégociation du traité, une option que le Premier ministre, Sébastien Lecornu, a évoquée suite à l’adoption de la motion par l’Assemblée.

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