La cryptomonnaie attire de nombreuses convoitises, comme l’ont démontré ces dernières semaines le rapt et la séquestration du cofondateur de la société Ledger, David Balland. Un Franco-Marocain de 24 ans, désormais arrêté est soupçonné d’avoir commandité cet enlèvement et une série d’autres dans le milieu des cryptomonnaies.
Les criminels utilisent eux-mêmes de plus en plus de cryptomonnaies : policiers et gendarmes traquent cet argent numérique dans leurs enquêtes. Chaque année, on estime à 50 milliards de dollars le préjudice de l’usage illicite des cryptomonnaies à travers le monde.
De nombreux usages criminels
La criminalité n’ayant pas de frontières, la France n’échappe pas à cette circulation galopante de cryptoactifs. « Les malfaiteurs utilisent cette monnaie dans leurs transactions illicites pour acheter des produits stupéfiants, des véhicules volés ou des armes, principalement sur le darknet« , explique le colonel de gendarmerie Florian Manet, qui commande la division des enquêtes spécialisées au pôle cyber du Ministère de l’Intérieur.
Il poursuit : « On peut aussi évoquer le cas de l’achat de données qui auraient pu être dérobées lors de cyberattaques. Ces données vont ensuite servir à commettre d’autres agissements comme des escroqueries en lignes ». Des cryptomonnaies également utilisées en matière de pédocriminalité, mais pas seulement.
La création d’une nouvelle entité anti-corruption
Les enquêteurs, gendarmes comme policiers, doivent s’adapter à ces nouvelles pratiques
La commissaire Sophie Robert dirige la Brigade financière anti-corruption (BFAC), une nouvelle entité de la police judiciaire parisienne lancée jeudi 5 juin et spécialisée notamment dans le détournement de fonds publics ou la fraude fiscale. « Dans un premier temps, on va développer la sensibilisation de tous les enquêteurs à la détection de cryptomonnaie dans les enquêtes », détaille-t-elle.
« Il n’y a pas que le milieu du banditisme qui blanchit l’argent en cryptomonnaie. »
Sophie Robert directrice de la BFAC
Sophie Robert précise également que « le milieu de la criminalité en col blanc blanchit également son argent fraudé en cryptomonnaie« , comme un moyen plus discret de commettre ces méfaits
Des échanges difficiles à traquer
Principale difficulté : arriver à suivre des flux financiers parfois totalement anonymes.. Et donc théoriquement intraçables. C’est l’un des atouts pour les possesseurs de cryptomonnaies, mais il y en a d’autres : « La facilité des transactions évite le risque de se déplacer avec une valise pleine d’argent, d’avoir recours à un tiers de confiance qui va opérer cette transaction, parfois sur des continents différents« , explique le colonel Florian Manet. Et le spécialiste de conclure : « Les actifs numériques offrent une fluidité dans les échanges financiers qui évite tout risque de vol ou de confiscation de ces sommes d’argent par d’autres organisations criminelles« .
Pour suivre l’argent et identifier les criminels, les enquêteurs s’équipent notamment de coûteux logiciels spécialisés, espérant mettre la main en perquisitions sur les clefs privées pour accéder aux fonds. 90 millions d’euros ont été saisis ces dix dernières années selon les chiffres de l’AGRASC, l’agence de gestion des avoirs confisqués.