Budget 2025 : le futur gouvernement aura-t-il le droit de dépasser la date butoir du 1er octobre fixée par la loi ?
Budget 2025 : le futur gouvernement aura-t-il le droit de dépasser la date butoir du 1er octobre fixée par la loi ?

Budget 2025 : le futur gouvernement aura-t-il le droit de dépasser la date butoir du 1er octobre fixée par la loi ?

03.09.2024
3 min de lecture

Le projet de loi des finances pour l’année à venir doit être déposé au Parlement au plus tard au 1er octobre. Mais ce délai s’annonce intenable alors qu’un nouveau Premier ministre n’a pas encore été désigné.

Près de deux mois après les élections législatives, la France n’a toujours pas de nouveau Premier ministre… ni de budget pour l’année prochaine. Le calendrier habituel pour la préparation du projet de loi des finances (PLF) pour 2025 est complètement bouleversé par la situation politique. Alors qu’Emmanuel Macron tarde toujours à décider du nom du successeur de Gabriel Attal et que les spéculations vont bon train, mardi 3 septembre, les délais légaux deviennent de plus en plus difficiles à tenir pour le futur exécutif.

Le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal a tenté de préparer le terrain pour s’assurer que l’Etat dispose de ressources au 1er janvier. Le ministère des Finances a travaillé sur un budget prévisionnel et envoyé des lettres plafonds, qui déterminent les crédits des ministères, le 20 août, avec un mois de retard sur le calendrier habituel.

Une autre étape importante se fait en revanche attendre : l’envoi aux parlementaires « d’un rapport indiquant les plafonds de crédits envisagés pour l’année à venir pour chaque mission du budget général », normalement prévu pour le 15 juillet, précise l’Assemblée nationale. Une situation qui a poussé les députés Eric Coquerel (LFI) et Charles de Courson (Liot), respectivement président et rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée, à exiger dans une lettre, vendredi, des documents de synthèses sur le budget en préparation. La commission est censée se réunir pour la première fois mercredi, pour l’instant sans base de travail.

Pour Matignon, le PLF peut attendre « jusqu’à la mi-octobre »

Même si le ministre du Budget, Thomas Cazenave, répond favorablement aux demandes des députés, c’est un nouveau gouvernement qui sera bientôt l’interlocuteur des parlementaires. Une fois désigné, il n’aura que très peu de temps pour préparer son budget. Selon la loi, le PLF doit être déposé au Parlement « au plus tard le premier mardi d’octobre de l’année précédant celle de l’exécution du budget », soit le 1er octobre cette année. La loi doit ensuite être votée par l’Assemblée et le Sénat, et publiée avant le 1er janvier. Or, il s’agit d’un texte énorme – 416 pages pour la version de 2024 – qui met à contribution tous les ministères, et dont l’élaboration prend beaucoup de temps.

La situation pourrait devenir intenable pour le futur gouvernement. Ce dernier sera-t-il alors autorisé à déposer son PLF plus tard ? Matignon, confirmant des informations du Monde, explique à franceinfo que le Secrétariat général du gouvernement a bien examiné la légalité de cette hypothèse, tout en précisant que « seul le prochain gouvernement (…) arbitrera et déposera le budget 2025 »« La Constitution prévoit 70 jours d’examen du PLF par le Parlement », et permettrait donc « théoriquement au prochain gouvernement, s’il le souhaite, de déposer le budget jusqu’à la mi-octobre au Parlement », estime Matignon.

En 1962, un retard sans conséquences

Une interprétation de la Constitution que ne partage pas Anne-Charlène Bezzina, constitutionnaliste et maîtresse de conférences en droit public à l’université de Rouen. « L’article 47 de la Constitution renvoie à la loi, en l’occurrence la loi organique relative aux lois de finances, c’est donc elle qu’il faut regarder », estime la spécialiste auprès de franceinfo. Cette loi « ne prévoit pas explicitement le cas d’un retard dans la présentation ». Les parlementaires pourraient donc saisir le Conseil constitutionnel s’ils estiment que le gouvernement ne respecte pas le droit.

Dans une décision rendue en juillet 2001, les Sages avaient d’ailleurs eu à se prononcer à propos d’un délai non respecté par le gouvernement sur un texte budgétaire. « Il avait estimé que si un retard devait arriver, celui-ci devrait être examiné en fonction du ‘principe de continuité de la nation’, résume Anne-Charlène Bezzina. Cela veut dire, en gros, que si personne ne s’y oppose et que ça n’entrave pas le fonctionnement de l’Etat, alors, il n’y a pas de problème. »

Il faut remonter à 1962 pour trouver l’unique exemple, depuis le début de la Ve République, d’un projet de loi de finances présenté (et voté) en retard. « Le budget n’avait été présenté qu’en novembre. La France venait de connaitre une dissolution et un référendum voulu par le Général de Gaulle », rappelle la constitutionnaliste. Le budget a finalement « été adopté en février », sans que cela pose de problème particulier.

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