Franceinfo a interrogé la psychopédagogue Brigitte Prot et le champion de France de la mémoire, Sébastien Martinez, pour guider les lycéens dans la dernière ligne droite avant la première épreuve écrite, la philosophie, le 16 juin.
« Que puis-je savoir ? », « Que dois-je faire ? », « Que puis-je espérer ? » Ainsi s’articule la pensée du célèbre philosophe allemand Emmanuel Kant. Ce sont aussi les questions que peuvent se poser les candidats du baccalauréat général et technologique, à un mois de la première épreuve écrite. Après la philosophie, lundi 16 juin, suivront les épreuves de spécialités du 17 au 19 juin, et le grand oral du 23 juin au 2 juillet.
Trente jours avant de composer, il est encore temps d’établir un plan d’attaque pour réviser efficacement et dans un état d’esprit serein. Franceinfo a interrogé Brigitte Prot, ancienne professeure de français et psychopédagogue, autrice du livre Génération Z – Libérer le désir d’apprendre, et Sébastien Martinez, champion de France de la mémoire en 2015 et auteur du livre Les champions de la mémoire. Ils livrent aux lycéens de terminale et aux candidats libres leurs meilleurs conseils.
1 Faire le point sur ce qu’il reste à faire
A un mois du bac, la bonne gestion du temps est une priorité. « Il s’agit d’abord de visualiser où l’on en est », explique Brigitte Prot, qui propose pour cela d’établir un tableau à deux entrées. D’un côté, la matière et sa leçon ; de l’autre, l’évaluation du temps nécessaire pour maîtriser la leçon. Selon elle, cette mise à plat des objectifs doit être actualisée au fur et à mesure, pour mesurer la progression. « Dès qu’une tâche est accomplie, le fait de la cocher ou de la surligner permet de se motiver. »
Une méthode appuyée par Sébastien Martinez : « L’élève est certain de ne pas faire d’impasse ». Le champion de la mémoire, capable de retenir en 1’30 » l’ordre d’un paquet de cartes comme le racontait Libération, propose aussi de distinguer les « cours à connaissance », comme l’histoire-géographie, et les« cours à exercice », comme les mathématiques. Qui, en fonction, ne demandent pas le même temps de préparation.
Il ne faut également pas hésiter à se donner de la latitude si le temps prévu pour une leçon a été sous-estimé. Brigitte Prot propose par ailleurs aux élèves d’utiliser une montre avec un cadran à aiguilles, plutôt qu’une montre digitale, pour mieux se rendre compte du temps passé sur une tâche et du temps qu’il reste pour la terminer.
2 Organiser un planning quotidien
Une fois ce tableau global réalisé, un planning jour par jour peut être construit. Brigitte Prot préfère laisser le choix aux élèves qu’elle accompagne : travailler en continu, avec une matière par demi-journée, ou en discontinu, avec un changement de matière toutes les une à deux heures. « La préparation du bac est très personnelle. La seule chose que je déconseille, c’est de passer une journée entière » sur un seul et même thème, détaille l’ancienne enseignante, le risque étant de se lasser rapidement.
Sébastien Martinez souligne, lui, les bénéfices de la « méthode Pomodoro » : des sessions de travail de 25 minutes suivies de pauses de cinq minutes, une gestion du temps journalière qui permet, selon lui, de prévenir la fatigue mentale. « Il n’y a pas de règle concernant la répartition des révisions, précise-t-il. Le plus important est de prévoir un moment pour travailler un cours, et un moment pour revenir dessus au moins une fois avant le bac, afin de le maintenir correctement en mémoire. »
Au quotidien, Brigitte Prot suggère de ne pas commencer les révisions trop tard. Mais certains adolescents ont plus de mal que d’autres à sortir du lit. « Tout le monde n’est pas fait pour se lever à 6 heures ! L’idéal reste de se mettre au travail avant 10 heures », estime la psychopédagogue, parce que le cerveau mémorise davantage le matin. Elle ajoute que le repas du midi doit être maintenu à une heure fixe. Ensuite, il est souhaitable de travailler jusqu’à environ 17 heures. Puis, il est possible de consacrer une trentaine de minutes le soir à relire ce que l’on a déjà appris.
3 Trouver son lieu de travail
Réviser dans sa chambre, une bonne idée ? A ce sujet, les deux spécialistes ont un avis nuancé. Selon Sébastien Martinez, ce lieu de travail peut correspondre à certains profils de lycéens, les plus studieux. Mais il existe une règle : s’en imposer. « Je leur conseille d’enlever les objets qui peuvent déconcentrer, comme la console de jeux ou le téléphone. » Pour Brigitte Brot, la chambre reste, quoi qu’il arrive, un lieu de tentations, ne serait-ce que pour s’allonger sur son lit et sommeiller.
A la maison, il existe d’autres pièces, comme la cuisine ou le salon, propices à l’apprentissage, à condition de ne pas être sensible au bruit. Parce qu’il s’agit de lieux de passage, l’adolescent, peut s’y sentir moins seul et devrait éviter de se réfugier dans ses pensées ou son smartphone. Pour les élèves qui en ont la possibilité, le jardin a forcément ses atouts. « Il y a aussi, évidemment, la bibliothèque [publique ou scolaire]. Un endroit où l’émulation est présente, car toutes les personnes qui nous entourent sont au travail », ajoute Brigitte Prot.
4 Varier les méthodes de révision
Trente jours avant l’examen, il n’est pas trop tard pour rédiger des fiches. A condition que ce travail ne soit pas chronophage et qu’il soit bien réalisé. « Il faut éviter de tomber dans le travers de la fiche linéaire, remplie uniquement de phrases. On privilégie la fiche visuelle, avec des éléments comme la frise chronologique, un tableau ou un nuage de mots », conseille Sébastien Martinez. Pour Brigitte Prot, la fiche permet d’apprendre en faisant. Elle doit tenir en recto-verso, utiliser des codes couleurs, et contenir, à la fin, les trois idées essentielles d’un chapitre, « à côté desquelles on ne peut pas passer ».
Une fois la fiche d’une leçon réalisée, ou revue si elle a été faite plus tôt dans l’année, une phase d’entraînement peut débuter. « Pour les matières scientifiques, on s’exerce à refaire les exercices qui accompagnent la leçon, on s’assure de comprendre la logique par la pratique. Pour les matières plus littéraires, on utilise la méthode du plan, à savoir réécrire, de tête, l’ossature du cours », propose Sébastien Martinez.
Ensuite, l’idée est de se mettre dans les conditions réelles de l’examen. « Au moins une semaine avant la première épreuve, on se plonge dans les bacs blancs et les annales pour se préparer à l’exercice d’endurance que représente le baccalauréat », recommande le champion de la mémoire. Les derniers jours de révision peuvent aussi être consacrés aux savoirs « périphériques », qui permettront de grappiller des points. Exemple, en philosophie : la mémorisation d’une quinzaine de citations dans leur contexte.
La psychopédagogue vante par ailleurs les mérites du travail en groupe. « La pire insécurité de celui qui bosse son bac, c’est la solitude. Donc prévoir des sessions en duo, trio, ou plus, avec des amis, permet de s’enlever une dose de stress. En étant avec d’autres, on s’évite aussi de procrastiner », explique Brigitte Prot. « Le travail à plusieurs nous amène à mieux mémoriser les questions qu’on s’est posées à voix haute » sur une leçon donnée, à condition de choisir les bonnes personnes, complète Sébastien Martinez.
5 S’aérer, se divertir et soigner son sommeil
Après la pause déjeuner ou en fin de journée, Brigitte Prot insiste sur la nécessité de pratiquer une activité physique ou créative, une activité « dans laquelle on se réussit autrement » que par la réussite scolaire. Le week-end, elle suggère de moins travailler, au maximum une demi-journée par jour. « Les lycéens qui préparent le bac ne doivent pas se mettre dans un rythme de classe préparatoire. Ce n’est pas ce qu’on attend d’eux et, le risque, c’est aussi de craquer en route. »
Sur le sommeil, deux habitudes à prendre : pas d’écran juste avant de dormir et une heure de couchage fixée avant 23 heures. « Un cerveau en bonne santé, à cet âge-là, c’est au moins 8 heures de sommeil », précise Sébastien Martinez.« Avec une nourriture équilibrée et des repas réguliers, on s’assure suffisamment d’énergie », ajoute Brigitte Prot, selon qui les moments à table doivent aussi être considérés comme des moments de plaisir et de relaxation.