Il s’agit des violences les plus meurtrières depuis que les rebelles ont chassé le dictateur Bachar al-Assad et mis en place un gouvernement de transition.
Au moins 72 personnes ont été tuées au cours d’affrontements dans le nord-ouest de la Syrie entre des membres des forces de sécurité et des combattants fidèles au président déchu Bachar al-Assad, selon un bilan publié vendredi 7 mars par l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Des dizaines d’autres ont été blessées ou capturées lors de ces combats, également confirmés par plusieurs sources officielles syriennes. Il s’agit des attaques « les plus violentes contre les nouvelles autorités depuis la chute d’Assad », le 8 décembre, relève l’ONG dans un communiqué(Nouvelle fenêtre). Vendredi, elle a fait état de nouvelles violences, annonçant 52 « exécutions d’hommes alaouites », communauté dont est issu l’ancien dictateur, par les forces gouvernementales.
Des affrontements dans les régions de Lattaquié et Tartous
En 24 heures, les affrontements ont fait au moins 72 morts, dont « 36 membres des forces de sécurité et du ministère de la Défense tués par des forces loyalistes à Assad, 32 combattants armés et quatre civils tués par les forces de sécurité », détaille l’OSDH, qui fait état de prisonniers dans les deux camps. Les affrontements ont principalement lieu dans la province côtière de Lattaquié, qui abrite, avec celle voisine de Tartous, une grande partie de la minorité alaouite dont est issu Bachar al-Assad.
A une dizaine de kilomètres de Lattaquié, la ville de Jablé est le théâtre d’une guérilla urbaine. Dans « une attaque bien planifiée et préméditée, plusieurs groupes de miliciens d’Assad ont attaqué nos positions et nos points de contrôle, ciblant un grand nombre de nos patrouilles dans la zone de Jablé », a expliqué Mustafa Kneifati, un responsable de la sécurité à Lattaquié. Ces attaques ont fait « de nombreux martyrs et blessés parmi nos forces », a-t-il affirmé, sans communiquer de bilan précis.
A Jablé, les forces de sécurité ont également capturé et arrêté Ibrahim Houweïja, un ancien chef des services de renseignement de l’armée de l’air, l’une des agences de sécurité les plus proches de la famille Assad, a rapporté l’agence de presse d’Etat Sana. « Il est accusé d’avoir commis des centaines d’assassinats à l’époque du criminel Hafez al-Assad », le père et prédécesseur de Bachar al-Assad, selon cette agence. Selon l’OSDH, des forces militaires ont été prises en embuscade sur l’autoroute reliant Tartous à Homs, et sur celle entre Baniyas et Jablé.
Un couvre-feu imposé dans plusieurs villes après des manifestations
L’arrestation d’une personne suspectée de trafic d’armes dans un village au sud-est de Jablé a viré à l’affrontement entre les forces de sécurité du gouvernement de transition et des groupes armés « affiliés au criminel de guerre Souheil al-Hassan », ancien chef des forces spéciales sous Bachar al-Assad, a déclaré le directeur provincial de la sécurité à Sana. Des échanges de tirs ont fait un mort, du côté des forces de sécurité, et plusieurs blessés, dont un photographe de la chaîne qatarie Al Jazeera.
Après cet événement, les dirigeants alaouites ont appelé sur Facebook à des « manifestations pacifiques » en réponse aux frappes d’hélicoptères qui, selon eux, ont visé des « maisons de civils ». Des milliers de manifestants ont envahi les rues des villes de Lattaquié et de Tartous pour exiger que les forces gouvernementales se retirent de la campagne. En réaction, les forces de sécurité de la province de Lattaquié ont imposé jeudi un couvre-feu de 24 heures dans les régions à majorité alaouites, dont Lattaquié, Tartous et Homs, dans le centre du pays, selon l’agence de presse Sana.
Des renforts déployés vendredi
Dans ce contexte très tendu, le ministère de la Défense syrien a confirmé le déploiement de renforts dans les villes de Lattaquié et Tartous « pour rétablir la stabilité et la sécurité dans la région ». « De vastes opérations de ratissage ont débuté dans des villes, villages, localités et montagnes environnants » dans les provinces de Lattaquié et de Tartous, après l’arrivée de renforts militaires, a déclaré vendredi matin l’agence de presse officielle Sana, citant une source haut placée au sein des forces de sécurité. Selon cette source, les opérations visent des membres « des milices d’Assad et ceux qui les ont soutenues et aidées ». Elle a appelé les civils à « rester chez eux et signaler tout mouvement suspect ».
C’est dans le cadre de cette opération que 52 hommes alaouites ont été exécutés vendredi par les forces de sécurité, selon l’OSDH, dans les localités d’Al-Shir et d’Al-Mukhtariya, dans la banlieue de Lattaquié. L’ONG s’appuie sur des vidéos qu’elle dit avoir authentifiées et sur des témoignages reçus des proches des victimes.