Un nouveau variant du virus, plus contagieux et plus mortel, est arrivé en Suède, où un cas a été déclaré, et sévit en Afrique. Les scientifiques sont toutefois confiants sur l’efficacité de l’actuel vaccin.
Sommes-nous suffisamment équipés contre le nouveau variant du mpox ? Après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la France a placé vendredi son système de santé en état de vigilance maximale. Alors que la Suède a signalé un premier cas jeudi, d’autres devraient suivre en Europe dans les prochaines semaines, selon l’OMS.
Dans ce contexte, l’état d’urgence sanitaire international permet de « motiver les gouvernements pour faciliter l’accès à la vaccination et acheter des vaccins en nombre important », a souligné samedi sur France Inter Karine Lacombe, infectiologue et cheffe de service hospitalier des maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine. Franceinfo fait le point sur la situation vaccinale alors que le ministère de la Santé a annoncé, samedi 17 août, qu’« aucune contamination par le [variant clade 1b] n’a[vait] encore été recensée » dans le pays pour l’instant.
Un vaccin efficace contre le variant de 2022
Une première pandémie de mpox avait éclaté en 2022. Alors que celle du Covid a nécessité la fabrication d’un nouveau vaccin adapté, le vaccin contre la variole s’est avéré efficace contre le mpox, son lointain cousin. Obligatoire en France jusqu’en 1979, la vaccination antivariolique (première et deuxième générations) a cessé « parce qu’il n’y avait plus de cas de variole humaine dans le monde. C’est une maladie qui a été éradiquée », rappelle Brigitte Autran, professeure émérite en immunologie et présidente du Covars, Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires, sur France Inter.
Plusieurs travaux scientifiques démontrent l’efficacité de la vaccination « troisième génération » contre le mpox (variant « clade 2b »). Une étude de l’Inserm publiée fin juillet dans The Lancet Regional Health-Europe conclut à « une réduction de l’incidence estimée à 99% » en cas de « mise en place rapide d’une vaccination ». Une méta-analyse américaine de juin 2024 précise que celle-ci permet de « prévenir les maladies graves et l’hospitalisation ». Une étude américaine de mai 2023 suggère par ailleurs « qu’une série de deux doses semblait offrir une meilleure protection ».
Un effet protecteur probable contre le nouveau variant
L’épidémie a pris un nouveau tournant : 18 737 cas suspectés ou confirmés et 500 morts ont été répertoriés depuis début 2024 en Afrique, principalement en République démocratique du Congo (RDC), selon l’agence de santé de l’Union africaine (Africa CDC). Les vaccins actuels seront-ils efficaces contre le nouveau variant clade 1b ? Plus mortel et plus transmissible que les variants précédents, son taux de mortalité peut atteindre 5% chez les adultes et 10% chez les enfants.
« On est équipés pour faire face à cette épidémie avec des vaccins qui vont fonctionner », anticipe Brigitte Autran. « On sait que ce vaccin, qui s’appelle le MVA, de la firme Bavarian Nordic, protège contre le variant ou le sous-type de mpox qui a circulé en 2022-2023. On a de très forts arguments pour penser qu’il va protéger aussi efficacement contre le variant qui vient d’émerger. (…) Il n’y a aucune raison pour que ce vaccin ne fonctionne pas« , estime la professeure en immunologie.
Un stock suffisant en Europe…
Le continent européen ne devrait pas souffrir d’un problème d’approvisionnement. Le laboratoire pharmaceutique danois Bavarian Nordic, qui fabrique le seul vaccin homologué en Europe et aux Etats-Unis, a annoncé disposer de 500 000 doses en stock et se dit prêt à produire jusqu’à 10 millions de doses d’ici 2025. Vendredi, le laboratoire a également annoncé avoir demandé à faire homologuer son vaccin pour les adolescents.
Côté français, « il n’y a aucune inquiétude par rapport à l’accès au vaccin », estime l’infectiologue Karine Lacombe. « Les vaccins sont déjà disponibles et on continue de les utiliser. On n’a jamais arrêté entre 2022 et maintenant ». A l’hôpital Saint-Antoine, à Paris, où travaille l’infectiologue, « on a plusieurs centaines de doses qui sont à la pharmacie et qui attendent qu’on les utilise. On a activé de nouvelles lignes de vaccination », illustre-elle.
… mais insuffisant en Afrique, foyer de l’épidémie
Les vaccins antivarioliques sont accessibles en Afrique depuis « très récemment », « avec des contraintes logistiques et financières majeures », a déploré sur France Inter Xavier Lescure, infectiologue à l’hôpital Bichat-Claude-Bernard et membre du Covars. Il n’est toutefois « pas très inquiet » : « Il y a un niveau de réactivité dans les firmes pharmaceutiques et vaccinales qui a fait ses preuves pour le Covid, il y aura des aides, des soutiens, des apports qui feront que la fabrication du vaccin sera au rendez-vous », anticipe-t-il. « Il est très important d’augmenter les capacités de vaccins », abonde Brigitte Autran.
Dans son rapport destiné à l’OMS, l’agence de santé de l’Union africaine a fait « une requête très explicite de solidarité et d’équité entre les pays du Nord et du Sud », rappelle Xavier Lescure. Le professeur, spécialiste en maladies infectieuses à l’université Paris-Cité, évoque un contraste entre la « prise en charge optimale dans les pays du Nord » et un accès au vaccin « extrêmement limité, voire totalement inexistant, dans les pays africains » en 2022-2023.
Appel entendu : la Commission européenne a annoncé jeudi dans un communiqué l’envoi de 215 000 doses du vaccin de Bavarian Nordic à l’agence de santé de l’Union africaine. Et vendredi, Gabriel Attal a également annoncé que la France allait « réaliser un don de vaccins aux pays les plus touchés », « conformément à nos valeurs de solidarité internationale et à la priorité sanitaire de contenir le foyer épidémique en Afrique ».
Une population cible qui ne devrait pas s’élargir
Depuis l’été 2022, seule une frange de la population française est concernée par la vaccination préventive. Selon un avis de la Haute Autorité de santé (HAS) daté de juillet 2022, il s’agit « des hommes multipartenaires ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), des personnes trans rapportant des partenaires sexuels multiples, des travailleurs-ses du sexe, des professionnels des lieux de consommation sexuelle ». Elle peut être aussi envisagée « pour les professionnels de santé amenés à prendre en charge les personnes malades ».
Cette partie de la population vaccinée il y a deux ans est « vraisemblablement protégée, encore qu’on ne sache pas quelle est la durabilité d’efficacité de ce nouveau vaccin », tempère Brigitte Autran. « A priori, comme pour l’épidémie de 2022, il serait nécessaire de refaire une nouvelle injection de vaccin pour avoir une protection complète. » Quant aux personnes nées avant 1975 et déjà vaccinées, « elles ont de la mémoire immunitaire », estime-t-elle.
« Il n’y a pas de raison qu’on ouvre la vaccination à la population générale. Il n »y aura pas d’inflation majeure des besoins au Nord », estime Xavier Lescure. « Au Sud, c’est différent, puisque la population exposée est beaucoup plus importante. (…) C’est sur les populations africaines exposées [qu’il faut faire des efforts de vaccination]. » Le gouvernement a saisi la HAS afin d’obtenir des recommandations vaccinales adaptées à la situation actuelle.