Sébastien Lecornu veut utiliser l’article 50-1 pour négocier le budget 2026

Sébastien Lecornu veut utiliser l’article 50-1 pour négocier le budget 2026

25.11.2025 18:08
3 min de lecture

Lundi, lors de sa déclaration depuis Matignon, Sébastien Lecornu a présenté une approche inédite pour négocier un compromis avec le Parlement concernant le budget 2026. En parallèle des discussions au Sénat, le Premier ministre a exprimé son intention de rencontrer à nouveau tous les groupes politiques et d’organiser des débats thématiques, suivis d’un vote, notamment sur la Défense, rapporte TopTribune.

Sébastien Lecornu souhaite donc utiliser l’article 50-1 de la Constitution pour initier ces discussions. Cet article permet au gouvernement de faire une déclaration qui peut donner lieu à un débat et, si décidé, à un vote sans engager sa responsabilité.

C’est quoi l’article 50-1 de la Constitution ?

Selon le site Légifrance, l’article 50-1 stipule que « le Gouvernement peut, de sa propre initiative ou à la demande d’un groupe parlementaire, faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à débat et peut, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité. » Cet article peut être appliqué tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.

« Il a essentiellement pour objet d’éviter d’utiliser l’article 49.1, précise Michel Lascombe, professeur agrégé de droit public et spécialiste de droit constitutionnel, auprès de 20 Minutes. C’est-à-dire lorsque le gouvernement engage sa responsabilité sur une déclaration de politique générale. » L’ancien Premier ministre François Bayrou avait utilisé l’article 49.1 en sollicitant un vote de confiance à l’Assemblée nationale, ce qui avait conduit à sa démission.

À quoi sert exactement l’article 50-1 de la Constitution ?

L’article 50-1 permet au gouvernement de faire une déclaration « avec ou sans débat » et « avec ou sans vote ». « Mais ce vote est purement indicatif, souligne le spécialiste. Il n’a pas pour conséquence d’engager la responsabilité du gouvernement », précise-t-il. Le vote n’a donc qu’une valeur politique et symbolique.

« Sébastien Lecornu propose des votes sur des sujets concernant le budget au titre de l’article 50-1 de la Constitution (défense, agriculture, énergie). Ces votes n’emportent pas l’adoption de parties du budget », a précisé sur ses réseaux sociaux Benjamin Morel, constitutionnaliste.

L’article 50-1 a-t-il déjà été utilisé ?

Oui, il a déjà été utilisé. Le 14 octobre dernier, Sébastien Lecornu avait également fait usage de cet article. On avait tous pensé qu’il faisait une déclaration de politique générale en s’appuyant sur l’article 49.1, mais non, pointe Michel Lascombe. Il a fait une déclaration avec vote sans risque.

Cet article a été régulièrement intitulé pour des sujets militaires, notamment pour l’Afghanistan en 2010, pour l’Irak et la Syrie en 2015, ou encore en mars dernier au sujet de la situation en Ukraine et en Europe. « L’article a effectivement été conçu pour permettre au gouvernement de faire des déclarations de politique étrangère sans que le risque d’un vote négatif ne mène à la chute du gouvernement », ajoute Michel Lascombe.

Des sénateurs ont déjà critiqué cette initiative, dénonçant la volonté de Sébastien Lecornu de se concentrer sur la forme au détriment du fond, ce qui engendrerait une « cacophonie institutionnelle ». « Pendant qu’ils débattent, les parlementaires ne font pas autre chose », insiste le spécialiste de droit constitutionnel.

Pourquoi Sébastien Lecornu adopte-t-il cette stratégie ?

Selon Michel Lascombe, l’objectif de Sébastien Lecornu est de démontrer aux députés qu’un consensus thématique est possible, qu’ils peuvent être « d’accord sur deux ou trois points ». « Dans sa déclaration, il pourrait proposer d’augmenter les dépenses de la Défense de 6 milliards d’euros et recevoir un vote favorable de tous, explique-t-il. Le lendemain, il abordera l’agriculture, et de nouveau, la plupart votera pour. À la fin, il souligne que les députés sont d’accord sur ces points, mais qu’ils refusent de voter le budget qui les intègre. »

Sébastien Lecornu prévoit de faire cinq déclarations thématiques. « Mais le budget, c’est une politique globale. Ce n’est pas qu’une addition de chiffres ; il y a une philosophie dans le budget », insiste Michel Lascombe. « Imaginez que vous soyez dans un supermarché et que vous puissiez choisir une boîte de 250 boules de Noël. Si 5 vous plaisent et 245 sont sans intérêt, achèteriez-vous cette boîte ? Ce n’est pas parce qu’on aime quelques éléments qu’on prend tout le paquet. »

Pour Michel Lascombe, cette « méthode un peu différente » ne portera pas ses fruits. « Je ne vois vraiment rien, rien de possible », conclut-il.

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

Dernières nouvelles

À NE PAS MANQUER