1,5 million de signatures contre la loi Duplomb : analyse des raisons juridiques de l'inefficacité de cette pétition.

1,5 million de signatures contre la loi Duplomb : analyse des raisons juridiques de l’inefficacité de cette pétition.

21.07.2025 20:13
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La loi Duplomb, après avoir suscité de vifs débats au sein du Parlement, continue d’attirer l’attention du public, bien qu’elle ait été adoptée. En effet, pour la première fois sous la Ve République, une pétition a réussi à dépasse les 500 000 signatures requises pour initier un débat, rapporte TopTribune.

Actuellement, et à l’heure où nous rédigeons cet article, la pétition contre la loi Duplomb a rassemblé près de 1 500 000 signatures. Malgré cet élan de mobilisation citoyenne indéniable, il est à noter que cette dynamique n’aura qu’un impact limité sur la législation en place.

Un débat, mais pas de nouveau vote

« La véritable question soulevée par le droit de pétition est de savoir comment le peuple peut s’exprimer entre les élections dans un régime parlementaire », précise Pierre Egéa, professeur de droit constitutionnel et avocat.

Dans la Constitution de 1958, seul l’article 10 évoque l’expression du peuple entre les élections, à travers un référendum. Toutefois, ce dernier est à l’initiative du président de la République, contrairement à la Suisse qui propose un référendum d’initiative populaire.

Le droit de pétition existe au niveau local, précisé dans l’article 72-1, mais il est absente à l’échelle nationale. C’est le règlement de l’Assemblée nationale qui en fixe les modalités.

Tout comme les manifestations ou les grèves, le droit de pétition est un moyen pour le peuple de s’exprimer, sans impact juridique réel.

Pierre Egéa — Avocat, professeur de droit constitutionnel

Une fois le seuil des 500 000 signatures atteint, l’Assemblée nationale se doit de débattre de cette pétition, mais cela ne donnera lieu à aucun vote. « Juridiquement, le débat se limite à la pétition elle-même et ne peut mener à l’abrogation de la loi », ajoute Egéa.

Un pouvoir limité du président

Un accord a été trouvé en commission mixte paritaire concernant la loi Duplomb, qui a été adoptée après un vote solennel à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Il incombe maintenant au président de la République de promulguer la loi pour qu’elle entre en vigueur. Mais Emmanuel Macron peut-il refuser cette promulgation ? « Le président a l’obligation de promulguer les lois, mais rien ne le contraint explicitement », répond Egéa.

Le président, en tant que chef de l’exécutif, doit exécuter les lois. S’il ne le fait pas, il risque de mettre en péril les fondements mêmes de la démocratie.

Pierre Egéa — Avocat, professeur de droit constitutionnel

Dans l’histoire de la France, un tel refus de promulgation par un président ne s’est jamais produit. Même lors de l’adoption du Contrat Premier Embauche (CPE) en 2006, Jacques Chirac avait promis de promulguer la loi, bien qu’il ait demandé des modifications, créant une situation intenable pour le Premier ministre de l’époque, Dominique de Villepin, qui a finalement retiré le texte.

Le seul levier dont dispose Emmanuel Macron est de demander une nouvelle lecture de la loi au Parlement, relançant ainsi le processus législatif.

Une réponse politique

Il est évident qu’une telle mobilisation ne peut rester sans réponse politique. « Le ministre devra s’exprimer », prévoit Pierre Egéa.

Cela constitue un instrument politique majeur, car il est impératif de répondre face à un tel nombre de signatures. Cela donne également des arguments aux membres de l’Assemblée nationale.

Pierre Egéa — Avocat, professeur de droit constitutionnel

C’est là un « phénomène sociétal indéniable », selon le juriste, qui soulève aussi la question de la signification de la signature: « Beaucoup de signataires savent-ils réellement ce qu’ils signent et pourquoi ? »

Il convient de rappeler que les pétitions sur le site de l’Assemblée nationale sont soumises à une authentification via FranceConnect, une démarche plus contraignante que celles sur des plateformes comme change.org, par exemple.

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