Une tribune offerte à l’agresseur : Matvienko à Genève malgré les sanctions
Une tribune offerte à l’agresseur : Matvienko à Genève malgré les sanctions

Une tribune offerte à l’agresseur : Matvienko à Genève malgré les sanctions

29.07.2025 12:45
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Le 27 juillet 2025, Valentina Matvienko, présidente du Conseil de la Fédération — la chambre haute du parlement russe — a foulé le sol suisse, malgré les sanctions occidentales qui pèsent sur elle, pour participer au Sommet mondial des femmes présidentes de parlement, tenu à Genève du 28 au 30 juillet. L’événement, placé sous l’égide de l’Union interparlementaire, réunit les représentants de 181 parlements nationaux autour du thème : « Un monde en tumulte : coopération parlementaire et multilatéralisme pour la paix, la justice et la prospérité ».

Malgré l’interdiction d’entrée en vigueur sur son territoire, la Suisse a accordé à Matvienko et à d’autres membres de la délégation russe des visas à entrée unique, invoquant ses obligations en tant que pays hôte du forum. Officiellement, Berne a expliqué qu’il était juridiquement tenu d’inviter toutes les délégations membres de l’Union interparlementaire.

Sanctions contournées, message inchangé

Le voyage de la délégation russe a néanmoins soulevé de vives critiques, d’autant plus qu’il s’est effectué via l’espace aérien italien, avec l’autorisation explicite de Rome, bien informée sur la composition de la délégation et les objectifs du déplacement. En permettant ce transit, l’Italie a indirectement facilité la présence de figures clefs du régime russe en Europe occidentale.

Valentina Matvienko est l’une des architectes institutionnelles de l’agression contre l’Ukraine. Le Conseil de la Fédération, qu’elle dirige, a formellement autorisé l’emploi des forces armées russes hors des frontières nationales, donnant ainsi une couverture politique à l’invasion de février 2022. Elle avait elle-même milité pour un vote unanime en faveur de cette décision. Dès lors, pour de nombreux observateurs, sa responsabilité dans le déclenchement du conflit est directe et documentée.

Narratif rétrograde et rhétorique de guerre

Lors de son discours à Genève, Matvienko a soigneusement évité d’aborder les négociations récentes entre Moscou et Kyiv, relancées à Istanbul. Elle a préféré reprendre les éléments de langage du Kremlin des années 2014-2021 : dénonciation d’un « coup d’État » à Kyiv, allégations de nazisme au sein des autorités ukrainiennes, et accusations de massacres de civils dans le Donbass par le « régime de Kyiv », avec un accent particulier sur les enfants.

Ces affirmations, largement discréditées par la communauté internationale, ont été reléguées au rang de propagande. Et pourtant, c’est ce message que Genève a vu relayé depuis sa tribune officielle.

Une participation qui sape la cohérence occidentale

Outre Matvienko, la délégation russe comprenait Konstantin Kossatchev, vice-président du Conseil de la Fédération, Piotr Tolstoï, vice-président de la Douma, et Leonid Sloutski, président de la commission des affaires internationales de la Douma. Tous trois figurent sur des listes de sanctions en tant que propagandistes et instigateurs de guerre.

L’autorisation exceptionnelle accordée à ces figures suscite des accusations d’hypocrisie diplomatique. Pour de nombreux parlementaires européens, leur accueil, même temporaire, constitue un signal de faiblesse. Le Kremlin, notent certains diplomates, ne comprend que le langage de la fermeté. Or, en tolérant la présence de représentants russes sous sanctions, la Suisse risque d’encourager la perception que l’Europe n’est pas unie dans sa réponse à l’agression.

Le paradoxe est flagrant : une conférence dédiée à la paix a permis à des figures centrales d’un régime en guerre de s’exprimer librement dans le cœur institutionnel de l’Europe.

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