Le média d’investigation The Insider et la plateforme tchèque Investigace.cz ont révélé le 23 octobre 2025 qu’Alexandre Petrov, directeur adjoint du Centre fédéral nucléaire russe, figure sur la liste des sanctions et possède 43 % du capital de l’usine Roboterm à Chotěboř, en République tchèque. Cette entreprise produit des systèmes de chauffage par induction pour le traitement des métaux, utilisés notamment par le groupe « KamAZ » avant 2022. Parallèlement, la société russe de Petrov, « Reltek », fournit un équipement similaire à plusieurs fabricants d’armements, dont les concepteurs des missiles « Iskander » et « Topol-M ».
Liens entre l’industrie tchèque et le complexe militaro-industriel russe
« Reltek » figure au registre fermé du ministère russe de l’Industrie, réservé aux entreprises du secteur de la défense. Ses technologies d’induction servent à la fabrication de composants pour l’artillerie, les blindés et les missiles. Depuis 2022, la société a continué à livrer du matériel à plusieurs entreprises d’armement russes, notamment au « KEMZ » de Kizliar, qui développe des détonateurs pour obus, ainsi qu’aux usines « Votkinski » et « Proton-PM », rattachées au groupe « Roscosmos ». Ces dernières produisent des missiles balistiques et intercontinentaux.
Parcours et intérêts économiques d’Alexandre Petrov
Ancien directeur général de « Reltek » à Iekaterinbourg de 1997 à 2009, Petrov a ensuite occupé des fonctions publiques, notamment comme ministre de l’Industrie et vice-président du gouvernement régional de Sverdlovsk. En 2018, il a rejoint la direction du Centre électrotechnique rattaché à l’Institut de recherche nucléaire de Snezhinsk. Depuis 2005, il détient 43 % de la société RT s.r.o., unique propriétaire de Roboterm s.r.o. Ce lien direct lui donne accès aux technologies européennes de chauffage par induction, utilisées à la fois dans des applications civiles et militaires.
Failles du contrôle des sanctions en Europe
Selon The Insider et Investigace.cz, les mécanismes de contrôle des sanctions en République tchèque restent insuffisants. Même après le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine, des produits tchèques auraient continué à parvenir en Russie via des pays tiers, notamment la Turquie. Interrogé par Investigace.cz, Petrov a affirmé que la victoire du parti d’Andrej Babiš pourrait « améliorer la situation ». Ces propos soulignent la sensibilité politique du dossier et la nécessité d’un encadrement plus strict des investissements étrangers d’origine russe.
Appel à un renforcement de la surveillance européenne
Les enquêteurs estiment que la participation de Petrov à Roboterm crée un risque de contournement des sanctions européennes. Ils recommandent aux autorités tchèques et européennes d’intensifier la surveillance des avoirs russes liés au secteur de la défense, notamment par des audits juridiques, une interdiction d’exportation d’équipements sensibles et d’éventuelles mesures restrictives contre Petrov. Des démarches de gel d’actifs ou de suspension temporaire des droits de propriété sur Roboterm pourraient également être envisagées dans l’attente d’une enquête complète.