Un ajustement fiscal subtil mais significatif modifiera l’équilibre financier de nombreux foyers à partir de septembre 2025. Ce changement technique dans le prélèvement à la source s’inscrit dans une logique de justice redistributive qui commence à se concrétiser. Cependant, seuls les contribuables les plus vigilants pourront en profiter, rapporte TopTribune.
Au 1er septembre 2025, le taux individualisé devient la norme par défaut
La réforme, qui fait partie de la loi de finances pour 2024, introduira le 1er septembre 2025 l’adoption automatique du taux individualisé de prélèvement à la source pour tous les couples fiscalement unis. Ce changement, qui remplace le taux commun jusqu’alors appliqué par défaut, affectera plus de 15 millions de foyers mariés ou pacsés en France.
Inscrite dans le Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP) en date du 7 mai 2025, cette mesure traduit un changement de perspective : l’équité prend le pas sur la simplification. Auparavant, le taux appliqué aux couples était calculé selon une moyenne plutôt favorable à celui des deux conjoints ayant un revenu supérieur.
Rééquilibrage contributif : un enjeu de genre et de justice fiscale
Cette réforme fait ressortir un effet indésirable du prélèvement à la source instauré en 2019 : dans 78% des couples français, l’homme perçoit des revenus plus élevés que sa conjointe. Dans les ménages où la différence de salaire est marquée, ce qui est le cas d’un couple sur cinq, la répartition des prélèvements devenait déséquilibrée, pénalisant le membre le moins rémunéré. En moyenne, les hommes affichent un taux d’imposition inférieur de 13%, alors que les femmes subissent un taux supérieur de 6% comparé à ce qu’ils paieraient en tant que célibataires.
Ce constat s’inscrit dans un historique d’opacité fiscale. Avec l’adoption par défaut du taux individualisé, chaque conjoint sera soumis à un prélèvement mensuel qui reflète sa propre base imposable, sans affecter le montant total de l’impôt dû par le couple.
Trois cas pratiques : l’effet réel du taux individualisé
Examinons trois cas illustrant les avantages d’un taux individualisé.
Cas 1 – Paul et Aurélia, professions libérales non mariées, pacsés en 2023
Paul, consultant informatique indépendant, déclare des revenus nets mensuels de 6.800 euros. Aurélia, orthophoniste à temps partiel, perçoit 2.200 euros.
Avec le taux commun de 9,6%, Aurélia est soumise à un prélèvement de 211 euros par mois, tandis que Paul verse 652 euros.
En optant pour un taux individualisé, le taux d’Aurélia s’établit à 3,1% (ce qui représente 68 euros), alors que celui de Paul augmente à 11,9% (soit 809 euros).
➡ Économie nette pour Aurélia : 143 euros par mois.
Cas 2 – Sonia et Julien, jeunes actifs salariés à Paris, mariés depuis 2021
Julien, en tant que product manager, gagne 4.100 euros nets. Sonia, chargée de mission dans une ONG, perçoit 1.700 euros.
Taux commun : 7,8% → Julien paie 319 euros, Sonia 132.
Taux individualisé : Julien atteint 10,6% (soit 435 euros), tandis que Sonia tombe à 2,4% (41 euros).
➡ Gain annuel pour Sonia : près de 1.100 euros.
Cas 3 – Antoine et Farah, cadres dirigeants, sans enfants à charge
Farah, directrice juridique, affiche un revenu mensuel net de 5.400 euros, alors qu’Antoine, consultant senior, gagne 3.200 euros.
Malgré des salaires relativement proches, le taux commun (10,2%) désavantage Antoine (326 euros de prélèvement), comparé à un taux individualisé (8,6% → 275 euros), tandis que Farah passerait à 11,8% (637 euros).
➡ Le taux individualisé permettrait une répartition plus équitable des contributions fiscales.
Préparer la bascule : simulateur, anticipation et arbitrage
Pour éviter des désagréments, il est possible de simuler le taux individualisé à l’aide de son espace personnel sur impots.gouv.fr. Bien que l’administration appliquera ce changement automatiquement, il sera possible de s’y opposer en sélectionnant une option explicite dans la section « Gérer mon prélèvement à la source ».
Certaines situations peuvent justifier la continuité du taux commun : acquisition immobilière conjointe, lissage des revenus dans un couple temporairement déséquilibré, ou gestion centralisée du patrimoine. À cet égard, le fisc propose une clause de non-application de l’individualisation, sous simple déclaration.
Vers une fiscalité personnalisée et transparente
Cette réforme marque un tournant dans un système qui était jusque-là uniformisé. Elle inscrit la fiscalité dans un cadre d’équité dynamique, reconnaissant le rôle de chaque individu dans le couple, tant sur le plan juridique que fiscal.
Cette évolution est perçue positivement par les intervenants du secteur. D’après service-public.fr, la mesure vise à « favoriser l’équité entre les conjoints et adapter le prélèvement aux capacités contributives de chacun ». Dans un contexte de polarisation accrue des revenus et d’individualisation des parcours professionnels, cette initiative répond à une exigence sociale : donner de la visibilité, dès le bulletin de paie, à une réalité économique souvent négligée.