Suspension de la réforme des retraites : Sébastien Lecornu s’en tire de justesse
Après un faux-départ marqué par la démission suivie de la re-nomination de Sébastien Lecornu, le Premier ministre a échappé, le 16 octobre 2025, à la censure au Parlement, à quelques voix près. En échange de la promesse de suspension de la réforme des retraites, le Parti socialiste a décidé de soutenir le Premier ministre, une victoire qu’il entend revendiquer. Cependant, la mise en œuvre de cette suspension soulève des questions complexes, rapporte TopTribune.
Lecornu II évite la censure de justesse
En tout, 271 députés ont voté pour la motion de censure, un chiffre insuffisant pour atteindre les 289 voix nécessaires au renversement du gouvernement. Les groupes de La France insoumise, ainsi que les communistes, les écologistes et l’extrême droite, ont majoritairement soutenu la censure, tandis que les Républicains et le PS ont opté pour le rejet. Une deuxième motion de censure déposée par le Rassemblement national a quant à elle récolté seulement 144 voix.
Un amendement ou une nouvelle loi ?
Sur le plan législatif, la question demeure : la suspension sera-t-elle intégrée dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale ou fera-t-elle l’objet d’une loi distincte ? Pierre Egéa, professeur de droit public à l’université de Toulouse, a expliqué que la première option semble plus probable, car le gouvernement prévoit de soumettre en novembre un amendement au projet de loi de budget de la Sécurité sociale pour 2026. Cette clarification intervient après des déclarations ambiguës du ministre du Travail, qui avait évoqué une loi sans fournir de détails.
Un jeu politique complexe
Les récents événements illustrent un jeu politique délicat. Selon Pierre Egéa, si la suspension de la réforme devait être examinée avant l’adoption du budget, l’opposition pourrait obtenir la suspension tout en rejetant le budget. En revanche, voter la loi après le PLFSS offrirait au gouvernement une porte de sortie pour garantir le budget et ignorer la suspension.
Les débats budgétaires débuteront à l’Assemblée nationale le 4 novembre, mais la discussion sur le budget pourra commencer dès la semaine prochaine avec le projet de loi de finances pour 2026. « En réalité, tout ce petit monde se tient par la barbichette », commente Egéa. Défendant la suspension, le PS devra néanmoins jongler avec l’urgence d’installer la taxe Zucman.
Une simple suspension pour l’instant
« Une suspension est en soi un concept ambigu », souligne le professeur. Alors qu’abroger une loi est un acte clair, suspendre les effets de la réforme jusqu’à 2027 nécessite un débat ultérieur sur les modalités de mise en œuvre. Cela contraste avec la gestion antérieure de la réforme qui avait été adoptée via le 49.3, un outil que Sébastien Lecornu a refusé d’utiliser pour ses négociations. Ce rejet semble le prix à payer pour maintenir son gouvernement à flot, du moins temporairement.
À l’heure actuelle, la question se limite à une simple suspension. Toutefois, la CGT a déjà critiqué cette décision, arguant qu’elle est en réalité un report de l’application de la réforme de quelques mois. « Ce décalage confirmerait les 64 ans, ignorant la mobilisation de millions de travailleurs », a déclaré le syndicat. L’évolution de cette situation restera à suivre de près.