BRATISLAVA – Selon le procureur européen slovaque Juraj Novocký, la réforme du Code pénal et le démantèlement d’une agence de lutte contre la corruption en Slovaquie ont ralenti les enquêtes, voire freiné les poursuites.
« Les changements organisationnels au sein de la police, en particulier la dissolution de l’ancienne Agence nationale de lutte contre la criminalité et la création de l’Office de lutte contre la criminalité organisée, ainsi que le départ d’un certain nombre d’enquêteurs expérimentés et professionnellement compétents, ont eu un impact négatif sur le déroulement des enquêtes individuelles l’année dernière, en particulier sur la durée des enquêtes », a détaillé Juraj Novocký.
La Commission européenne s’est inquiétée du fait que les réformes mises en œuvre par le gouvernement de Robert Fico en Slovaquie pourraient mettre en péril ses intérêts financiers. Sous la menace d’un gel des financements européens, le gouvernement slovaque a dû modifier l’amendement à plusieurs reprises.
D’après Juraj Novocký, le résultat est que le Parquet européen (EPPO) peut mener ses activités en Slovaquie de la manière la plus large possible, comparable à celle des autres États participants. « D’un autre côté, suite aux changements législatifs, nous avons dû interrompre les poursuites dans des cas individuels en raison de la prescription, en particulier dans les cas de corruption », a nuancé le procureur européen slovaque.
Ce dernier a fait part de ses réactions à l’occasion de la publication du rapport annuel 2024 du Parquet européen. Les chiffres pour la Slovaquie révèlent 98 enquêtes actives et 11 qui se sont terminées par un acte d’accusation, un non-lieu, un renvoi ou une procédure simplifiée.
Le bureau slovaque de l’EPPO compte six procureurs délégués européens, des effectifs insuffisants aux yeux de Juraj Novocký. Sans compter que l’unité ne compte aucun enquêteur spécialisé.
« Il est nécessaire de stabiliser la composition du personnel des organes spécialisés du corps de police dès que possible, ce qui aura également un impact positif sur le déroulement et les résultats des procédures pénales », a argumenté Juraj Novocký.
Dans une déclaration adressée à Euractiv Slovaquie, le ministère slovaque de l’Intérieur défend les changements, affirmant qu’ils ont été faits « en vue d’une utilisation économique et efficace des fonds publics ».
« L’objectif était de rendre la gestion plus efficace, ce qui s’est traduit par une réduction du nombre de personnels de gestion », justifie le service de presse du ministère.
En octobre, la Commission a donné son feu vert à un paiement de 800 millions d’euros à la Slovaquie au titre du Fonds de relance, finalement retardé en raison de problèmes liés à l’État de droit.
Alors que le porte-parole de la Commission a expliqué que les amendements adoptés par le gouvernement slovaque « atténuaient en partie » certaines de ses préoccupations, il a admis qu’une clarification était nécessaire sur les questions « en suspens ». Cependant, Robert Fico a présenté cela comme une victoire claire au sujet de ce qu’il considère comme une critique biaisée de son gouvernement.