Entre 2022 et 2025, la France, la Belgique, l’Espagne et les Pays-Bas ont acheté du gaz naturel liquéfié (GNL) russe pour une valeur de 34,3 milliards d’euros, soit bien davantage que les 21,2 milliards d’euros qu’ils ont collectivement alloués à l’Ukraine au cours de la même période. Ces chiffres proviennent d’une étude publiée le 30 septembre par Greenpeace.
Revenus énergétiques et financement de la guerre
Les recettes issues des exportations de pétrole et de gaz demeurent une ressource essentielle pour le budget russe. Selon Greenpeace, la société « Yamal LNG », principal fournisseur de GNL russe vers l’Europe, a généré entre 2022 et 2024 près de 40 milliards de dollars de revenus, dont environ 9,5 milliards de dollars d’impôts versés au budget russe. Des montants qui, théoriquement, pourraient financer des millions d’obus d’artillerie ou des milliers de chars T-90M, alimentant ainsi la capacité militaire de Moscou.
En 2024, les pays de l’UE ont importé un volume record de GNL russe, atteignant 22 milliards de m³, soit une hausse de 19 % par rapport à 2023. La part de la Russie sur le marché européen du GNL a alors dépassé 20 %, renforçant encore son poids énergétique malgré l’effondrement des exportations de Gazprom par gazoducs.
Pressions politiques et nouvelles sanctions
Sous la pression croissante, notamment du président américain Donald Trump qui a accusé les Européens de financer la guerre en Ukraine, la Commission européenne a adopté en septembre un 19e paquet de sanctions contre la Russie. Celui-ci inclut l’interdiction d’importer du GNL russe à partir de janvier 2027, un délai avancé par rapport aux prévisions initiales. Les discussions portent également sur de possibles mesures ciblant les navires transportant du GNL russe et l’entreprise « Novatek », afin de réduire plus directement les recettes énergétiques de Moscou.
La question de la dépendance énergétique
Le rapport de Greenpeace souligne également un risque de dépendance excessive envers les États-Unis, principaux fournisseurs alternatifs de GNL. Mais les experts rappellent que la Norvège reste le plus grand exportateur de gaz vers l’Europe et qu’elle n’a jamais utilisé l’énergie comme outil de pression. Par ailleurs, les États-Unis, en tant qu’alliés stratégiques, présentent des risques bien moindres que la Russie. Enfin, l’UE continue de diversifier ses sources, en investissant dans des terminaux capables d’accueillir du GNL provenant non seulement des États-Unis, mais aussi du Qatar, d’Australie et d’autres producteurs.
Perspectives pour le marché mondial du GNL
Le marché du GNL devrait connaître une expansion majeure entre 2026 et 2027, avec l’ouverture de nouvelles capacités aux États-Unis, au Qatar et en Australie. Cette augmentation de l’offre globale permettra à l’Europe d’accéder à une palette plus large de fournisseurs et de réduire son exposition à des dépendances uniques. Dans ce contexte, le Qatar est appelé à devenir un acteur clé pour compléter les volumes destinés au continent.
Parallèlement, la Chine pourrait réduire ses importations de GNL en provenance des États-Unis et d’Australie, en raison de tensions politiques croissantes. Cela pourrait libérer des volumes supplémentaires qui seraient redirigés vers l’Europe, renforçant encore la position du continent dans un marché de plus en plus concurrentiel.