Une frappe israélienne a touché lundi le village d’Aïto situé dans le nord du Liban et jusque-là épargné. Une famille de déplacés du sud du pays y était accueillie.
Les obsèques des victimes de la frappe israélienne d’Aïto ont eu lieu mercredi 16 octobre dans le nord du Liban. Lundi, l’Etat hébreu a visé une maison de ce village chrétien faisant 22 morts dont douze femmes et deux enfants. L’ONU a réclamé une enquête « rapide, indépendante et approfondie » sur ce raid inédit, loin des fiefs identifiés du Hezbollah chiite libanais. Un choc pour les habitants de cette région chrétienne jusqu’ici préservée des bombardements.
D’une maison de deux étages, à flanc de colline, il ne reste que des gravats. Ici, une chaussure orpheline, là des livres de coloriages ou des vêtements projetés jusque dans les arbres… Et au centre un cratère qui révèle le lieu de l’impact. « Le bruit était très fort, j’ai entendu un ‘boum’, ça a fait un grand choc », témoigne Dany Alwan, 44 ans, le voisin.
« La maison s’est effondrée, c’était terrifiant. Il y avait beaucoup de poussière. J’ai vu un cadavre ici, un cadavre là-bas, plein de gens au sol…, poursuit le villageois. Il restait une petite fille, un bébé, qu’on a retrouvé le lendemain. Elle avait été projetée dans ce pick-up. Il reste des morceaux de cadavres sous les décombres. »
La solidarité, malgré tout
Les traits tirés, le visage fermé, Dany confirme que 28 déplacés chiites du sud du Liban occupaient la maison depuis deux semaines. D’autres ont quitté le village après la frappe. Certaines familles dans le village, leur ont demandé de partir. Et les villageois ont décidé de ne plus accueillir de nouveaux déplacés.
Charlotte Saadé, la mère de Dany a été blessée chez elle, par le souffle de l’explosion. La septuagénaire témoigne depuis son lit d’hôpital : « C’étaient des gens très bien. Ils restaient discrets. Il y avait des femmes âgées de 90 ans. Et aussi des enfants en bas âge… Ça fait mal au cœur. On n’est pas les seuls à avoir accueilli des gens chez nous. Il n’y a pas un village ici où il n’y a pas de déplacés. Si tu vois un accident de la route, tu ne vas pas aider les blessés ? »
La maison appartient à Elie, l’autre fils de Charlotte. Il l’a louée à la demande d’un ami cherchant refuge pour ses proches. « Il m’a appelé pour me dire que sa famille était à la rue, que leurs maisons étaient détruites, qu’ils fuyaient les bombardements de leur village, raconte Elie. Ici nous sommes en sécurité. Humainement, je ne pouvais pas leur dire non ». Et il assure que ces déplacés n’étaient pas proches du Hezbollah : « Pas du tout ! Leur travail, leur maison et leur famille…, c’est leurs seules préoccupations. »
Si c’était à refaire Elie, le chrétien, ouvrirait tout de même sa porte aux déplacés musulmans : « Nous, les Libanais, personne ne nous divisera. Ni par la religion, ni par la politique. »