
Dans un environnement marqué par des marges serrées et une progression organique atone, Nestlé annonce une des plus grandes restructurations de sa décennie, visant à supprimer 16 000 postes d’ici fin 2027, dont 12 000 dans les bureaux. Ce plan, dévoilé depuis Vevey lors de la publication des résultats trimestriels, a pour objectif de moderniser un système devenu trop lourd face à la digitalisation croissante et aux changements des habitudes de consommation. Pour la direction, cette démarche constitue une étape « difficile mais nécessaire » pour « adapter Nestlé à un monde qui évolue », rapporte TopTribune.
Un plan global pour optimiser les fonctions support
La majorité des suppressions de postes se concentrera sur les services tertiaires, tant au siège que dans les filiales : finances, marketing, ressources humaines, informatique et services administratifs. En effet, 12 000 postes de “cols blancs” seront concernés, représentant ainsi trois quarts des suppressions annoncées. Les 4 000 postes restants toucheront des secteurs industriels et logistiques, intégrés dans des programmes d’efficacité manufacturière.
Cette décision de Nestlé se justifie par le besoin de simplifier la hiérarchie et de promouvoir une meilleure synergie entre les marchés. Une centralisation accrue, accompagnée de la digitalisation des processus et de l’automatisation d’un certain nombre de tâches, vise à générer jusqu’à 1 milliard de francs suisses d’économies annuelles à terme. Les négociations sociales débuteront prochainement dans chaque pays, au cours du premier trimestre de 2026.
Un nouveau cap sous la direction de Philipp Navratil
Depuis sa nomination en septembre dernier, Philipp Navratil fait adopter une nouvelle dynamique à l’entreprise. Sa priorité est de réduire les coûts fixes pour réinjecter des fonds dans les secteurs les plus rentables, tels que le café, la nutrition infantile et la santé. « Le monde Change et Nestlé doit s’adapter plus rapidement », a-t-il déclaré à BFM Business. L’objectif d’économies est désormais fixé entre 2,5 et 3 milliards de francs suisses d’ici fin 2027.
Les résultats trimestriels ont révélé une augmentation organique de 3,3 % malgré une baisse de 1,9 % du chiffre d’affaires publié, s’établissant à 65,9 milliards CHF. Ce contraste souligne qu’il y a encore une efficience sur les volumes, bien que l’entreprise subisse les effets des fluctuations monétaires et un retour à la normalité après l’inflation. Pour les analystes, ce message est clair : Navratil s’efforce de « reprendre le contrôle » de la rentabilité, en rationalisant les structures avant de redynamiser la croissance.
Performance financière et transformation culturelle
Au-delà des données financières, cette réorganisation indique un changement incontournable de culture. Les années de croissance par le biais d’acquisitions et de diversification ont rendu les circuits décisionnels plus complexes. Grâce à l’élimination de niveaux hiérarchiques intermédiaires, Nestlé vise à accroître sa vitesse d’exécution et sa flexibilité stratégique. Ce changement s’inscrit dans une tendance observée chez d’autres multinationales comme Unilever ou Danone, qui sont également confrontées à une pression sur leurs marges.
Cependant, cette mutation comporte des risques. Dans plusieurs pays européens, les syndicats expriment leur crainte face à la perte de savoir-faire interne et à un affaiblissement du dialogue social. En France, il est prévu que ce plan entraîne des externalisations ciblées au sein de la force de vente, une inquiétude déjà signalée par des représentants du personnel. À l’échelle mondiale, Nestlé affirme privilégier les mobilités internes et les départs volontaires, néanmoins, les détails concernant les compensations restent à définir.
Une stratégie de recentrage pour regagner la confiance des investisseurs
Pour les investisseurs, cette manœuvre s’inscrit dans un cycle de réallocation du capital plus large. Les économies réalisées grâce à ce plan doivent soutenir l’innovation, l’amélioration des produits nutritionnels-santé et le développement dans les boissons fonctionnelles. Nestlé table également sur une légère reprise des volumes dès 2026.
La réaction de la Bourse a été positive quant à cette stratégie, saluant une clarification de la gestion financière et le potentiel d’un retour à un flux de trésorerie libre dépassant les 10 milliards CHF d’ici 2027. Le challenge pour Navratil est de transformer un conglomérat agroalimentaire mondial en une entreprise plus agile, numérique et rentable, même si cela implique de remettre en question un modèle social longtemps vu comme un symbole de stabilité.