"Mettre l'Amérique en faillite n'est pas acceptable !" : on vous raconte le divorce entre Elon Musk et Donald Trump
"Mettre l'Amérique en faillite n'est pas acceptable !" : on vous raconte le divorce entre Elon Musk et Donald Trump

« Mettre l’Amérique en faillite n’est pas acceptable ! » : on vous raconte le divorce entre Elon Musk et Donald Trump

06.06.2025
5 min de lecture
Source

Après avoir quitté le gouvernement, l’homme le plus riche du monde s’est permis quelques piques contre le président américain, qu’il a pourtant soutenu pendant la campagne électorale.

Elon Musk et Donald Trump, à la Maison Blanche, le 30 mai 2025. (KEVIN DIETSCH / AFP)
Elon Musk et Donald Trump, à la Maison Blanche, le 30 mai 2025. (KEVIN DIETSCH / AFP)

« Elon et moi avions une bonne relation. Je ne sais pas si c’est encore le cas. » Depuis la Maison Blanche, le président américain Donald Trump s’est dit « très déçu », jeudi 5 juin, des charges formulées par le milliardaire Elon Musk, l’un des principaux soutiens financiers de sa campagne. Quelques jours plus tôt, le patron de Tesla et SpaceX avait officialisé son départ du gouvernement américain, où il était en charge de vastes coupes dans les dépenses publiques. Il a ensuite étrillé la « méga-loi » budgétaire voulue par le président républicain, qui répète à l’envi que sa « grande et belle loi » devrait révolutionner le quotidien des Américains.

Sur le réseau social X, qu’il détient, Elon Musk a ainsi affirmé qu’il ne pouvait « plus supporter » ce projet de loi « massif, scandaleux et bourré de dépenses inutiles », qu’il qualifie même d’« abomination répugnante »« Honte à ceux qui ont voté pour : vous savez que vous avez eu tort. Vous le savez », a-t-il lancé en guise de conclusion. S’il ne nomme pas Donald Trump dans son message incendiaire, Elon Musk entre tout de même pour la première fois en collision frontale avec le locataire de la Maison Blanche. 

L’escalade a culminé avec une accusation explosive : l’homme le plus riche du monde a affirmé, sans fournir de preuve, que le président républicain figurait dans les dossiers liés au financier Jeffrey Epstein. « Il est temps de lâcher la grosse bombe », a-t-il écrit sur son réseau social. De son côté, Donald Trump a menacé de couper les subventions fédérales à Tesla. En réaction, Elon Musk a brièvement annoncé l’arrêt du vaisseau spatial Dragon de SpaceX, utilisé par la Nasa pour transporter des astronautes vers la Station spatiale internationale (ISS), avant de revenir sur sa décision. Cette querelle a fait plonger l’action Tesla de plus de 14,04 % à Wall Street. Jusqu’ici proche du chef d’Etat, le magnat de la tech ne semble ainsi plus avoir envie de sauter bras en l’air derrière celui qu’il a aidé à reconquérir l’Amérique.

Une mission inefficace

Elon Musk semble surtout prendre ses distances avec la politique. En tout cas au sein du gouvernement américain. Après l’élection de Donald Trump le 5 novembre dernier, le PDG aux nombreuses casquettes s’était vu remettre celle de coresponsable du « Doge » (« Département de l’efficacité gouvernementale », en français). Donald Trump lui avait même réservé un traitement de faveur, en le nommant comme « employé spécial du gouvernement », un statut qui évite de devoir demander l’avis du Congrès comme c’est le cas pour les plus hauts responsables.

Mais après avoir déçu une partie de ses soutiens, faute de résultats à la hauteur des promesses, sans la transparence qu’il jurait de respecter, Elon Musk a progressivement débrayé au tournant du mois d’avril. De 2 000 milliards de dollars d’économies, l’ambition du Doge est passée à 1 000 milliards. « Nous avons été efficaces, mais pas autant que je l’aimerais », concédait Elon Musk fin avrilSelon ses propres données, le Département à l’efficacité gouvernementale n’a pour l’instant réalisé que 160 milliards de dollars d’économies. Ce chiffre reste contesté, car il ne prend pas en compte le coût des plans de départ, de la réembauche d’employés fédéraux mis à la porte par erreur ou encore des nombreux procès contre ces licenciements.

En tant qu' »employé spécial », Elon Musk avait une durée maximale de 130 jours à partir de sa nomination pour mener sa mission à bien. Au-delà, il aurait dû rendre des comptes aux parlementaires américains. Même s’il imaginait démanteler l’administration américaine jusqu’en juillet 2026, comme le laissait entendre un message sur X, le milliardaire a finalement annoncé le 24 mai son « retour au travail 24h/24, 7 jours sur 7″ chez X, SpaceX et surtout chez Tesla, sa marque de voitures électriques en difficulté.

La Maison Blanche « irritée »

Respectant cette date butoir, l' »employé spécial » de Donald Trump, que la presse américaine surnommait son « First Buddy » (« Premier pote » en référence à l’expression « First Lady »), a annoncé sur X son départ du Doge le 29 mai. Et c’est à ce moment que le fossé s’est creusé avec Donald Trump. Quelques désaccords avaient émergé les mois précédents, comme sur la participation ou non d’Elon Musk à une réunion ultrasensible au Pentagone sur les scénarios de guerre entre les Etats-Unis et la Chine, comme l’a rapporté The Guardian. L’homme d’affaires n’y a finalement pas été invité, selon Donald Trump, qui a évoqué un conflit d’intérêts.

Fin mai, les différences de point de vue ont pris la forme d’une opposition plus marquée. « J’ai été déçu de voir le projet de loi de dépenses massif (….) qui augmente le déficit budgétaire, au lieu de le réduire, et qui sape le travail que fait l’équipe du Doge », a ainsi lâché Elon Musk à la chaîne CBS. Des cadres de la Maison Blanche, comme le chef de cabinet adjoint Stephen Miller, ont alors été « irrités » par les manières de l’homme d’affaires, selon les informations de Reuters. D’après l’agence de presse, Elon Musk n’aurait ainsi même pas discuté de son départ avec le président des Etats-Unis.

Des partisans déroutés

Depuis cette première sortie, et son message explosif publié le lundi 3 juin sur X, Elon Musk dénigre à longueur de journée le projet de loi budgétaire, approuvé par la Chambre des représentants le 22 mai et attendu sous peu au Sénat. « Tuez le projet de loi », a-t-il encore réclamé mercredi sur son réseau social. « Mettre l’Amérique en faillite n’est pas acceptable ! », a-t-il lancé dans le même message, entre deux graphiques sur la hausse de la dette souveraine américaine. Face à lui, les proches de Donald Trump, à commencer par Stephen Miller ou encore Scott Bessent, son ministre des Finances, inondent les réseaux sociaux de messages défendant ce projet de loi. Pour sa part, le président américain s’est contenté de republier sur son compte TruthSocial le message d’au revoir d’Elon Musk datant du 29 mai, dans lequel ce dernier remercie le président.

Dans ses diatribes, Elon Musk ne se limite toutefois pas au débat sur le budget américain. Le richissime homme d’affaires, qui a dépensé plus de 270 millions de dollars selon les registres pour faire gagner Donald Trump en novembre dernier, a désormais les élus républicains dans le viseur. « En novembre prochain, nous licencierons tous les politiciens qui ont trahi le peuple américain », menace-t-il, faisant référence aux élections de mi-mandat prévues pour novembre 2026. Sur son compte X, il apporte aussi son soutien à une idée radicale : dissoudre le Congrès « dès que l’inflation dépasse 3% ». Dans les commentaires, ses partisans continuent de le soutenir, tout en égratignant de plus en plus le Parti républicain. « Je suis perdu, est-ce que nous, les MAGA [acronyme de Make America Great Again, slogan fétiche de Donald Trump] voulons de ce projet de loi ? », demande l’un de ses abonnés. La question est posée.

Dernières nouvelles

À NE PAS MANQUER