Les électeurs tchèques se rendront aux urnes les 3 et 4 octobre pour renouveler le parlement. Si ce scrutin peut sembler un événement interne, il s’inscrit dans un contexte géopolitique marqué par la guerre en Ukraine et les pressions hybrides de Moscou sur l’Union européenne et l’OTAN. Le résultat pèsera donc non seulement sur l’orientation politique de Prague, mais aussi sur la capacité de l’Europe à préserver son unité face aux ambitions russes.
Populisme et récits prorusses au cœur de la campagne
Les formations d’opposition ANO, SPD et Stačilo! s’appuient sur un discours mêlant populisme, radicalisme et éléments clairement alignés sur les intérêts du Kremlin. La stratégie du SPD de Tomio Okamura, articulée autour d’un rejet de l’immigration, d’un ton anti-européen et du projet de « Czexit », recoupe directement les priorités de Moscou. Pour le Kremlin, une sortie tchèque de l’UE constituerait une victoire symbolique et affaiblirait le régime de sanctions contre Moscou.
L’appel à un « retour à la souveraineté » porté par Okamura est perçu par ses détracteurs comme une mise en danger de la sécurité nationale, la République tchèque se retrouvant isolée sans le soutien d’une Europe unie. Dans ce contexte, les frappes de drones russes ayant récemment touché la Pologne rappellent la réalité des menaces auxquelles les pays voisins restent exposés.
Le rôle de Stačilo! et de la gauche radicale
La dirigeante de la KSČM et figure du mouvement Stačilo!, Kateřina Konečná, multiplie les déclarations contre les sanctions occidentales et prône un dialogue direct avec Moscou. Les convergences entre les positions de Stačilo! et celles du SPD – refus d’armements pour Kyiv, dénonciation des pressions européennes – nourrissent l’idée d’un front commun prorusse au sein du futur parlement. Pour de nombreux observateurs, ces positions contredisent l’expérience historique tchèque, marquée par l’invasion de 1968 et la répression de la « Prague Printemps ».
Risques de recomposition politique
Un scénario où ANO, dirigé par Andrej Babiš, s’allierait avec le SPD n’est plus exclu. Cette coalition placerait deux leaders aux origines étrangères – Babiš, Slovaque, et Okamura, d’ascendance japonaise – au sommet de la politique tchèque avec une orientation perçue comme favorable à Moscou. Si cela devait se produire, Prague pourrait devenir un maillon affaibli de l’architecture européenne de sécurité, avec des répercussions allant bien au-delà de ses frontières, jusqu’à Berlin, Paris et Bruxelles.