Conflit commercial entre les États-Unis et la Chine : tensions croissantes autour des exportations de terres rares
Les relations commerciales entre les États-Unis et la Chine traversent une nouvelle phase de tensions. Jeudi, Pékin a accusé Washington d’alimenter la panique au sujet des nouvelles restrictions sur les exportations de terres rares, suite à un avertissement du secrétaire au Trésor, Scott Bessent, qui a déclaré la veille que ces mesures pourraient inciter le monde à « découpler » de la Chine, rapporte TopTribune.
Ces échanges acerbes interviennent après que la Chine a annoncé la semaine dernière de nouvelles restrictions sur les exportations de terres rares, ce qui a déclenché une réaction alarmante à Washington. Les responsables américains ont qualifié cette initiative de « coercition » et de « prise de pouvoir », tandis que Pékin a présenté ces mesures comme faisant partie d’une stratégie défensive normale.
Cette situation met en lumière la divergence croissante entre les deux plus grandes économies mondiales, qui interprètent les mêmes événements à travers des cadres mentaux incompatibles. Pour Washington, ces restrictions apparaissent comme une manœuvre ciblée visant à militariser les chaînes d’approvisionnement et à obtenir un avantage dans les négociations en cours. Les États-Unis estiment avoir été pris au dépourvu par ces actions, tandis que pour Pékin, ces mesures étaient une réponse prévisible à la nouvelle règle des « Filiales » de septembre qui a étendu les contrôles d’exportation américains à toute entreprise mondiale dont plus de 50 % des parts sont chinoises.
Une telle approche exacerbe un climat de méfiance, déjà profondément enraciné. Pékin a mis en place un ensemble de mesures, dont la dernière en date concerne les exportations de terres rares, qui représente une réponse à une série de décisions américaines jugées comme un cadre d’endiguement économique à long terme, englobant des tarifs et des restrictions touchant divers secteurs tels que les puces AI et le logiciel de fabrication.
Les mesures récemment adoptées par la Chine, numérotées de 55 à 62, bien qu’impressionnantes sur le papier, ralentissent en réalité les exportations de terres rares sans les interdire. Ce changement impose des charges de conformité croissantes pour les entreprises américaines et chinoises, tout en provoquant des perturbations d’expéditions et une incertitude croissante sur les chaînes d’approvisionnement. Les multinationales doivent désormais naviguer entre deux régimes réglementaires incompatibles.
Dans ce contexte, Beijing conserve un certain levier en contrôlant environ 90 % des capacités de raffinage et dominant chaque étape de la chaîne d’approvisionnement des terres rares, essentielles pour les véhicules électriques, les appareils électroniques et les systèmes de défense. Cependant, certains analystes prévoient qu’à terme, en raison de l’extraction excessive et de la demande intérieure croissante, la Chine pourrait devenir un importateur net de ces minerais.
Il existe également une prise de conscience croissante en Chine que ces restrictions pourraient inciter les États-Unis et leurs alliés à reconstruire plus rapidement leurs chaînes d’approvisionnement. Des investissements significatifs sont déjà réalisés par les États-Unis, l’Australie et le Canada dans l’exploitation minière et le raffinage, tandis que le Japon et l’Union européenne développent des technologies de recyclage et de substitution.
Malgré l’importance croissante des terres rares dans l’économie mondiale, il est essentiel de reconnaître que les dommages causés par ce dernier épisode commercial ne laissent rien présager d’un retour à l’optimisme d’antan. Les deux parties gagneraient à établir des limites claires, et des mesures telles que le ralentissement de l’application des régulations américaines pourraient permettre de limiter les chocs sur l’approvisionnement.
Pour l’heure, les États-Unis et la Chine continuent de naviguer dans un environnement de rivalité, sans comprendre mutuellement leurs intentions, un phénomène qui pourrait s’avérer dangereux à long terme.