Déclin des magazines people en France : un phénomène persistant
Les magazines people français, tels que Closer, Voici et France Dimanche, subissent un effondrement des ventes qui est manifeste depuis plusieurs années. Autrefois très en vogue, ce secteur traverse aujourd’hui une crise profonde, avec des chiffres de ventes en chute libre. Entre 2021 et 2024, le tirage de l’hebdomadaire Voici est passé de près de 206 000 exemplaires à environ 145 000. Cette réduction s’explique notamment par une crise structurelle de la presse écrite, sans compter les diverses controverses entourant les célébrités et les choix difficiles auxquels sont confrontés ces médias à l’âge d’Internet, rapporte TopTribune.
Les acteurs historiques du marché, comme France Dimanche et Ici Paris, ressentent le poids de cette dégringolade. «La situation est difficile», confie Stéphanie Eschenlohr, directrice des deux publications. Leur stratégie tarifaire s’est effectivement orientée vers des augmentations progressives, tentant ainsi de compenser la baisse des ventes. En 2024, on observe que les ventes de ces deux hebdomadaires ont chuté de plus de 11%. Ironiquement, cette décadence rappelle le schéma classique de la «grandeur et décadence» que ces magazines ont l’habitude de narrer dans leurs colonnes.
Des origines à la glorification des scandales
Le parcours de France Dimanche est révélateur des évolutions du secteur. Établi dans les années 1950, le magazine a délaissé l’information générale pour se concentrer exclusivement sur les vies privées des célébrités. S’inspirant des tabloïds britanniques, il a connu un succès incroyable, avec des ventes atteignant autrefois 1,3 million d’exemplaires dans les années 1960. Ce fut l’époque de l’«alliance sacrée» entre les stars et la presse, se remémore Stéphanie Eschenlohr, qui souligne comment cette collaboration a façonné un lien unique entre les célébrités et leurs admirateurs.
Le grand public, à travers une mosaïque de nouvelles personnelles, a découvert un monde glamour mais également trivial. Yannick Duvauchelle, chercheur en sociologie, fait remarquer que cette presse répondait à une logique de commérage, nous permettant de juger le mode de vie des célébrités selon nos normes sociales. Cependant, cette phase de grâce ne pouvait perdurer face à l’émergence d’une nouvelle génération d’artistes, comme Patrick Bruel et Jean-Jacques Goldman, qui ne tolèrent plus les intrusions médiatiques.
L’accident tragique de la princesse Diana en 1997 a marqué un tournant significatif, faisant basculer l’opinion publique contre les paparazzis, considérés désormais comme les «méchants» de l’histoire. Ce virage a contribué à forger une perception négative des photographes, liés à la culture du harcèlement médiatique.
Les années de gloire des paparazzis s’effacent
Pascal Rostain, surnommé «le roi des paparazzis», se remémore la période où il excellait dans la photo volée. Pourtant, aujourd’hui, il admet que les temps ont changé. L’avènement des photographes amateurs, capables de capter des moments inédits avec leur smartphone, a fortement perturbé le modèle économique des paparazzis. Jamil Dakhlia, professeur à l’université Sorbonne-Nouvelle Paris 3, indique que certains photographes, autrefois au sommet, doivent désormais partager leur marché avec ces «snaparazzis» qui diminuent le prix des photos.
Avec l’essor des réseaux sociaux, les stars n’ont plus besoin d’intermédiaires pour partager leur quotidien. «Les réseaux sociaux sont devenus une vitrine de leur vie, où nous montrons la réalité, pas une version glamour», affirme Marion Alombert, rédactrice en chef de Voici. Cette transformation oblige les magazines à adapter leur contenu et à répondre aux nouvelles attentes de leur public. Le lectorat, en majorité féminin, est de plus en plus intéressé par les enquêtes judiciaires et les problématiques sociales qui entourent certaines célébrités.
Malgré ces efforts de réinvention, la presse people reste confrontée à l’absence de ses figures iconiques. Des personnalités comme Alain Delon et Jean-Paul Belmondo s’éteignent progressivement, laissant un vide dans l’univers médiatique, alors que la quête d’histoires de plus en plus sensationnelles se fait sentir.
Récemment, la presse à sensation a montré un penchant pour l’intrigue autour des successions plutôt que pour de nouveaux scoops. Le cas de Closer, qui a révélé l’affaire Hollande-Gayet en 2014, s’est avéré être l’une des dernières explosions retentissantes du secteur. Les analyses contemporaines des experts en communication soulignent que, pour attirer à nouveau le lecteur, il incombe à ces médias de prendre davantage de risques, tout en naviguant dans un contexte de profonde mutation.