Nouveau Premier ministre en France face aux défis de la coalition
Le 10 septembre, Sébastien Lecornu a été nommé nouveau Premier ministre de la France, alors que le pays fait face à une absence de majorité solide à l’Assemblée nationale pour voter des budgets ou des lois. Conscient de cette situation, Lecornu a promis « des ruptures » et « un changement de méthode », après les échecs de ses prédécesseurs Michel Barnier et François Bayrou, illustrant les difficultés persistantes de la culture du compromis politique en France, rapporte TopTribune.
A l’échelle européenne, la majorité des pays de l’Union prospèrent avec des gouvernements de coalition, exception faite de la Grèce et de Malte. La situation française interpelle : comment la France peut-elle évoluer vers un modèle politique plus collaboratif ? Pour le comprendre, nous avons interrogé plusieurs responsables politiques européens.
En Belgique, le rôle du « facilitateur »
Avant la nomination de Lecornu, la proposition de Gabriel Attal de nommer un « négociateur » pour trouver un accord entre les partis a été largement ignorée. Pourtant, en Belgique, un « facilitateur » joue un rôle crucial en aidant les partis à dépasser les impasses politiques. Selon l’eurodéputé belge Yvan Verougstraete, « Un ‘facilitateur’ est une personnalité neutre qui écoute, rapproche les points de vue et construit des compromis. »
« C’est un rôle de médiateur : il met autour de la table des formations parfois irréconciliables et cherche à créer un terrain d’entente. »
Yvan Verougstraete, eurodéputé belgeà TopTribune
Les Engagés, un parti participant à une coalition belge formée près de huit mois après les élections, constatent la difficulté croissante de former de telles alliances en raison de la « radicalisation des partis politiques ».
Verougstraete appelle les responsables français à « mettre de l’eau dans leur vin » et à ne pas confondre compromis et compromission, avertissant que l’hystérisation du débat mène au blocage.
En Allemagne, des campagnes électorales constructives
Exemplaire en matière de coalition, l’Allemagne est actuellement dirigée par le conservateur Friedrich Merz, en collaboration avec les sociaux-démocrates du SPD. L’eurodéputée écologiste Terry Reintke souligne l’anticipation des partis à devoir se réunir après les élections pour négocier : « Ici, aucune formation n’entrevoit de remporter la majorité absolue. »
Elle fait part de ses inquiétudes face à la menace de polarisation qui fragilise la culture du compromis, tout en affirmant qu’il n’y a pas de fatalité pour la France à cet égard.
Au Danemark, les bonnes relations entre élus
Au Danemark, l’eurodéputée Stine Bosse indique que des relations interpersonnelles de qualité favorisent le travail en commun. « Nous discutons et nous rions ensemble, même en cas de désaccords politiques. » Dans ce cadre, la négociation avec des partis opposés est une pratique courante.
« Ce ton informel et ce respect mutuel créent un terrain propice à la recherche d’un terrain d’entente. »
Stine Bosse, eurodéputée danoiseà TopTribune
Bosse conseille aux élus français d’adopter une attitude « plus ouverte » sur les compromis pour éviter des fermetures rigides face à des positions divergentes.
Au Portugal, le recours au « bien commun »
Au Portugal, Luis Montenegro a récemment pivoté vers l’extrême droite après avoir gouverné avec la gauche. Fernando Anastacio, ancien député socialiste, souligne l’importance de s’unir autour d’un « bien commun » pour surmonter des divergences politiques, suggérant que les leaders français se concentrent sur des propositions capables de créer un large consensus.
En Roumanie, une large coalition pro-européenne
Le Premier ministre roumain Ilie Bolojan dirige une coalition pro-européenne complexe, rassemblant des partis de droite et de gauche. Cristian Preda, politologue et ancien député européen, affirme qu’adapter la Constitution pourrait aider la France à changer sa culture politique, suggérant une logique proportionnelle pour favoriser le compromis.
« Cette coalition n’est pas simple à gérer, les socialistes et Renew se détestent. Ils ne s’imaginaient pas devoir travailler ensemble. »
Cristian Preda, politologueà TopTribune
Les défis politiques contemporains soulignent l’urgence d’entreprendre des réformes en profondeur pour instaurer une dynamique de collaboration et de compromis en France, essentielle à son avenir démocratique.