Les banques russes bloquent en masse les comptes des citoyens ordinaires pour lutter contre les «dropeurs»
Les banques russes bloquent en masse les comptes des citoyens ordinaires pour lutter contre les «dropeurs»

Les banques russes bloquent en masse les comptes des citoyens ordinaires pour lutter contre les «dropeurs»

30.07.2025 16:10
2 min de lecture

Fin juillet 2025, des milliers de Russes ont vu leurs comptes bancaires bloqués sans préavis, parfois pour une durée allant jusqu’à six mois. Cette vague de restrictions est liée à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi contre le «dopperstvo» — un dispositif destiné à combattre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, mais qui touche désormais aussi les simples citoyens effectuant des virements à leurs proches ou payant leurs achats en ligne.

Une loi ciblant les fraudeurs… mais pénalisant la majorité silencieuse

Signée par Vladimir Poutine fin juin, la réforme introduit des amendements à la législation sur la circulation illégale des fonds et établit des peines allant jusqu’à six ans de prison pour les «dropeurs» — ces personnes dont les comptes servent à faire transiter des fonds frauduleux. Cependant, dans la pratique, la mise en œuvre de la loi se traduit par des blocages massifs de comptes, y compris dans des cas où aucun comportement suspect n’est prouvé.

Par exemple, selon plusieurs médias russes, les raisons de blocage peuvent inclure des virements fréquents à des amis ou à des membres de la famille, des dons à des œuvres caritatives, des achats réglés par virement à un particulier lorsque le terminal ne fonctionnait pas, ou encore l’utilisation de cartes pour des transactions avec des plateformes de cryptomonnaie ou des services de paiement étrangers.

Des institutions officielles minimisent l’ampleur du phénomène

Alors que l’Agence fédérale de surveillance financière (Rosfinmonitoring) affirme que la loi n’implique pas de blocages de masse, la Banque centrale de Russie justifie les actions des banques par la nécessité de lutter contre les schémas utilisés par le marché gris. Les banques renforcent notamment les vérifications sur les clients recevant des fonds sans justification, ou transférant de l’argent à des personnes inconnues sur les réseaux sociaux.

Mais pour de nombreux Russes, ces justifications ne tiennent pas face à la réalité : des pensions, des salaires ou des économies se retrouvent inaccessibles, parfois à l’unique source de revenus d’une famille. Aucune assistance claire n’est proposée pour contester les décisions injustifiées, et l’accès à un avocat reste hors de portée pour les plus vulnérables.

Une présomption de culpabilité institutionnalisée

Contrairement au principe de présomption d’innocence reconnu internationalement, la Russie applique désormais une logique inversée dans le domaine financier : les comptes sont bloqués préventivement, en attendant les résultats d’enquêtes internes. Ainsi, des citoyens parfaitement innocents — comme une retraitée vivant seule ou un travailleur indépendant recevant des paiements en ligne — peuvent se retrouver privés de ressources pendant des mois, sans aucun recours rapide.

L’administration fiscale précise que les virements entre citoyens ne sont pas soumis à l’impôt. Néanmoins, dès lors qu’une transaction est interprétée comme le paiement d’un service ou d’un produit, l’impôt sur le revenu devient exigible. Cette ambiguïté favorise les blocages préventifs au moindre doute.

Une mesure de contrôle social sous couvert de sécurité économique

Pour de nombreux observateurs indépendants, cette législation semble davantage orientée vers la centralisation des flux financiers et le contrôle de la population que vers une réelle lutte contre la criminalité économique. Les critiques soulignent qu’en période de crise économique aiguë et de guerre prolongée, les autorités utilisent les restrictions bancaires pour capter des ressources financières internes et décourager les comportements économiques non alignés sur l’État.

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