"Le RN refuse de censurer François Bayrou après l'échec des négociations sur les retraites : analyse de la situation"

« Le RN refuse de censurer François Bayrou après l’échec des négociations sur les retraites : analyse de la situation »

26.06.2025 05:56
4 min de lecture

Marine Le Pen, opposante déterminée à l’augmentation de l’âge de la retraite à 64 ans, a décidé de ne pas porter la motion déposée par la gauche pour renverser le gouvernement. Ce choix s’explique par plusieurs raisons au sein des députés du Rassemblement national (RN), rapporte TopTribune.

Lors d’une intervention sur France Inter le 25 juin, le vice-président du RN, Sébastien Chenu, a souligné que les députés de Marine Le Pen ne soutiendraient pas la motion de censure que la gauche prévoit de soumettre après l’échec des discussions sur les retraites. Ce texte, désormais démuni de 123 voix en raison d’un manque de soutien, voit ses chances d’aboutir considérablement diminuer, nécessitant une majorité absolue pour renverser le gouvernement. Néanmoins, le RN continue d’exiger l’abrogation de la réforme d’Élisabeth Borne et le retour à un âge légal de départ à la retraite à 62 ans. Cependant, plusieurs facteurs incitent le groupe lepéniste à passer cette fois-ci son tour concernant la motion.

Pour maintenir la pression sur François Bayrou

Sébastien Chenu a explicitement déclaré : « Une censure aujourd’hui, ça n’abrogerait pas la réforme des retraites. Ce serait un coup pour rien. Nous, on se pose la question de quel est le gain pour les Français ». Cet argument illustre la démarche du RN, qui privilégie un débat budgétaire à l’automne. « On aura tellement l’occasion de censurer sur le budget qu’on peut attendre quelques semaines », a affirmé un autre député du RN.

« François Bayrou va annoncer plein d’horreurs budgétaires cet été donc ça aura plus de sens et on pourra dire à nos électeurs pourquoi on a censuré. »

Un député du Rassemblement national

à France Télévisions

Le RN espère ainsi pouvoir garder la pression sur le Premier ministre, qui doit dévoiler ses orientations budgétaires avant le 14 juillet. « Si François Bayrou est malin, et il l’est, il va présenter un budget avec quelques mesures qui vont dans notre sens. On fixera nos lignes rouges, et il en tiendra compte », a anticipé un cadre du RN.

Jordan Bardella, quant à lui, a également remis la question de la censure à une discussion ultérieure, en indiquant : « Le moment de vérité de ce gouvernement va arriver à l’occasion du vote du budget », évoquant des débats cruciaux sur des thèmes tels que l’immigration, les dépenses publiques excessives, et les économies à réaliser dans le budget de l’État. De plus, il n’a pas exclu le dépôt d’une motion de censure en rapport avec « les questions énergétiques » si le gouvernement adoptait un décret avant que le Parlement puisse proposer un texte à ce sujet.

En laissant François Bayrou surmonter la motion socialiste, Marine Le Pen espère conserver une oreille attentive de sa part, tout en évitant l’instabilité politique qu’un renversement du gouvernement pourrait engendrer. Elle est également consciente que cela pourrait empêcher ses chances de se représenter aux élections législatives anticipées, à la suite de sa condamnation à cinq ans d’inéligibilité immédiate.

Pour poursuivre sa stratégie de normalisation

Le RN semble préoccupé par l’image que pourrait renvoyer un vote visant à renverser le gouvernement à une date si proche des vacances d’été, sept mois après la chute de Michel Barnier. « On ne veut pas censurer pour censurer. Il ne faut pas qu’on passe pour les responsables du chaos politique, institutionnel, voire économique », a expliqué un cadre du parti, alors que celui-ci cherche à instaurer une stratégie de normalisation et d’institutionnalisation.

« Est-ce que les Français ont envie, à quelques jours des vacances d’été, d’une telle instabilité ? »

Gaëtan Dussausaye, député RN des Vosges

à franceinfo

Cette position peut-elle être maintenue sur le plan politique ? « Si les quatre groupes de gauche votent la censure, ça sera compliqué pour le RN d’assumer une non-censure devant leurs électeurs », a exprimé le député insoumis Eric Coquerel. Il souligne que l’électorat du RN est majoritairement en faveur de l’abrogation de la réforme d’Élisabeth Borne, comme le montre une enquête d’opinion récente.

Les sympathisants du RN, ayant un profil sociologique plus populaire, se montrent plus sensibles à la question de l’âge de départ à la retraite. « Il y a un attachement clair à des totems comme le retour aux 62 ans », a précisé François Kraus, directeur du pôle Politique et actualités à l’Ifop. Selon une étude pour BFMTV, 63% des sympathisants RN soutiennent d’ailleurs la censure après l’échec du « conclave » sur les retraites.

Pour mieux faire campagne sur le sujet en 2027

Le RN continue officiellement à faire campagne pour un retour à la retraite à 62 ans, voire 60 ans pour ceux qui ont commencé à travailler tôt. Le parti a déjà tenté, sans succès, de soumettre une abrogation de la réforme adoptée en 2023 lors de sa niche parlementaire. Depuis ce temps, il a soutenu plusieurs initiatives, y compris celles de la gauche, cherchant à revenir à l’âge de 62 ans.

Pourtant, le RN n’est pas en mesure de soutenir la motion de censure de la gauche, qui intervient alors qu’aucun accord n’a été atteint à l’issue des discussions avec les organisations syndicales. « Une censure se fait sur un texte précis du gouvernement. Là, cette motion est déposée alors qu’il n’y a rien qui est sorti du conclave », a noté un conseiller de Marine Le Pen.

« À ce jour, on ne voit pas le prétexte pour censurer. On le déciderait s’il y avait un texte qui aggrave le quotidien des Français. Or le gouvernement nous propose la continuité. »

Gaëtan Dussausaye, député RN des Vosges

à franceinfo

Face aux divergences entre le projet de réforme des retraites de la gauche et celui du RN, le député des Vosges anticipe qu’il faudra attendre 2027 pour voir une réelle réforme du système de pensions. « Aujourd’hui, il n’y a pas de majorité claire à l’Assemblée sur la façon de réformer les retraites », a-t-il observé, ajoutant que ceux qui ne voteront pas la censure ne soutiennent pas forcément la retraite à 64 ans. « On fera campagne à la présidentielle sur la retraite à 62 ans », a assuré un conseiller de Marine Le Pen. Depuis l’arrivée de François Bayrou, le RN n’a pas soutenu de motion de censure contre le gouvernement centriste, et il est probable que cette huitième motion ne fasse pas exception.

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