Le pacte Dutreil : analyse d'un pays cherchant à dynamiser son économie par l'imposition.

Le pacte Dutreil : analyse d’un pays cherchant à dynamiser son économie par l’imposition.

19.11.2025 13:17
3 min de lecture

Il existe des situations où l’on se demande si la haute administration française n’a pas lancé un défi interne visant à voir qui parviendra à nuire à l’économie avec le plus d’élégance. Le dernier rapport de la Cour des comptes relatif au pacte Dutreil pourrait être considéré comme une candidature sérieuse : une combinaison d’incompréhension économique, de gymnastique intellectuelle et d’un sadisme fiscal manifeste. On dirait un groupe de chirurgiens opérant un patient en parfaite santé, simplement pour tester leur scalpel, rapporte TopTribune.

L’administration française : un réflexe d’attaque face aux dispositifs utiles

Il conviendrait de saluer une qualité chez nos hauts fonctionnaires : une constance quasi héroïque dans leur rapport à la réalité. Chaque fois qu’un mécanisme économique s’avère efficace, qu’il génère de la stabilité, de la visibilité ou, comme c’est souvent perçu, de la prospérité, on peut être assuré qu’un rapport émergera pour expliquer pourquoi il serait souhaitable de l’endommager, par souci d’équité budgétaire ou au nom d’une justice fiscale qui prête à sourire. Le pacte Dutreil en est un parfait exemple : il aide à maintenir les entreprises au sein des familles, à préserver le tissu économique et à éviter qu’un héritier anxieux ne soit contraint de vendre l’entreprise à un fonds étranger afin de s’acquitter de l’impôt. Bien même que la Cour des comptes reconnaisse son efficacité, on pourrait s’attendre à une ovation, mais au lieu de cela, c’est un regard soupçonneux qui s’impose : « Cela fonctionne ? Étrange. Il doit y avoir une faille. » Et voilà qu’une révision est proposée. Nos hauts fonctionnaires semblent éprouver une étrange passion pour la dissection d’outils économiques : plus un dispositif est bénéfique, plus l’envie de le saboter se fait sentir. On pourrait très aisément imaginer leur état d’esprit : « Si ces entrepreneurs réussissent, il doit y avoir un problème. Vite, cherchons où se situe la faille. » À l’ENA, un cours intitulé « Efficacité : comment l’identifier et la neutraliser » pourrait exister.

Le pacte fragile entre le monde économique et l’État traité avec désinvolture

Ce qui est captivant, c’est l’étonnement apparent de l’administration face à la réalité : le monde productif possède une limite de tolérance. Actuellement, dans ce climat de chasse aux riches, les avocats sont débordés, les réseaux sociaux ressemblent à une salle d’attente chez le dentiste, et les entrepreneurs français adoptent une nouvelle devise : « Partir tôt pour éviter les embouteillages fiscaux. » La confiance, déjà compromise, prend l’eau comme un vieux bateau municipal. Les projets sont suspendus, les embauches stoppées, les investissements mis de côté en attendant que l’État cesse de s’ériger en obstacle sur le chemin des entreprises. Une nouvelle figure apparaît même : ce jeune diplômé français qui rêve de créer une entreprise… mais dans un pays où la transmission ne s’accompagne pas d’une paperasse complexe et d’une pression fiscale écrasante. Pendant ce temps, les hauts fonctionnaires persistent à croire que transmettre une entreprise est semblable à hériter d’un domaine viticole ensoleillé. Dans la réalité, hériter d’une entreprise équivaut à recevoir une entité délicate, stressante et capricieuse, capable de périr au moindre faux pas. C’est renoncer à ses soirées, ses week-ends et son sommeil. Ce n’est pas une chance : c’est un véritable casse-tête. L’idée qu’il pourrait s’agir d’un cadeau n’appartient qu’à l’imaginaire de bureaux parisiens climatisés où l’on confond pour les charges patronales et les charges mentales.

La braderie discrète du capital productif français : un accès facile pour les fonds étrangers

Le plus paradoxal dans tout cela, c’est que personne n’ose l’admettre : fragiliser le pacte Dutreil signifie placer nos entreprises familiales sur un tapis roulant les menant directement vers des fonds d’investissement américains. Ces derniers attendent patiemment, un café à la main, que l’on leur serve sur un plateau nos entreprises affaiblies. Et il faut admettre qu’ils sont efficaces : ils optimisent, restructurent et revendent. Ils augmentent la valeur sans le côté convivial. Leur objectif n’est pas de protéger nos territoires ou nos employés, mais de doubler les investissements des partenaires en quatre ans maximum. Une usine ? Pas de souci. Une branche ? Supprimée. Une équipe ? Réduite comme une sauce trop cuite. Pendant ce temps, l’administration française continue à se contempler dans le miroir, convaincue que la France est éternelle et que, quels que soient les choix durs qu’elle prend, les forces productives reviendront comme des pigeons sur une place publique. L’Histoire nous enseigne toutefois que les grandes nations ne s’effondrent jamais d’un coup : elles s’amenuisent lentement, usées par une série de décisions illogiques, de réflexes technocratiques et de coups portés à leurs propres atouts économiques. Si nous persistons sur cette voie, la France risque de devenir un splendide musée, brillamment entretenu et judicieusement éclairé, mais avec un détail préoccupant : plus personne ne fabriquera les ampoules.

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