Le départ de Jean Castex pour la SNCF ouvre une nouvelle phase de gouvernance à la RATP. En nommant Jean Bassères PDG par intérim, l’État réaffirme son contrôle sur un groupe clé de la mobilité francilienne, tout en préparant une succession à fort enjeu économique et politique, rapporte TopTribune.
Une transition placée sous le signe de la continuité
Depuis le 29 octobre 2025, la direction de la RATP connaît une nouvelle recomposition. Jean Castex, qui avait pris les commandes de la régie en novembre 2022 après avoir quitté Matignon, a été officiellement nommé président-directeur général de la SNCF pour un mandat de quatre ans. Son départ, bien que préparé en interne, intervient dans un contexte où la RATP joue un rôle essentiel dans la préparation des grands événements et des transformations à venir du réseau francilien.
Pour assurer la continuité de l’exploitation et éviter toute vacance de pouvoir, le gouvernement a désigné Jean Bassères comme PDG par intérim. Ce haut fonctionnaire, âgé de 65 ans, n’est pas un inconnu de la maison : membre du conseil d’administration de la RATP depuis mars 2024, il a dirigé Pôle emploi — devenu France Travail — entre 2011 et 2023. Son arrivée à la tête de la régie, à compter du 3 novembre 2025, symbolise le choix de la stabilité.
Jean Bassères incarne un profil d’administrateur expérimenté, capable de gérer des structures complexes et de piloter des périodes de mutation. Son expérience dans le champ public, notamment dans la modernisation des services de l’emploi et le dialogue social, correspond à ce que recherche aujourd’hui l’État : un dirigeant de transition capable de garantir la sérénité du groupe, sans infléchir pour autant ses grands équilibres internes.
La RATP, un acteur économique et politique majeur
L’importance de la RATP dépasse largement le cadre des transports. Avec plus de 70 000 salariés et près de 10 millions de trajets quotidiens en Île-de-France, l’entreprise constitue l’un des premiers employeurs publics de la région. Son budget annuel se compte en milliards d’euros, et ses activités s’étendent bien au-delà des frontières françaises, notamment via sa filiale RATP Dev, présente dans 15 pays.
La régie représente aussi un outil stratégique pour l’État. Son statut d’établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) en fait une entité hybride : soumise à des impératifs de rentabilité, mais porteuse de missions de service public. De ce fait, la désignation de son dirigeant n’est pas une simple formalité administrative, mais une décision de portée nationale, soumise à l’arbitrage du gouvernement et entérinée par décret en conseil des ministres.
Cette centralisation du processus de nomination témoigne du rôle décisif de l’État actionnaire. La RATP se trouve à l’intersection des politiques publiques de mobilité, de transition énergétique et de gestion sociale. Le futur PDG devra donc conjuguer efficacité économique, stabilité interne et sens politique, dans un environnement de plus en plus ouvert à la concurrence.
Les défis économiques d’une entreprise en mutation
La succession à la tête de la RATP s’inscrit dans un contexte économique exigeant. L’ouverture progressive à la concurrence, notamment dans les transports de surface, bouscule les équilibres historiques. À partir de 2026, plusieurs lignes de bus exploitées jusqu’ici par la RATP passeront sous gestion privée, à la suite d’appels d’offres encadrés par Île-de-France Mobilités. Ce basculement nécessite une adaptation profonde du modèle économique de l’entreprise et une redéfinition de son périmètre d’action.
Dans le même temps, la régie doit poursuivre la modernisation de ses infrastructures. L’électrification du parc de bus, la rénovation des matériels roulants du métro et le déploiement du Grand Paris Express représentent des investissements colossaux. En 2025, la RATP consacre plus de 2 milliards d’euros par an à la maintenance et au renouvellement de son réseau. La pression financière reste donc forte, d’autant plus que l’entreprise doit maintenir sa performance sans hausse significative des recettes, celles-ci dépendant en grande partie des subventions publiques et des versements d’Île-de-France Mobilités.
Dans ce cadre, la nomination d’un nouveau dirigeant revêt un enjeu économique majeur. L’État attend un profil capable d’assurer la soutenabilité financière du modèle tout en engageant la régie dans les transitions nécessaires : écologique, numérique et managériale.
Une succession aux contours encore incertains
Selon les informations confirmées par plusieurs médias, la liste des candidats à la succession de Jean Castex reste en cours d’examen. Neuf profils ont été identifiés par les services de l’État, dont sept hommes et deux femmes. Les critères retenus sont stricts : connaissance des politiques publiques, expérience dans la gestion de grandes structures parapubliques et aptitude à maintenir un dialogue social constructif dans un environnement sous tension.
La décision finale appartiendra au conseil des ministres, sur proposition du ministre des Transports, en concertation avec celui de l’Économie et des Finances. D’ici là, l’intérim de Jean Bassères doit permettre de maintenir le cap sans rupture. Pour les équipes internes, cette période est décisive : les arbitrages à venir sur les budgets d’exploitation, les négociations syndicales et la préparation du calendrier olympique pèseront lourdement sur le mandat du futur PDG.
L’État, stratège et garant de la stabilité
À travers cette transition, l’État assume pleinement son rôle d’arbitre et de stratège. En nommant un intérimaire issu de la haute fonction publique, il sécurise à court terme la direction de l’entreprise tout en se laissant le temps d’un choix mesuré pour la suite. L’enjeu dépasse le seul périmètre de la RATP : il concerne la gouvernance du service public dans un contexte de recomposition économique et réglementaire.
La nomination du futur PDG pourrait intervenir avant la fin de l’année 2025. Elle marquera alors la fin d’une période d’attente, mais aussi le début d’une nouvelle étape pour une régie en pleine transformation.
 
             
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                     
                    