La porte-parole du gouvernement a affirmé, dimanche 23 mars, n’avoir « pas de pudeur » à évoquer l’existence d’un racisme anti-blanc en France, un concept porté par la droite et l’extrême droite, mais contesté par des sociologues. « Moi, j’habite dans un endroit dans les Yvelines avec beaucoup de populations de toutes les origines. Et il est arrivé, par exemple, à ma fille au lycée de se faire traiter de ‘sale blanche’. Donc ça, c’est du racisme, vraiment à l’état pur. (…) Du racisme anti-blanc », a déclaré Sophie Primas sur le plateau du « Grand rendez-vous » de CNews/Europe 1(Nouvelle fenêtre).
« Le racisme est universel, il va vers tous les types de population, qu’elles soient d’origine étrangère, qu’elles soient françaises, qu’elles soient Blanches, qu’elles soient de je ne sais quelle origine. Le racisme, c’est la haine des autres et la haine de ceux qui sont différents », a-t-elle développé. « Par conséquent, je n’ai pas de pudeur à vous dire » que le racisme anti-blanc est une réalité, a-t-elle conclu.
Un concept contesté par les sociologues
L’existence d’une telle forme de racisme est un débat récurrent en France, où l’extrême droite, qui a théorisé le concept dans les années 1980, et la droite, affirment que le phénomène est occulté dans le pays. La majorité des sociologues considèrent toutefois qu’il est abusif de parler de racisme anti-blanc. « Il y a un écart entre ce que racontent les disciplines scientifiques et ce dont on parle dans le débat public », expliquait en 2018 le professeur de sociologie Eric Fassin. Interrogé par France Culture(Nouvelle fenêtre), il rappelait le caractère systémique du racisme subi par les personnes non blanches.
« Bien sûr, il peut y avoir des insultes, des agressions [envers les personnes blanches], mais (…) je n’entends pas de discours politique anti-blancs, je ne vois pas de discrimination à l’embauche ou au logement pour les blancs, je ne vois pas de contrôle au faciès pour les blancs », soulignait le sociologue. Donc les expériences sociales ne sont pas les mêmes pour tout le monde. »
Coauteur d’une étude évoquant la « place du racisme dans l’étude des discriminations » publiée en 2016 par l’Institut national des études démographiques, Jean-Luc Primon revenait sur cette question trois ans plus tard dans les colonnes de Libération(Nouvelle fenêtre). Il y soulignait que la population majoritaire était la moins concernée « par l’expérience du racisme », avec « seulement 15 % des personnes de cette population [qui] déclarent en avoir été la cible au cours de leur existence, contre par exemple 60 % des descendants d’immigrés d’Afrique subsaharienne, soit quatre fois moins ».
« Ce qui est vécu par les populations majoritaires et minoritaires est sans commune mesure. La dimension inégalitaire du racisme n’est pour ainsi dire jamais vécue par la population majoritaire », commentait le docteur en sociologie et maître de conférences au département de Sociologie-Ethnologie de l’Université de Nice.