"La députée Ayda Hadizadeh affirme que le peuple iranien mérite d'accéder à sa liberté"

« La députée Ayda Hadizadeh affirme que le peuple iranien mérite d’accéder à sa liberté »

19.06.2025
4 min de lecture

Elle déplore « une folie » et la perte de vies innocentes. Les tensions entre l’Iran et Israël continuent d’escalader, jeudi 19 juin, malgré les exhortations constantes de la communauté internationale pour un apaisement. La députée française Ayda Hadizadeh exprime ses craintes concernant une éventuelle intensification de la répression par le régime des Mollahs si un accord sur le programme nucléaire iranien était conclu, rapporte TopTribune.

Le ministre iranien des Affaires étrangères a annoncé sa participation à une rencontre à Genève avec ses homologues européens, tandis que des incertitudes planent sur une possible intervention militaire des États-Unis, sous l’influence de Donald Trump.

Le vendredi 13 juin, Israël a lancé une opération militaire ciblant les dirigeants du régime iranien ainsi que ses infrastructures militaires et nucléaires, entraînant des pertes humaines significatives. Les représailles iraniennes se sont soldées par la mort d’une vingtaine de civils en Israël.

Fille de réfugiés politiques, Ayda Hadizadeh a quitté l’Iran à seulement cinq ans. Après avoir œuvré au ministère de l’Éducation nationale, elle a rejoint une association dédiée à donner une voix aux plus marginalisés, notamment les enfants en placement.

Élue députée du Val d’Oise en 2024, elle est aujourd’hui la présidente du groupe d’amitié France-Iran à l’Assemblée nationale. Elle est active dans les médias français, plaidant pour un arrêt immédiat des bombardements ainsi que pour le respect du droit international.

Dans le contexte d’affrontement entre Israël et l’Iran, quel rôle joue le groupe France-Iran ?

Ayda Hadizadeh : Les groupes d’amitié ont pour but d’établir et de renforcer des relations entre deux nations. Je tiens à souligner qu’il s’agit de relations inter-étatiques, et non de gouvernement à gouvernement. Étant d’origine iranienne, j’ai toujours été choquée d’entendre le terme Iran utilisé pour désigner la République islamique. Cela fait quarante ans que la grande majorité des Iraniens sont aux mains d’un régime corrompu et oppressif qui les dédaigne, les martyrise, les tue et les affame.

J’ai donc immédiatement voulu orienter notre groupe vers l’obtention de la libération des deux otages français en Iran, Cécile Kohler et Jacques Paris, en demandant notamment que des portraits de ces derniers soient affichés sur les grilles de l’Assemblée nationale jusqu’à leur retour en sécurité.

Actuellement, je prévois d’organiser une rencontre avec des journalistes et des experts franco-iraniens pour clarifier la situation. Je compte leur demander s’ils seraient disposés à accueillir l’ambassadeur d’Iran en France pour des questions, sans faire preuve de complaisance. C’est aussi le rôle des groupes d’amitié de recevoir des représentants diplomatiques.

Que pensez-vous de la position de l’Élysée sur ce conflit ?

Bien que je sois dans l’opposition, je soutiens la clarification de la position française. Après l’attaque illégale initiée par Israël contre l’Iran, Emmanuel Macron a au départ affirmé que la France soutenait Israël. Cependant, il a ensuite rapidement prôné la négociation et la désescalade.

Il a mandaté son ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, pour explorer une solution diplomatique au conflit. Je salue cette initiative et espère qu’elle portera ses fruits. Cela dit, personne n’est dupe. Nos diplomates au Quai d’Orsay sont également conscients des défis qui se présentent. Nous devons rappeler qu’il existe une autre voie que celle du conflit et qu’il y a un droit international qui devrait s’appliquer à tous.

Avez-vous des nouvelles de votre famille qui réside à Téhéran ?

Depuis mercredi soir, il semblerait qu’Internet ait été coupé, et je n’ai pas pu vérifier si cela a été rétabli. Il existe une forme d’anxiété face à l’incertitude de la situation. Ma tante exprime une résilience, affirmant qu’elle a déjà traversé des moments plus difficiles.

Naturellement, nous évitons de partager des articles critiques sur le régime, de peur qu’ils ne mettent ma famille en danger. L’Iran est sur le qui-vive, prêt à renforcer la répression à l’encontre des Iraniens. Le régime cherche à signer un accord uniquement pour sa survie, ce qui annonce une intensification des persécutions, qualifiées de chasse aux traîtres.

Certains exilés iraniens en France considèrent cette guerre comme un mal nécessaire pour accélérer la chute d’un régime déjà affaibli. Qu’en pensez-vous ?

Il me semble inacceptable que des exilés, confortablement installés dans la démocratie française, soutiennent des bombardements sur leurs semblables pour se libérer de la dictature. Ces individus ont souvent un agenda politique et, si des Iraniens sur place expriment leur besoin de changement, c’est leur droit. La souffrance des Iraniens ne devrait jamais être utilisée comme un moyen d’atteindre une fin politique.

Chaque jour, nous, enfants de réfugiés politiques, espérons la fin de ce régime. Ma mère, par exemple, nous a appris le farsi, croyant en une éventuelle contre-révolution. Il est essentiel que le peuple iranien puisse accéder à sa liberté de plein droit.

La chute du régime iranien n’est pas une chimère ; des gouvernements réputés indestructibles se sont effondrés du jour au lendemain. Toutefois, la liberté du peuple iranien doit venir de lui-même, et nous pouvons l’encourager en soutenant sa culture. La reconnaissance de réalisateurs comme Jafar Panahi au festival de Cannes est un symbole fort de notre soutien.

Enfin, nous avons manifesté à plusieurs reprises ces deux dernières années pour le mouvement Femme, Vie, Liberté. Souhaiter des bombes sur ces individus qui luttent pour leurs droits ne peut être une solution. Nous devons soutenir tous ceux qui, en Iran, se battent pour renverser un pouvoir oppressif.

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