Un événement matinal tout sauf banal. Rachida Dati a rassemblé vendredi un groupe de partisans dans un café du 16e arrondissement de Paris. « Les Parisiens aspirent à un renouvellement, ils désirent un changement. Si nous échouons demain, ce sera de notre faute, car nous nous serons sabotés », a déclaré la candidate des Républicains devant une trentaine de militants. Cette déclaration vise à faire pression sur les partis du bloc central, qui tardent à lui fournir un appui clair pour les municipales de 2026, rapporte TopTribune. À noter que l’ex-sarkozyste, récemment nommée à la Culture en janvier 2024 par Gabriel Attal, est affaiblie par plusieurs affaires judiciaires qui pourraient nuire à son image.
Difficultés à l’Assemblée nationale
La semaine dernière, Rachida Dati a connu de vives tensions à l’Assemblée nationale. Les députés ont rapidement rejeté, dès le début des discussions, la controversée réforme de l’audiovisuel public, que la ministre de la Culture défendait avec ferveur. « C’est un revers majeur pour Rachida Dati, qui le mérite, car sa réforme était mal préparée », a commenté Emmanuel Grégoire, un député socialiste, son futur concurrent à Paris.
Cette proposition, ayant conduit à une grève à Radio France et à France Télévisions, doit être réexaminée au Sénat, mais le faible engagement des macronistes témoigne du manque de soutien dont jouit actuellement la ministre. Cette dernière est critiquée pour avoir intensifié les échanges au sein du débat. Ses récentes menaces à l’encontre de Patrick Cohen sur le plateau de France 5 ont aussi laissé des séquelles. « Même l’extrême droite n’avait pas osé cela, des attaques personnelles contre un journaliste et un buzz pour une simple défense. C’est comme du pur style Trump », confie un élu macroniste.
Des affaires judiciaires
Dans l’émission C à Vous, Rachida Dati a montré son irritation face aux questions relatives à des révélations d’un magazine d’investigation, mentionnant que la ministre aurait perçu 299 000 euros d’honoraires de GDF Suez durant son mandat de députée européenne, sans en déclarer la provenance au Parlement européen. En outre, le Parquet national financier a demandé qu’un procès pour corruption et trafic d’influence soit ouvert à son encontre dans le cadre de l’affaire Carlos Ghosn, qui a conduit à sa mise en examen depuis 2021. Ses avocats ont interjeté appel devant la Cour de cassation samedi dernier dans ce dossier. De plus, deux signalements judiciaires ont été adressés récemment à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique concernant une possible sous-évaluation de son patrimoine, une allégation qu’elle conteste fermement.
Ces controverses sont-elles en train de compromettre le rapprochement entre Dati et les macronistes pour les élections municipales à Paris ? « Je n’ai pas l’intention de soutenir Dati. On nous dit qu’elle est loyale ? Heureusement pour elle, elle a été promue par le président. Mais nous savons qu’elle pourrait nous écraser à la première occasion », se plaint un cadre de Renaissance. « Ce n’est pas ma façon de faire de la politique. Et il est probable qu’elle soit mise de côté à cause de ces affaires pendant la campagne », ajoutent-ils, rappelant les souvenirs d’une campagne de 2020 perturbée par l’affaire Griveaux. Les Jeunes avec Macron parisiens ont, dans une lettre consultée, sollicité le président de Renaissance Paris pour qu’il désigne une « incarnation » du parti présidentiel. « Au départ, beaucoup se disaient que Dati nous assurerait une victoire. Mais ses ennuis judiciaires soulèvent aujourd’hui des questions éthiques », conclut un membre des JAM.
Pierre-Yves Bournazel, candidat d’Horizons à Paris, compte bien tirer profit de la situation : « Les Parisiens méritent de ne pas revivre un face-à-face avec un passé encombrant », déclare-t-il. « Quelle est ma différence avec Rachida Dati ? C’est surtout une différence de valeurs, et je pense que notre rapport à la vérité n’est pas tout à fait identique », précise ce conseiller de Paris, épaulé par Edouard Philippe et d’autres figures de Renaissance, dont l’ancienne ministre Agnès Buzyn.
« C’est une carte maîtresse »
Le mouvement dirigé par Gabriel Attal a décidé de reporter à la rentrée sa stratégie pour les élections dans la capitale. Si Rachida Dati suscite des divisions, elle jouit également d’importants soutiens tels que Sylvain Maillard, responsable des macronistes parisiens. « Si l’on regarde les sondages, il est indéniable qu’elle est la candidate la plus solide », rétorque-t-il, quelque peu irrité par les interrogations sur ses démêlés judiciaires. Dans l’entourage de la ministre, l’une des plus en vue du gouvernement, on est persuadé que tout finira par rentrer dans l’ordre.
« Les feux passent les uns après les autres au vert », affirme un élu LR parisien, David Alphan. « Il est important de ne pas confondre caractère clivant et dynamisme. Rachida Dati n’est pas seulement un atout, mais une carte maîtresse, car elle établit un lien entre le macronisme et la droite », ajoute-t-il. Benjamin Haddad, ministre macroniste des Affaires européennes, résumait bien la perception de Dati : « C’est une guerrière », a-t-il déclaré lors de leur petit déjeuner. Personne ne doute que la « combattante » Dati continuera à mener ses combats jusqu’à la fin.