Elections européennes 2024 : intelligence artificielle, retouches photo… Les candidats peuvent-ils faire ce qu'ils veulent sur leur affiche ?
Elections européennes 2024 : intelligence artificielle, retouches photo… Les candidats peuvent-ils faire ce qu'ils veulent sur leur affiche ?

Elections européennes 2024 : intelligence artificielle, retouches photo… Les candidats peuvent-ils faire ce qu’ils veulent sur leur affiche ?

18.04.2024
3 min de lecture

La loi n’interdit pas l’utilisation de l’intelligence artificielle dans l’absolu, mais elle pourrait constituer une infraction si la justice considérait que l’électeur était induit en erreur.

A moins de deux mois des élections européennes du 9 juin, les candidats enchaînent les invitations sur les plateaux et les opérations de communication. Juliette de Causans, présidente du petit parti Europe Egalité Ecologie, a publié son affiche de campagne sur X, pour la liste Écologie au centre, vendredi 12 avril. Des internautes l’ont accusée d’avoir retouché sa photo à l’aide de l’intelligence artificielle (IA).

Juliette de Causans a assumé ces modifications auprès du journal Le Parisien« Sur cette photo, il y a des choses qui ont été enlevées, mais rien n’a été ajouté, assure-t-elle. Ça a été retouché au niveau du ventre, on a du maquillage ajouté, le grain de peau uniformisé. Mais après, les traits n’ont pas été modifiés en tant que tels, que ce soit au niveau du visage ou de la poitrine par exemple. »

La candidate justifie son acte par la volonté de porter « un message » sur l’essor des technologies et de leur place dans « notre société ». Lors des élections législatives de 2023, Juliette de Causans avait déjà retouché la photo figurant sur son affiche de campagne. Si elle assume pleinement la modification, aucune mention d’utilisation d’intelligence artificielle n’apparaît sur les affiches. 

Pas d’obligation de mentionner d’éventuelles retouches

Comme tous les éléments d’une campagne, les affiches officielles sont soumises à des règles détaillées dans le code électoral. Il est ainsi interdit d’y faire figurer le drapeau français ou les trois couleurs bleu, blanc et rouge juxtaposées, sauf si celles-ci apparaissent sur le logo du parti.

Les affiches ne peuvent être imprimées sur papier blanc que si elles contiennent des caractères ou des illustrations en couleur. Le nom du candidat, le parti ou mouvement politique et le slogan de campagne doivent impérativement apparaître sur l’affiche. La taille du support, 59,4 par 84,1 cm, est également réglementée. 

Mais aucune loi n’oblige les candidats à mentionner que l’IA a été utilisée pour modifier leur affiche de campagne. « Les mentions et le contenu des affiches ne sont pas contrôlés », assure à franceinfo Romain Rambaud, spécialiste en droit électoral. « Aucune disposition du code électoral ne prévoit de mention obligatoire devant figurer sur les affiches », ajoute-t-il. Selon la loi, les candidats peuvent donc retoucher leurs affiches librement, avec ou sans intelligence artificielle. « Il n’existe pas, à ma connaissance, d’obligation d’indiquer des retouches par Photoshop ou l’utilisation de l’IA au sens strict », note le spécialiste.

Le candidat peut être sanctionné s’il utilise l’IA pour désinformer

Dans une décision rendue le 27 octobre 2023, le Conseil constitutionnel clarifie d’ailleurs l’utilisation de photos retouchées sur le matériel électoral : celles-ci sont considérées acceptables tant qu’elles ne sont pas de nature à induire l’électeur en erreur. « La retouche excessive peut conduire à une représentation inexacte du candidat, ce qui pourrait être perçu comme trompeur par l’électorat », détaille l’avocat Antoine Chéron, interrogé par franceinfo. 

Le candidat peut également être sanctionné s’il désinforme par le biais de l’IA. « Dans le cas où l’usage de l’IA serait trompeur, il existe une infraction pénale pour les fausses nouvelles », relève Romain Rambaud. L’article L97 du code électoral punit ainsi la diffusion de fausses informations de 15 000 euros d’amende. « Il est toutefois peu probable que cela s’applique à de simples retouches concernant l’apparence physique d’un candidat, quand bien même celles-ci seraient réalisées au moyen d’une IA », prévient toutefois Antoine Chéron. Selon Romain Rambaud, il est donc « hautement improbable » que Juliette de Causans soit inquiétée par la justice. 

Pas d’obligation de faire figurer son visage

D’autres règles s’ajoutent à celles dictées par le code électoral. C’est le cas du port de l’uniforme militaire, interdit « à l’occasion de toute activité ou manifestation à caractère syndical ou politique », selon l’arrêté du 14 décembre 2007. Une règle semble-t-il oubliée par Les Républicains, qui n’ont pas hésité à présenter le général Christophe Gomart, numéro trois de leur liste pour les européennes, en tenue militaire sur les réseaux sociaux. 

Il n’y a en revanche aucune obligation à faire apparaître le visage des candidats sur une affiche, comme en témoignent celles du Parti animaliste pour les élections européennes de 2019 ou les élections législatives de 2022.

Affiche de campagne du Parti animaliste aux élections législatives, en juin 2017.

La campagne des élections européennes démarrera officiellement le 27 mai à minuit. C’est à partir de ce moment-là que seront installés les panneaux d’affichage devant les bureaux de vote et que seront donc exposées les affiches de campagnes officielles des différentes listes. 

Source: franceinfo

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