Sur les réseaux sociaux, certains mots, qui peuvent sembler innocents au premier abord, font en réalité référence à l’idéologie d’extrême droite. Cette pratique permet d’éviter des sanctions pénales, tout en favorisant la reconnaissance parmi les partisans, rapporte TopTribune.
Des termes tels que « arbres », « noix » ou encore « tout le monde le sait » ont émergé ces dernières années sur les plateformes sociales et sur des sites d’extrême droite. Ce vocabulaire alternatif offre aux utilisateurs un moyen de contourner d’éventuelles peines, mais aussi un moyen de créer des liens entre eux. Par exemple, des publications accompagnées des mots clés « vive la France » ou « patriote » utilisent souvent des expressions comme « Un endroit tranquille sans les noix et les arbres ». Daphné Deschamps, journaliste chez StreetPress, précise que ces mots codés cachent des significations racistes ; ainsi, « arbres » fait référence aux personnes arabes, tandis que « noix » désigne les personnes noires.
Cette stratégie permet aussi de déjouer les algorithmes des réseaux sociaux, car elle repose sur une légère modification des mots, tout en évitant d’exprimer ouvertement des propos susceptibles d’entraîner des poursuites judiciaires. Daphné Deschamps ajoute que ce langage doit être décodé pour bien en comprendre les implications. En effet, ce qu’on appelle un « dog whistle » consiste à envoyer des signaux subtils à ceux qui en connaissent le sens. Ces signaux agissent comme des moyens de reconnaissance entre personnes partageant les mêmes idées.
« Le but, c’est vraiment de faire des signaux de reconnaissance pour que les personnes puissent se reconnaître entre elles, savoir qu’elles sont en confiance les unes avec les autres et se comprendre. »
Daphné Deschamps, journaliste spécialiste de l’extrême droite
La technique de la communication codée n’est pas nouvelle. Des références à des événements passés ou des phrases typiques circulent dans les milieux d’extrême droite depuis de nombreuses années. Par exemple, le nombre 88, employé fréquemment dans les cercles néonazis, fait allusion à « Heil Hitler » en utilisant la position de la lettre H dans l’alphabet.
En dehors des réseaux sociaux, cette forme de langage peut également se retrouver dans des produits culturels comme la musique ou des fanzines. Par exemple, de récents détournements du terme « dragons célestes » du manga One Piece reflètent des idées antisémites, présentant ces personnages comme des représentants de la richesse et du pouvoir, caractéristiques de stéréotypes négatifs sur les Juifs.
D’autres expressions, comme « Tout le monde sait », sont employées pour toucher un auditoire plus large que celui des militants convaincus. Ce commentaire fait référence à des incidents où les personnes d’origine étrangère, notamment maghrébine, sont insinuées comme étant responsables, normalisant ainsi des idées d’extrême droite sans les exprimer ouvertement.
« Le propos raciste, on le sous-entend seulement et par là, c’est un moyen de contourner la loi aussi. »
Daphné Deschamps, journaliste spécialiste de l’extrême droite
Cette pratique prend de l’ampleur, en particulier dans le contexte des réseaux sociaux, où on assiste à une « libération de la parole » raciste et haineuse. Des événements récents, tels que ceux relayés durant la Fête de la musique, témoignent de l’usage de termes codés pour impliquer des groupes d’origine spécifique sans en avoir l’air. Ainsi, il est essentiel de comprendre que derrière ces mots se cachent des tentatives orchestrées de propagation d’idées extrêmes.
En fin de compte, cette évolution linguistique illustre les défis contemporains liés à la détection et à la lutte contre les discours de haine sur Internet, où chaque terme semble être soigneusement choisi pour parvenir à une double interprétation.