Plusieurs membres de cette instance née après le massacre terroriste du 7 octobre ont vivement critiqué la politique du Premier ministre vis-à-vis de la bande de Gaza.
Le cabinet de guerre israélien va-t-il s’effondrer ? L’organe de six membres, dont trois membres observateurs, a été lancé par Benyamin Nétanyahou après les attaques terroristes du 7 octobre. Sept mois plus tard, il n’a jamais semblé aussi divisé sur ses objectifs. Au point que Benny Gantz, rival politique du Premier ministre, a menacé de claquer la porte de l’instance si un « plan d’action » d’après-guerre n’était pas adopté dans les prochaines semaines.
Franceinfo revient sur les raisons qui fragilisent ce cabinet, au cœur de la riposte israélienne face au Hamas.
Parce que l’opposant Benny Gantz a lancé un ultimatum à Benyamin Nétanyahou
Le principal rival de Benyamin Nétanyahou, Benny Gantz, a donné trois semaines au Premier ministre pour adopter un « plan d’action » stratégique, faute de quoi il démissionnera. « Le cabinet de guerre doit formuler et approuver d’ici le 8 juin, un plan d’action permettant de réaliser six objectifs stratégiques d’importance nationale », a déclaré le chef du Parti de l’Union nationale (centre-droit) lors d’un discours télévisé, samedi.
Critique de longue date de Benyamin Nétanyahou, l’ancien ministre de la Défense lui avait déjà adressé mi-janvier une liste de douze mesures à prendre dans le conflit à Gaza. Trois mois plus tard, il souhaite « la mise en place d’une administration américano-européano-arabo-palestinienne qui gérera les affaires civiles » à Gaza « et posera les fondations d’une alternative future qui ne soit ni le Hamas, ni [Mahmoud] Abbas », président de l’Autorité palestinienne. Il a aussi appelé à une normalisation avec l’Arabie saoudite « dans le cadre plus large qui permettra une alliance entre le ‘monde libre’ et le monde arabe contre l’Iran et ses alliés ».
Benny Gantz, qui avait formé un gouvernement d’union avec Benyamin Nétanyahou, en 2020, a également appelé début avril à des élections législatives anticipées en septembre, alors que le prochain scrutin est officiellement prévu pour octobre 2026. Le Likoud de Benyamin Nétanyahou a immédiatement rejeté cet appel.
Selon une enquête du journal israélien Maariv menée en décembre 2023, si des législatives anticipées avaient lieu, Benny Gantz arriverait largement en tête (49%) face à Benyamin Nétanyahou (32%).
Parce que le ministre de la Défense a émis des réserves sur la stratégie militaire d’Israël
Benny Gantz n’est pas le seul membre du cabinet de guerre à exprimer des réserves sur la politique conduite par Benyamin Nétanyahou vis-à-vis de Gaza. Yoav Gallant, ministre de la Défense et membre du Likoud, a déjà sommé publiquement mercredi 15 mai le Premier ministre de « préparer immédiatement » une « alternative gouvernementale au Hamas » dans l’enclave palestinienne, où l’armée a intensifié ses opérations à Rafah, dans le sud. Cette bataille a été qualifiée de « décisive » par le Premier ministre.
Le ministre de la Défense a aussi dit son opposition à une administration civile ou militaire de la bande de Gaza par Israël, souhait exprimé par Benyamin Nétanyahou. En revanche, contrairement à Benny Gantz, Yoav Gallant n’a pas fixé d’ultimatum sur sa présence au sein de cet organe.
Parce que Gadi Eizenkot, ancien général, estime que Benyamin Nétanyahou ment sur ses objectifs
L’ancien général Gadi Eizenkot, membre observateur du cabinet de guerre, a plusieurs fois exposé ses divergences avec le Premier ministre. « Parler de défaite absolue [du Hamas à Gaza] est mensonger. Aujourd’hui, la vérité, c’est que les objectifs de guerre ne sont pas atteints dans la bande de Gaza », a-t-il taclé en janvier, après que Benyamin Nétanyahou avait déclaré qu’il visait une « victoire totale » d’Israël contre le Hamas. « Pour être un bon dirigeant, il faut dire la vérité à la population », a-t-il poursuivi.
En avril, Gadi Eizenkot, qui a perdu son fils et l’un de ses neveux lors de combats, a de nouveau estimé publiquement que parler d’une « victoire totale » dans la bande de Gaza était « peu judicieux », souligne The Times of Israel. « Quiconque demande une victoire totale et rapide est malavisé », a-t-il insisté.
Parce que malgré ses soutiens, la position du Premier ministre est de plus en plus fragile
Le Premier ministre n’a pas attendu pour répondre aux principales critiques, venues de son rival politique. « Les conditions posées par Benny Gantz sont des propos rabâchés dont le sens est clair : la fin de la guerre et la défaite d’Israël », a réagi Benyamin Nétanyahou dans un communiqué. Il a accusé son ministre de « chercher une excuse pour renverser le gouvernement » et vouloir « la création d’un Etat palestinien ».
En plus de Benny Gantz, le Premier ministre doit faire face à la contestation d’une partie de la société israélienne. Des milliers de personnes ont manifesté samedi pour demander des élections anticipées, une demande de nombreuses fois martelée par ses opposants ces derniers mois.
Au sein du cabinet de guerre, Benyamin Nétanyahou peut encore compter sur le soutien des deux autres membres observateurs de l’instance, Arié Dery et Ron Dermer. Le premier, chef du parti ultraorthodoxe israélien Shass, est considéré comme un homme de confiance du Premier ministre, dont il a intégré le gouvernement de coalition en décembre 2022.
Son mouvement pousse notamment pour que les ultraorthodoxes continuent de bénéficier de l’exemption militaire qui leur est accordée, ce qui occasionne également des frictions dans la coalition. Ron Dermer, lui, est un ancien ambassadeur d’Israël à Washington et a souvent pris des positions proches des conservateurs américains. Il est l’un des conseillers les plus proches de Benyamin Nétanyahou.
Source: franceinfo