Cessez-le-feu à Gaza : pourquoi la trêve entre Israël et le Hamas se fragilise, malgré les dernières libérations d'otages et de prisonniers
Cessez-le-feu à Gaza : pourquoi la trêve entre Israël et le Hamas se fragilise, malgré les dernières libérations d'otages et de prisonniers

Cessez-le-feu à Gaza : pourquoi la trêve entre Israël et le Hamas se fragilise, malgré les dernières libérations d’otages et de prisonniers

10.02.2025
5 min de lecture

Les conditions dans lesquelles se déroulent ces opérations se dégradent, a averti le Comité international de la Croix-Rouge, après la cinquième vague d’échanges d’otages israéliens et de prisonniers palestiniens.

La première phase de cessez-le-feu dans la bande de Gaza va-t-elle pouvoir arriver à son terme ? Entamée le 19 janvier et censée s’achever le 1er mars, la trêve entre le Hamas et l’Etat hébreu semble fragilisée, malgré la nouvelle libération d’otages israéliens et de prisonniers palestiniens, intervenue samedi 8 février. Les conditions dans lesquelles se déroulent ces opérations et les déclarations choc de Donald Trump sur l’avenir du territoire gazaoui sont notamment en cause, comme vous l’explique franceinfo.

Les images des trois otages israéliens libérés samedi provoquent l’émoi

Depuis les Etats-Unis, le Premier ministre israélien a lui dénoncé des « images choquantes » qui « ne resteront pas sans réponse ». Avant leur remise au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Deir el-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, les trois otages israéliens, le visage émacié et très éprouvés physiquement, ont été emmenés sur un podium orné de drapeaux du Hamas et palestinien, lors d’une mise en scène organisée par des hommes armés du mouvement islamiste palestinien. Or Levy, 34 ans, Eli Sharabi, 52 ans, et Ohad Ben Ami, 56 ans, ont été contraints de s’exprimer en hébreu devant une foule d’environ 200 personnes, canalisée derrière un cordon de combattants en armes.

Israël a condamné un « spectacle cruel » et s’est inquiété de l’apparence physique des otages relâchés. Ces images ont fait l’effet d’« une douche froide », a abondé sur franceinfo, samedi, Ruth Berdah-Canet, réalisatrice franco-insraélienne et membre du Forum des familles d’otages, dénonçant le « cirque morbide présenté par le Hamas »

L’hôpital Sheba, où ont été admis Or Levy et Eli Sharabi, près de Tel-Aviv, a confirmé que l’état de santé des deux hommes était « mauvais ». C’est la quatrième fois que cet hôpital reçoit des otages libérés de Gaza et « la situation est plus grave cette fois-ci », a déclaré à la presse la directrice de l’hôpital. L’Israélo-Allemand Ohad Ben Ami était lui en état de « détresse nutritionnelle », a assuré peu après l’hôpital Ichilov de Tel-Aviv. 

« Voilà ce à quoi ressemble un crime contre l’humanité », a dénoncé le président israélien, Isaac Herzog. Pour le Conseil d’octobre, organisation de familles de victimes du 7-Octobre, ces images « rappellent les photos des survivants de la Shoah ».

Les Palestiniens ont dénoncé des violences israéliennes avant la libération de prisonniers

Le Club des prisonniers palestiniens a accusé l’armée israélienne d’avoir agressé chez elles, dans la nuit de vendredi à samedi, des familles attendant le retour de leurs proches détenus. Interrogée par l’AFP, l’armée israélienne a simplement rétorqué que « des patrouilles d’avertissement avaient été menées [en Cisjordanie occupée] pour enlever des drapeaux du Hamas et [empêcher] des préparatifs dans la zone ».

Les autorités israéliennes ont interdit toute « fête ou procession en soutien au terrorisme », à l’occasion des ces libérations. « L’occupation [Israël] tente de priver les familles des prisonniers de la joie des libérations qu’elles attendent depuis des décennies », a dénoncé Abdallah al-Zaghari, directeur du Club des prisonniers. A Ramallah, en Cisjordanie, des soldats israéliens avaient distribué des tracts. « Nous viendrons vous trouver, à chaque célébration de libération des prisonniers, quelle qu’elle soit. Vous êtes avertis », peut-on lire en arabe.

Le Hamas a, de son côté, dénoncé le « meurtre à petit feu » des détenus palestiniens dans les prisons israéliennes, après l’hospitalisation de sept d’entre eux qui venaient d’être libérés. Sur les 183 prisonniers relâchés en échange des trois otages israéliens, 111 avaient été arrêtés après l’attaque du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023, selon des chiffres du Club des prisonniers, une ONG palestinienne dédiée aux détenus.

Depuis plus d’un an, ces organisations de défense des détenus dénoncent de mauvais traitements dans les centres de détention israéliens. Plusieurs prisonniers sont morts derrière les barreaux. « Chaque jour, nous étions battus, insultés et torturés sans raison », a affirmé auprès de l’AFP Mahmoud, un prisonnier libéré de 44 ans, à sa descente du bus qui le ramenait dans la bande de Gaza. Les autorités israéliennes affirment, elles, respecter la loi.

Les déclarations choc de Donald Trump rendent la suite du processus incertain

La première phase de l’accord prévoit la remise à Israël de 33 otages, dont huit au moins sont décédés, contre 1 900 Palestiniens. La deuxième phase, elle, est censée aboutir à la libération de tous les otages –  73 sont toujours retenus à Gaza, dont au moins 34 sont morts, selon l’armée israélienne – et à la fin définitive de la guerre, avant une étape finale dédiée à la reconstruction de Gaza. Mais la suite du processus est plus qu’incertaine, après l’annonce choc par le président américain. Donald Trump a évoqué un projet de prise de contrôle de Gaza par les Etats-Unis, afin d’en faire « la Côte d’Azur du Moyen-Orient », et d’un déplacement de sa population vers l’Egypte ou la Jordanie.

Saluant ce plan, Benyamin Nétanyahou a déclaré qu’Israël allait « faire le travail » pour l’appliquer, dans une interview diffusée samedi soir sur Fox News. Dans une autre vidéo relayée un peu plus tôt par son bureau, il a réitéré les deux principaux buts affichés de la guerre déclenchée par l’attaque du 7-Octobre : « Nous éliminerons le Hamas et ramènerons nos otages. C’est l’ordre. Et c’est ce que nous ferons. »

Fustigeant le projet de « nettoyage ethnique » de Donald Trump, Bassem Naïm, membre du bureau politique du Hamas, a observé auprès de l’AFP « un retard et un manque d’engagement dans la mise en œuvre de la première phase » de cessez-le-feu, « ainsi qu’une tentative de créer un environnement politique, diplomatique et médiatique destiné à faire pression sur les négociateurs palestiniens avant l’entrée dans la deuxième phase ». Selon ce responsable, « cela met clairement l’accord en danger et pourrait mener à son arrêt ou son effondrement ». Pour autant, le mouvement islamiste affirme ne pas souhaiter reprendre la guerre et se dit « toujours prêt » à reprendre les négociations pour la deuxième phase du cessez-le-feu.

Les négociations pour la deuxième phase du cessez-le-feu ont pris du retard

Les négociations pour la deuxième phase de la trêve devaient commencer le 27 janvier à Doha, au Qatar et ont pris du retard. Alors que l’inquiétude monte autour des prochaines étapes du cessez-le-feu, le Premier ministre israélien a finalement « ordonné », samedi, « l’envoi d’une délégation au Qatar », selon son bureau. Benyamin Nétanyahou doit également présider dimanche une réunion du cabinet de sécurité.

Après l’annonce de Donald Trump, l’Egypte a, elle, annoncé dimanche qu’elle organiserait le 27 février un sommet des pays arabes pour discuter « des derniers développements graves » liés à la question palestinienne. Le soutien du gouvernement israélien au plan du président américain « affaiblit et détruit les négociations sur un accord de cessez-le-feu et incite à une reprise des combats », a mis en garde Le Caire. Le chef de la diplomatie américaine, Marco Rubio, est attendu la semaine prochaine au Moyen-Orient.

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