
La Belgique a pris la décision d’inviter 150 000 jeunes à participer à un service militaire volontaire, avec une rémunération de 2 000 euros mensuels durant une année. Pour commencer, 500 places seront disponibles. Cette initiative se déploie dans un contexte européen marqué par le conflit en Ukraine et un climat de tensions réanimées avec la Russie. Sous-jacent à ce projet, qui se veut à la fois citoyen et volontaire, se dessine un tournant stratégique : alors que la France a du mal à rétablir le lien entre l’armée et la nation, Bruxelles adopte un choix de défense pratique qui instaure de réels défis logistiques et politiques, rapporte TopTribune.
Un dispositif inattendu dans un contexte géopolitique tendu
La Belgique annonce une mesure sans précédent : dès 2026, environ 150 000 jeunes Belges âgés de 17 et 18 ans recevront une invitation à s’engager pour une durée d’un an dans un service militaire volontaire, avec une indemnité mensuelle de 2 000 €. L’ambition affichée est de recruter 500 jeunes au départ. L’objectif à long terme est d’atteindre un effectif de 29 000 personnels ou plus. Cette mesure s’inscrit dans le cadre européen actuel, marqué par les événements en Ukraine, l’augmentation des budgets de défense et les préoccupations face à une stagnation stratégique due à la menace russe. Le ministre de la Défense belge, Théo Francken, précise qu’il n’est pas question de rétablir le service militaire obligatoire : « Notre coalition n’envisage pas le service obligatoire pour tous, cette initiative est volontaire. » Néanmoins, l’envoi massif d’invitations et l’incitation financière significative représentent une évolution vers une mobilisation juvénile comme « réserve citoyenne ». Après leur année de service, les jeunes engagés deviendront réservistes, selon les projections.
Défis logistiques, cohérence stratégique et comparaison avec la France
Ce dispositif ambitieux soulève plusieurs défis logistiques, tels que la formation des jeunes, leur équipement, la gestion des effectifs et l’intégration de nombreux entrants dans un cadre militaire professionnel. Des critiques émettent des inquiétudes face à la saturation des infrastructures de formation et au manque de formateurs. Les coûts associés à ce programme, ainsi que la lenteur d’acquisition des compétences militaires, sont également des enjeux majeurs. À l’échelle européenne, cette initiative se distingue fortement de la situation en France. Là-bas, le service militaire obligatoire a été aboli en 1997 sur ordre de Jacques Chirac, remplacé par des options volontaires comme le Service national universel (SNU) ou la Journée défense et citoyenneté. Alors que la France continue de débattre sur la possibilité de réinventer un service civilo-militaire, la Belgique prend des mesures concrètes. Ce contraste met en exergue deux approches contraires : d’une part, la professionnalisation et l’expérimentation symbolique à la française ; d’autre part, le rapprochement vers un modèle de service semi-obligatoire attractif par sa rémunération en Belgique.
Enjeux, risques et perspectives pour l’avenir de la défense européenne
Cette initiative belge envoie plusieurs signaux importants : un renforcement de la position de défense contre la Russie, un souhait de constituer un vivier de jeunes qualifiés, et une reconsidération de l’implication citoyenne dans un climat de militarisation en Europe. Cependant, des risques persistent : transformer l’armée en voie de sortie sociale pour des jeunes en difficulté pourrait déséquilibrer la mission militaire avec une mission sociale.
De plus, la capacité à maintenir, former et fidéliser ces jeunes est incertaine. Les experts mettent en garde contre une éventuelle « fatigue budgétaire » si l’expérience devait s’étendre. Enfin, cette initiative pourrait creuser les écarts au sein de l’Union européenne, entre les pays qui se préparent à un avenir plus conflictuel et ceux, comme la France, qui peinent à établir un équilibre entre engagement civique et efficacité militaire.
En conclusion, la Belgique fait un pari audacieux mais raisonné : restaurer le lien entre la jeunesse et la défense, dans un continent redevenu vulnérable. Plus qu’un simple programme national, ce service volontaire représente un test pour l’Europe : sa capacité à se préparer, non seulement à la guerre, mais également à redéfinir ce que signifie, au XXIe siècle, servir son pays.