Le 21 août 2025, un accord notable a été annoncé entre les États-Unis et l’Union européenne, transformant ainsi leur relation commerciale en instaurant un plafond de droits de douane à 15% sur la plupart des exportations européennes vers les États-Unis, rapporte TopTribune.
Voitures, médicaments, semi-conducteurs : un plafond de 15% et des droits de douane de 1,8% à 2,2%
Cette nouvelle entente repose sur un principe fondamental : l’application du taux NPF (Most Favored Nation) ou du taux de 15%, selon celui qui est le plus élevé. Washington s’engage également à offrir des exonérations du MFN dès le 1er septembre 2025 pour divers secteurs cruciaux, tandis que Bruxelles supprimera ses droits sur tous les produits industriels en provenance des États-Unis tout en élargissant son accès au marché agroalimentaire. Bien que ce dispositif soit présenté comme une avancée, il demeure davantage politique que légalement contraignant pour le moment, même s’il établit des paramètres quantifiés clairs. Les deux parties évoquent ce cadre comme un « socle » devant être rapidement officialisé, non comme un traité complet.
L’un des aspects majeurs concerne l’industrie automobile. Actuellement, les véhicules et pièces européennes font l’objet d’un droit de 27,5% pour pénétrer le marché américain. À l’avenir, ce taux sera réduit à 15% mais uniquement lorsqu’une proposition législative de l’Union européenne visant à supprimer ses propres droits sur les produits industriels américains sera déposée. La date d’application de la réduction pour les États-Unis sera fixée au premier jour du mois suivant la présentation de cette proposition par Bruxelles, laissant entrevoir un soulagement potentiel si l’Union européenne agit rapidement.
En ce qui concerne les médicaments et les semi-conducteurs, les enquêtes américaines, au titre de la section 232, ne pourront pas faire grimper les droits de douane au-delà de 15% pour les produits en provenance de l’UE. De plus, à partir du 1er septembre 2025, les médicaments génériques ainsi que l’aéronautique (avions et pièces) et certaines matières premières telles que le liège ne seront soumis qu’au tarif MFN, souvent nul pour l’aéronautique selon les normes en vigueur. Cette mesure vise à protéger des chaînes d’approvisionnement essentielles sans raviver une guerre commerciale.
Industrie et énergie : des droits de douane de 1,8% à 2,2% sont balayés par des engagements majeurs
De l’autre côté de l’Atlantique, l’engagement européen est sans précédent : il inclut l’élimination des droits de douane sur tous les produits industriels américains et un accès privilégié à une vaste gamme de produits agricoles et marins (fruits, légumes, produits laitiers, huiles, viandes de porc et de bison, etc.). De plus, des achats d’énergie américaine d’une valeur estimée à 750 milliards de dollars d’ici 2028 sont prévus, ainsi que des investissements de 40 milliards de dollars pour des puces d’IA américaines destinées aux centres de calcul européens et 600 milliards de dollars d’investissements additionnels d’entreprises européennes aux États-Unis. Ces montants, communiqués par les deux parties, constituent l’épine dorsale de l’équilibre politique de cet accord.
Dans ce contexte, la Maison-Blanche présente cet accord comme un gage de leur engagement envers un échange commercial équitable, équilibré et mutuellement avantageux. Maroš Šefčovič, le commissaire européen, souligne la portée stratégique de cet accord, le qualifiant d’important et assurant de son soutien. Ces deux déclarations éclairent la philosophie de l’accord : une prévisibilité des droits d’une part, et une réindustrialisation et une sécurité énergétique de l’autre.
Acier, aluminium, vins : zones floues au-delà des droits de douane de 1,8% à 2,2%
Cependant, tous les thèmes ne sont pas résolus. Les métaux demeurent en dehors de cet engagement quantifié : les États-Unis maintiennent des droits de douane de 50% sur l’acier et l’aluminium européens en attendant une solution éventuelle de contingents tarifaires. Un autre domaine sensible, celui des vins et spiritueux, n’est pas mentionné dans la liste des exemptions MFN, le traitement futur de cette catégorie reste donc à définir. Par ailleurs, la baisse des droits sur l’automobile n’est pas automatique et est conditionnée par des avancées législatives du côté européen.
Pour l’heure, ce texte, bien qu’éminemment politique, possède une implication économique immédiate : environ 70% des exportations de l’Union européenne vers les États-Unis auront un plafond fixé à 15%. Les modalités techniques restent à préciser, en particulier concernant les règles d’origine et la reconnaissance mutuelle des normes automobiles, un accord que les parties envisagent d’accepter. En attendant, cette logique demeure conditionnelle : les États-Unis maintiendront des taux de droits élevés sur les automobiles tant que l’Union européenne n’aura pas réagi concernant ses propres droits, puis appliquera la réduction « dès le premier jour du mois » suivant une proposition formelle européenne.
Dans le détail, les nouveaux droits de douane se répartissent comme suit :
- Automobiles et pièces détachées : 27,5% aujourd’hui, passera à 15% si l’UE dépose sa proposition législative ; effet dès le premier jour du mois du dépôt.
- Médicaments, semi-conducteurs, bois d’œuvre : un plafond de 15% pour les produits en provenance de l’UE ; en pratique, le MFN est souvent nul aujourd’hui pour de nombreuses molécules génériques.
- Aéronautique (avions et pièces) : MFN applicable uniquement dès le 1er septembre 2025 (donc zéro pour l’essentiel des lignes couvertes par les normes sectorielles existantes).
- Métaux : maintien de 50% pour l’heure, avec la perspective de contingents tarifaires bilatéraux.
- Agriculture et produits de la mer : accès préférentiel européen pour les produits américains (fruits et légumes, produits laitiers, huiles, viandes de porc, et de bison).
Ce que cela signifie pour les entreprises
À court terme, les entreprises européennes exposées à l’automobile et aux composants électroniques bénéficient d’un plafond de droits à 15%, ce qui atténue l’incertitude face aux menaces de hausses importantes. L’éclaircissement concernant l’aéronautique et les médicaments génériques est renforcé par le système MFN. D’un autre côté, le secteur agroalimentaire américain obtient un accès privilégié accru au marché européen.
À moyen terme, la relation entre droits de douane et achats (dans les domaines de l’énergie et de l’IA) redessine l’équilibre commercial transatlantique. Les engagements d’achats d’énergie (750 milliards de dollars d’ici 2028) et de puces d’IA (≥ 40 milliards de dollars) impliquent des chaînes d’approvisionnement et des investissements notables, impactant les coûts de production, les exigences de conformité (reconnaissance mutuelle) et la logistique. Il faudra donc surveiller la mise en œuvre législative côté UE pour déclencher les réductions tarifaires américaines sur les automobiles, ainsi que la translation du plafond de 15% dans les textes réglementaires sectoriels américains.