L’Allemagne se trouve à un moment décisif concernant son système de retraite, un enjeu qui mélange des préoccupations tant économiques que sociales. Avec un vieillissement de la population et un manque de main-d’œuvre qualifiée, les dépenses liées aux retraites ont augmenté de 60 % en quinze ans, atteignant l’année dernière un total de 408 milliards d’euros. Cette situation remet en question la viabilité d’un modèle de protection sociale qui a longtemps reposé sur la robustesse de l’industrie allemande, suscitant des doutes quant à son avenir, rapporte TopTribune.
Un système sous tension
Actuellement, les retraités constituent un quart de la population allemande, exerçant une pression significative sur l’ensemble de la société. Les contributions sociales ne suffisent plus à couvrir les pensions, et la tension sur l’économie s’accentue. Le chancelier Friedrich Merz a exprimé des préoccupations, déclarant que « l’État-providence tel que nous le connaissons aujourd’hui n’est plus financable ». Une réforme de ce système semble essentielle pour garantir son bon fonctionnement, tant pour les citoyens d’aujourd’hui que de demain.
Les projets du gouvernement
Un « automne des réformes » est prévu, avec plusieurs initiatives qui devraient être annoncées d’ici la fin de l’année. Parmi ces mesures, l’une d’elles vise à inciter les travailleurs seniors à poursuivre leur activité en leur offrant une exonération fiscale pouvant atteindre 2.000 euros par mois sur les salaires perçus au-delà de l’âge légal de départ à la retraite. De plus, l’âge légal de départ devrait être progressivement relevé à 67 ans d’ici 2031, contre 66 ans actuellement. En outre, une commission indépendante doit soumettre des propositions de réformes fondamentales avant 2027 pour assurer la viabilité du système.
Les seniors au travail : nécessité ou désir ?
L’année dernière, plus de 1,1 million de seniors ont continué de travailler après 67 ans, indiquant un désir marqué de rester actifs dans le monde du travail. Avec environ 46 millions de personnes en emploi, chaque contribution est précieuse. Par exemple, Pete Maie, un ancien soldat et chef logistique de 70 ans, est à la recherche d’un emploi à temps partiel à Cologne. Son objectif est de compléter sa pension de 1.600 euros mensuels tout en cherchant à se sentir utile et accompli.
De même, Rainer Guntermann, 65 ans, demeure employé à plein temps dans le secteur de l’assemblage de semi-conducteurs près de Cologne. Ces exemples témoignent de la combinaison de motivations financières et du désir de réalisation personnelle qui animent de nombreux seniors (Boursorama).
Les débats et critiques sur les réformes
Les propositions émises par le gouvernement ont suscité des réactions variées. Ruth Maria Schüler, experte en emploi des seniors, s’est montrée sceptique quant à l’efficacité de ces mesures, les qualifiant de « cadeau fiscal » destiné aux seniors les plus riches, tout en soulignant que beaucoup ne travaillent pas seulement pour des raisons économiques. De plus, ces initiatives pourraient engendrer un coût d’environ 2,8 milliards d’euros par an pour l’État.
Une autre proposition de Katherina Reiche, la ministre de l’économie, visant à repousser l’âge légal de départ à 70 ans, a également provoqué une vive controverse. Bärbel Bas, la ministre du Travail et des affaires sociales, estime qu’elle représente « une réduction pure et simple des pensions pour ceux qui ne peuvent pas atteindre cet âge », ce qui soulève des questions de justice sociale. Par ailleurs, l’économiste Johannes Geyer exhorte les entreprises à adapter les postes de travail pour mieux convenir aux seniors, de manière à ne pas désavantager ceux ayant des métiers exigeants.
Enfin, Tobias Bell de Unique Seniors a exprimé des regrets face à la persistance de la discrimination à l’égard des travailleurs seniors dans de nombreuses entreprises, déplorant que malgré leur expérience, ces derniers continuent à être écartés.
