Présidentielle américaine 2024 : l'article à lire pour tout comprendre aux enjeux de l'élection du 5 novembre
Présidentielle américaine 2024 : l'article à lire pour tout comprendre aux enjeux de l'élection du 5 novembre

Présidentielle américaine 2024 : l’article à lire pour tout comprendre aux enjeux de l’élection du 5 novembre

21.10.2024
11 min de lecture

Plus de 240 millions d’électeurs américains sont appelés aux urnes pour choisir leur 47e président, ou présidente. La démocrate Kamala Harris et le républicain Donald Trump sont au coude-à-coude dans les sondages.

Qui succédera à Joe Biden à la tête des Etats-Unis ? Les électeurs américains ont jusqu’au mardi 5 novembre, principal jour de vote dans le pays, pour désigner celui ou celle qui s’installera dans le Bureau ovale de la Maison Blanche, début 2025. Après une campagne inédite à bien des égards, l’issue du scrutin est encore très incertaine. Depuis la dernière présidentielle, organisée en novembre 2020, la méfiance règne chez les partisans du perdant, Donald Trump, qui visait un deuxième mandat et a longtemps dénoncé, sans la moindre preuve, une élection « truquée » et « volée » par le camp démocrate. Le duel entre l’ex-président républicain, qui veut prendre sa revanche, et la vice-présidente sortante, Kamala Harris, s’annonce-t-il aussi serré que le précédent ? Les programmes des deux principaux candidats sont-ils vraiment très différents ? Et pourquoi cette élection intéresse-t-elle autant le reste du monde ? Franceinfo vous explique tout.

Qui sont les deux principaux candidats ?

Ce n’est pas une surprise, l’élection présidentielle américaine se joue à nouveau entre les deux grands partis du pays. Côté démocrate, l’actuelle vice-présidente, Kamala Harris, a été désignée candidate et a accepté l’investiture à l’issue de la convention de Chicago, le 22 août. Dans la course à la Maison-Blanche, elle a repris à 59 ans le flambeau du président Joe Biden, qui lui a laissé la place le 21 juillet. Le dirigeant, âgé de 81 ans, a fini par renoncer à se représenter, après des mois de doutes, de critiques, puis de pressions jusque dans son propre camp.

Après avoir gravi les échelons du système judiciaire de la Californie, jusqu’à devenir procureure générale, elle a été élue sénatrice démocrate de cet Etat en 2016, puis s’est hissée jusqu’aux primaires de son parti en 2019, avant de figurer sur le « ticket » présidentiel de Joe Biden, élu en novembre 2020. En tant que numéro 2 de l’exécutif, elle a notamment tenté de freiner l’immigration irrégulière en stimulant l’économie des pays d’Amérique centrale. Elle a aussi œuvré à protéger le droit à l’avortement et le droit de vote à travers le pays. Pour cette élection, Kamala Harris fait campagne avec Tim Walz, 60 ans, qui est gouverneur du Minnesota.

Le débat télévisé entre le républicain Donald Trump et la démocrate Kamala Harris, sur un écran dans la ville de Washington DC, le 10 septembre 2024. (ALLISON BAILEY / AFP)
Le débat télévisé entre le républicain Donald Trump et la démocrate Kamala Harris, sur un écran dans la ville de Washington DC, le 10 septembre 2024. (ALLISON BAILEY / AFP)

Face à elle, le républicain Donald Trump, 78 ans, est de retour pour une troisième campagne nationale. Après avoir été élu président à la surprise générale en 2016 face à Hillary Clinton, puis avoir échoué en 2020 contre Joe Biden, le milliardaire porte à nouveau la bannière d’un parti qu’il domine largement. Héritier d’un empire immobilier, Donald Trump a fait fructifier la fortune familiale dans les années 1980 en investissant dans des gratte-ciel à New York. Il est ensuite devenu une figure médiatique en apparaissant dans l’émission de télé-réalité « The Apprentice ». En tant que président, Donald Trump a durci la politique migratoire, fait sauter de nombreuses normes environnementales et participé à la nomination de juges conservateurs dans les plus hautes instances du pays, menant à la révocation du droit constitutionnel à l’avortement en juin 2022. Pour l’accompagner dans cette nouvelle campagne, il a choisi comme colistier J.D. Vance, 40 ans, sénateur de l’Ohio. 

A côté de ces deux figures majeures, trois autres candidats se présentent à l’élection présidentielle au niveau national. Il s’agit de Jill Stein, 74 ans, médecin de formation soutenue par les écologistes du Green Party ; Cornel West, 71 ans, philosophe et universitaire, figure de la lutte contre le racisme aux Etats-Unis et candidat indépendant ; et Chase Oliver, 39 ans, candidat du Parti libertarien, un courant qui prône une intervention de l’Etat réduite au minimum, comme l’explique France Inter(Nouvelle fenêtre).

Comment se déroule le scrutin ?

Depuis la fin du mois de septembre, les électeurs américains peuvent voter de façon anticipée dans une majorité d’Etats. Le 5 novembre, jour surnommé « Election Day », ceux qui ne l’ont pas encore fait pourront glisser leur choix dans l’urne ou sur une machine à voter. Selon les estimations du Bipartisan Policy Center(Nouvelle fenêtre), le pays compte environ 244 millions d’électeurs potentiels. Reste à savoir s’ils seront aussi nombreux à s’inscrire sur les listes électorales et à voter qu’en 2020, où la participation avait été de 66,6% – un record depuis 1900. 

Aux Etats-Unis, la présidentielle est une élection qui se joue en un tour, au scrutin indirect. Les bulletins portent bien les noms des candidats à la présidence et à la vice-présidence, mais les citoyens votent en réalité pour des grands électeurs. Ceux-ci sont souvent des élus locaux ou des sympathisants choisis par les partis. Ce sont eux qui voteront ensuite pour leur candidat à la présidence. Chaque Etat ne dispose pas du même nombre de grands électeurs : la Californie, très peuplée, en possède 54, alors que l’Alaska n’en compte que trois. La règle dans 48 des 50 Etats américains veut que le candidat en tête du vote populaire remporte tous les grands électeurs. La victoire finale est accordée à la majorité absolue, soit au moins 270 des 538 grands électeurs du pays.

Comment s’est passée la campagne de Donald Trump ?

Donald Trump a dû revoir sa stratégie, après le retrait de Joe Biden, qu’il accusait d’être « endormi » et trop vieux pour se représenter. Face à Kamala Harris, une femme bien plus jeune que lui, aux origines indiennes et jamaïcaines, il a notamment joué la carte du sexisme et du racisme. Son slogan « Make America Great Again » (« Rendre sa grandeur à l’Amérique »), lui, n’a pas changé depuis 2016, et il s’accroche à ses thèmes fétiches : la lutte contre l’immigration, le rejet des administrations, des régulations et des normes… Un programme similaire à celui du « Projet 2025 », cette feuille de route de 900 pages rédigée par un centre de réflexion dont il assure pourtant « ne rien savoir ».

Le républicain a connu un regain de popularité après la tentative d’assassinat à laquelle il a échappé, le 13 juillet, lors d’un meeting à Butler, en Pennsylvanie. Les clichés le montrant poing levé, blessé par une balle à l’oreille, s’affichent désormais partout chez ses supporters. Le 15 septembre, il semble avoir évité un second attentat, selon le FBI, alors qu’il s’adonnait en Floride à sa grande passion : le golf.

Donald Trump Jr., le fils du candidat républicain, pose à Milwaukee (Wisconsin), le 17 juillet 2024, devant la photo de son père, le poing levé, prise après la tentative d'assassinat quatre jours plus tôt, en Pennsylvanie. (ANDREW HARNIK / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)
Donald Trump Jr., le fils du candidat républicain, pose à Milwaukee (Wisconsin), le 17 juillet 2024, devant la photo de son père, le poing levé, prise après la tentative d’assassinat quatre jours plus tôt, en Pennsylvanie. (ANDREW HARNIK / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Comme au cours de ses deux précédentes campagnes présidentielles, le milliardaire a multiplié les outrances, répandant à la télévision, en meeting et sur les réseaux sociaux des fake news sur les migrants haïtiens, prétendument mangeurs de chiens et de chats, ou sur l’aide fédérale aux sinistrés de l’ouragan Hélène, soit disant détournée des électeurs républicains au profit des étrangers en situation irrégulière. « Comparé à 2016, Donald Trump est désormais persuadé de ce qu’il raconte », juge Romuald Sciora, directeur de l’observatoire politique et géostratégique des Etats-Unis à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). Son électorat lui est « presque totalement acquis », constate l’analyste.

Ses déboires judiciaires, après qu’un jury l’a reconnu coupable au pénal dans l’affaire Stormy Daniels, en mai, ont conforté les trumpistes dans la thèse complotiste que leur champion est victime d’une persécution de la part d’un supposé « Etat profond » à la solde des démocrates. Le républicain est cependant apparu « moins motivé » durant cette campagne, selon le chercheur. « Il peine à galvaniser, il n’a plus autant de fougue dans les yeux et, à présent, c’est le vieil homme de l’élection », résume Romuald Sciora.

Comment Kamala Harris a-t-elle mené campagne ?

Face à Donald Trump, qui a officiellement annoncé sa candidature dès novembre 2022 et n’a cessé d’occuper l’espace médiatique depuis, Kamala Harris a dû mener une campagne éclair. Mais son départ a été tonitruant : en l’espace de 24 heures, elle a levé pas moins de 81 millions de dollars à l’occasion de son premier meeting.

Kamala Harris a toutefois « du mal à incarner le changement », analyse Denis Lacornespécialiste des Etats-Unis au Centre de recherches internationales de Sciences Po Paris. Son programme ressemble énormément à celui de Joe Biden. « Il n’y a pas une seule chose » qu’elle aurait faite différemment durant le mandat écoulé, a d’ailleurs admis la vice-présidente sortante sur le plateau d’ABC(Nouvelle fenêtre) le 7 octobre. 

Lors du seul et unique débat face à Donald Trump, le 10 septembre, Kamala Harris a « renversé la table » et réussi à « brillamment s’imposer », estime Denis Lacorne. « Même si ce débat n’a pas eu beaucoup d’impact sur les sondages, il a eu une grande portée symbolique », souligne l’expert. Chahutée jusque dans ses meetings(Nouvelle fenêtre) par les opposants à la guerre à Gaza, que les Etats-Unis alimentent en livrant des armes à Israël, Kamala Harris met surtout l’accent sur deux thèmes : le droit à l’avortement et le style outrancier(Nouvelle fenêtre) de Donald Trump.

Que disent les sondages ?

Les pronostics sont serrés. Les médias américains, à l’image d’ABC News(Nouvelle fenêtre), parlent du scrutin le plus incertain depuis 1876. Le plus grand fait d’armes de Kamala Harris dans cette campagne a été d’inverser la tendance du début de l’année 2024, lorsque Joe Biden était systématiquement donné perdant face à Donald Trump. Selon l’agrégateur de sondages de franceinfo, la démocrate est donnée favorite du vote populaire avec 49,9% des intentions de votes face à son rival républicain, crédité de 47,4%.

Si certains territoires semblent acquis à l’un ou l’autre des candidats, il faudra surveiller de très près la situation dans les swing states. D’après les calculs de franceinfo, ils sont au moins sept : l’Arizona, la Caroline du Nord, la Géorgie, le Michigan, le Nevada, la Pennsylvanie et le Wisconsin. Ces Etats pivots comptent suffisamment de grands électeurs et d’incertitude pour faire basculer l’élection d’un côté ou de l’autre.

Quand aura-t-on les résultats ?

Préparez des « snacks » peut-être pour quelques jours. Certes, les premiers résultats seront publiés, Etat par Etat, dans la soirée du mardi 5 novembre (soit tard dans la nuit du mardi 5 au mercredi 6 novembre dans l’Hexagone), mais il faudra les prendre avec des pincettes taille XXL. En 2020, le faible écart de voix dans certains Etats, ainsi que les pressions du camp Trump, avaient nécessité un recomptage minutieux des bulletins. Il avait alors fallu patienter quatre longs jours avant que les principaux médias du pays annoncent finalement la victoire de Joe Biden.

Est-ce la seule élection organisée à ce moment-là ?

Loin de là. En plus de l’élection présidentielle, les Américains sont appelés aux urnes le 5 novembre pour renouveler leurs 435 élus à la Chambre des représentants, ainsi que leurs sénateurs et leurs gouverneurs – mais dans certains Etats seulement. De très nombreuses élections locales se tiennent également ce jour-là. « On élit aussi des juges, des shérifs, il y a des référendums…, égrène Denis Lacorne. En Californie, le bulletin de vote fait six pages ! » Dans cet Etat de l’Ouest, les électeurs devront par exemple se prononcer sur le financement des écoles, le salaire minimum ou encore le contrôle des loyers.

Pourquoi les enjeux de cette élection dépassent-ils les frontières américaines ?

Quand la première puissance économique mondiale vote, le reste du globe retient son souffle. Cela vaut particulièrement pour l’Ukraine, en guerre pour repousser l’invasion russe depuis près de trois ans, et qui compte énormément sur Washington. Jusqu’à présent, Joe Biden et le Congrès américain ont versé des milliards de dollars d’aide militaire et humanitaire à Kiev. Mais cela pourrait changer. « Donald Trump a promis de régler le conflit ‘en 24 heures’, rappelle Romuald Sciora. On peut s’attendre à ce qu’il fasse pression sur le président ukrainien Volodymyr Zelensky pour négocier avec Moscou, dans des conditions peu favorables à l’Ukraine. » Si Kamala Harris était élue, « elle pourrait aussi pousser à des négociations, mais en limitant au maximum les pertes pour Kiev », prévient le chercheur. Le conflit pourrait très bien se retrouver gelé, « un peu comme la période 2014-2022 », après l’annexion de la Crimée et le début des combats dans l’est de l’Ukraine, avertit l’expert.

La situation au Proche et au Moyen-Orient, qui s’est embrasé depuis les attaques du 7-Octobre, est aussi suspendue à l’élection américaine, car « Donald Trump est très proche de Benyamin Nétanyahou », note Denis Lacorne. Après avoir appelé l’armée israélienne à « terminer le travail » face au Hamas dans la bande de Gaza, le républicain soutient sans réserve le Premier ministre israélien et ne propose pas de solution politique au conflit israélo-palestinien. Il suggère même à l’Etat hébreu de « frapper » les installations nucléaires iraniennes, en représailles aux attaques de missiles en provenance de l’Iran et de son allié libanais, le Hezbollah. A l’inverse, « l’équipe de Kamala Harris continue de croire à la solution à deux Etats », rappelle le chercheur. Reste que sur ces dossiers, le ou la future chef d’Etat « devra négocier avec le Congrès, ce qui ajoute de l’incertitude », souligne Denis Lacorne.

Je n’ai pas eu le temps de tout lire. Pouvez-vous me faire un résumé ?

Les Américains votent jusqu’au 5 novembre pour élire leur nouveau président. Le démocrate sortant Joe Biden ne se représente pas et soutient son actuelle vice-présidente, Kamala Harris, face à l’ex-président républicain Donald Trump. Tous deux ont de sérieuses chances de l’emporter, même si Kamala Harris est en tête des sondages. La campagne a été rythmée par les déclarations tonitruantes et fréquemment mensongères de Donald Trump, et des débats houleux sur l’immigration, le droit à l’avortement ou encore le respect des institutions américaines. Le vote s’annonce tellement serré qu’il faudra peut-être attendre plusieurs jours avant de connaître le résultat.

Le scrutin se tient dans un climat de grande tension. Donald Trump a failli être assassiné et beaucoup craignent que le milliardaire ou ses partisans ne rejettent le résultat sorti des urnes, en cas de défaite, ouvrant la porte à des actions violentes comme l’attaque du Capitole à Washington, le 6 janvier 2021. Si le républicain l’emporte, de nombreux observateurs s’attendent à un tour de vis en matière d’immigration, de droits des femmes ou d’écologie… ainsi qu’à un changement de politique internationale, qui pourrait avoir des répercussions sur les guerres en cours en Ukraine et au Proche-Orient.

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