Rachida Dati visée par une enquête pour corruption, perquisitions en cours
Les domiciles parisiens de Rachida Dati font l’objet, jeudi 18 décembre, de perquisitions menées par les policiers de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), a appris France Télévisions de source proche du dossier. Ces opérations s’inscrivent dans une série de perquisitions destinées notamment à déterminer si l’actuelle ministre de la Culture a été rémunérée par GDF Suez (devenu Engie) en 2010 et 2011, alors qu’elle était élue au Parlement européen. Elle a toujours affirmé le contraire, rapporte TopTribune.
Selon les révélations de « Complément d’enquête » et du Nouvel Obs, les enquêteurs agissent dans le cadre d’une information judiciaire ouverte le 14 octobre dernier par le Parquet national financier (PNF) pour « corruption active et passive », « trafic d’influence auprès d’une organisation internationale publique », « abus de bien social et abus de confiance », « détournement de fonds publics par une personne investie d’un mandat public » et « recel et blanchiment » de ces délits.
Les magistrats enquêtent notamment sur les activités d’avocate de Rachida Dati, une profession qu’elle a exercée en parallèle de ses mandats de députée européenne (entre 2009 et 2019). Ils la soupçonnent d’avoir été rémunérée par GDF Suez pour servir les intérêts du groupe alors qu’elle était élue au Parlement européen, ce qui est illégal. Au moment de la publication de cet article, les avocats de Rachida Dati n’avaient pas encore réagi à ces informations.
En juin dernier, « Complément d’enquête » et Le Nouvel Obs avaient révélé des documents comptables inédits qui laissaient apparaître que Rachida Dati avait perçu 299 000 euros par l’intermédiaire d’un cabinet d’avocats d’affaires auquel GDF Suez avait versé la même somme en 2010 et 2011. À la suite de ces révélations, Engie (ex-GDF Suez) a diligenté une enquête interne par le biais de son comité d’éthique. Selon les premières conclusions, les paiements de GDF Suez au cabinet d’avocats d’affaires ont été « retrouvés ». Ce sont désormais les policiers de l’OCLCIFF qui cherchent à mettre la main sur les traces matérielles de ces paiements.
Ces documents mettent à mal plus de dix ans de dénégations de Rachida Dati sur l’existence de liens financiers avec le groupe industriel gazier. Un soupçon qui poursuit la ministre de la Culture dès ses débuts au Parlement européen. À l’époque, ses nombreuses et soudaines prises de position en faveur du secteur du gaz avaient attiré l’attention des ONG et des militants écologistes, ses détracteurs la soupçonnant d’agir notamment pour le compte de GDF Suez, ce qu’elle a toujours nié. Une pré-enquête sur le sujet avait même été ouverte en 2014 à la demande de la présidence du Parlement européen, avant d’être abandonnée.
Ce sont ensuite les journalistes qui ont pris le relais. Interrogée en novembre 2014 sur un plateau de France 2, Rachida Dati martèle alors n’avoir « aucun conflit d’intérêt, sinon ça se saurait ». À deux reprises, en 2014 et 2015, face à Jean-Jacques Bourdin sur BFMTV, elle affirme que « GDF n’est pas son client ». En 2015, elle refuse cette fois de répondre à l’émission « Cash Investigation », quand Elise Lucet lui demande, dans les couloirs du Parlement, si elle a un « lien direct ou indirect avec GDF Suez ». Plus récemment, en juin dernier, la ministre de la Culture a rabroué avec force Patrick Cohen qui l’interrogeait sur les documents révélés par « Complément d’enquête » et Le Nouvel Obs sur le plateau de l’émission « C à vous ».
Rachida Dati a également été interrogée deux fois par des juges d’instruction sur ses liens présumés avec GDF Suez, en 2020 et en 2021, dans le cadre de l’affaire Renault. Face aux magistrats, elle a toujours affirmé que le géant français du gaz n’avait jamais été son client.
Selon nos informations, les magistrats du PNF enquêtent également sur les liens de Rachida Dati avec Nicolas Sarkis, un homme d’affaires à la tête d’un fonds d’investissement spécialisé dans le secteur énergétique et basé à Londres. Le Nouvel Obs a révélé, en novembre 2024, que le financier, entendu dans le cadre de l’affaire Renault, affirmait avoir versé « 100 000 euros par an à Rachida Dati entre 2010 et 2018 en tant que conseil juridique », pour un total de 900 000 euros. Interrogée par les juges d’instruction sur la nature de ses prestations pour Nicolas Sarkis, Rachida Dati avait expliqué qu’il s’agissait de prestations d’avocat dont la facturation apparaissait dans sa déclaration fiscale. Selon nos informations, une note Tracfin, le service antiblanchiment de Bercy, rédigée en février 2025, fait état de nouveaux paiements de Nicolas Sarkis et de son fonds d’investissement en 2022 et 2023, pour un montant total de 50 000 euros.
Enfin, les magistrats du Parquet national financier soupçonnent également Rachida Dati d’avoir mené des missions pour le compte du Qatar en parallèle de son mandat au Parlement européen, et qui visaient à présenter le pays de façon favorable auprès des autorités françaises, européennes ou des médias.
Ce nouvel épisode judiciaire intervient à quelques mois des élections municipales, pour lesquelles Rachida Dati est candidate à Paris. Elle sera également jugée du 16 au 28 septembre prochains, devant le tribunal correctionnel de Paris, aux côtés de Carlos Ghosn, l’ancien patron de Renault, pour « corruption » et « trafic d’influence » dans l’affaire Renault.