Les tensions s’intensifient entre le Japon et la Chine suite aux commentaires de la Première ministre
Les répercussions des commentaires de la nouvelle Première ministre japonaise, Sanae Takaichi, sur Taïwan continuent de provoquer des ondes de choc considérables. Cette controverse a éclaté lorsque Takaichi a renversé la posture de neutralité stratégique soigneusement cultivée par le Japon concernant Taïwan et a franchi une ligne rouge à Pékin, qui considère Taïwan comme une province rebelle devant être réintégrée au territoire. Elle a osé rendre explicite ce qui était implicite et a adopté une interprétation expansive de la législation sur la sécurité de 2015, autorisant le déploiement des Forces d’autodéfense du Japon à l’étranger même si le Japon n’est pas attaqué, rapporte TopTribune.
Les remarques de Takaichi ont été précédées d’une rencontre avec le représentant taïwanais en marge du sommet de l’APEC en Corée du Sud. Cela a entraîné une réprimande sévère de Pékin, rendant ses déclarations sur Taïwan particulièrement provocatrices.
Takaichi partage une relation historique avec Taïwan, ayant effectué une visite en avril, avant son accès au poste, où elle a rencontré le président taïwanais William Lai et d’autres hauts responsables. Lors de cette visite, elle a également appelé à établir une « alliance de sécurité quasi officielle » entre les démocraties partageant les mêmes valeurs dans la région indo-pacifique. Toutefois, ses récentes déclarations ont placé les diplomates japonais en mode de gestion de crise, laissant le milieu des affaires s’interroger sur sa compréhension des responsabilités liées à son rôle.
Pareillement, la réaction violente de la Chine envers Takaichi, la qualifiant de militariste belliciste, comprend des menaces inacceptables de la part du consul général chinois à Osaka, évoquant des mises en cause de violence. Cette recrudescence de la diplomatie du « loup guerrier » est contre-productive et aide le Japon à se présenter comme la victime d’un hégémon.
Ce dernier incident entre le Japon et la Chine rappelle le discours de l’ancien Premier ministre Shinzo Abe lors du Forum économique mondial à Davos en 2014, où il évoquait le risque d’un conflit involontaire. Ces remarques avaient été largement interprétées comme des provocations envers la Chine. Ce cycle de tensions s’accompagne actuellement de mesures économiques de la part de Pékin, notamment un appel à éviter les voyages au Japon et la réimposition d’un embargo sur les produits de la mer japonais. Alors que l’économie japonaise est fragile, Pékin pourrait se montrer plus strict dans ses sanctions, bien qu’il ait jusqu’à présent fait preuve de retenue.
La Chine exige que Takaichi retire ses propos, une requête qui semble impossible à accepter pour elle. Elle a déclaré le lendemain que, dorénavant, elle éviterait de commenter des contingences de sécurité hypothétiques. Pékin, furieux, souhaite insister sur l’inacceptabilité de ses remarques, rendant peu probable une issue rapide à ce blocage. Un statu quo prolongé nuira aux deux économies, mais contrairement à Takaichi, Xi Jinping n’est pas soumis aux pressions électorales.
Alors que les tensions entre le Japon et la Chine peuvent servir de distraction face aux difficultés économiques de la Chine, certains observateurs s’inquiètent de l’impact à long terme. Pékin pourrait risquer de renforcer le sentiment d’anxiété régionale, faisant craindre à ses voisins des répercussions néfastes. Les partenaires régionaux du Japon observent sans intervenir, mais ne peuvent ignorer le comportement belliqueux de la Chine.
La question qui se pose est pourquoi Takaichi a-t-elle compromis les relations bilatérales si tôt dans son mandat. Si certaines analyses évoquent la fatigue due à un sommeil insuffisant, il semblerait plus probable que ses commentaires soient le fruit d’une stratégie. La situation avec la Chine peut en effet galvaniser le soutien intérieur en vue d’un accroissement considérable des dépenses de défense, un sujet sensible pour sa base conservatrice. Elle a sans doute pensé que Pékin réagirait rapidement et que les conséquences de ses déclarations seraient limitées.
En somme, le gouvernement japonais redoute une éventuelle coopération entre Donald Trump et Xi Jinping aux dépens du Japon. Une telle dynamique, sans consultation du Japon, pourrait compromettre ses intérêts dans un Indo-Pacifique libre et ouvert, tout en mettant en lumière son influence mondiale en déclin. La récente détente entre les États-Unis et la Chine inquiète Tokyo, avec les déclarations de Trump ajoutant à ses craintes quant à une conversation d’échanges de visites prévue pour 2026. Tous ces éléments révèlent à quel point les valeurs partagées peuvent être reléguées au second plan dans le cadre des tensions sino-japonaises actuelles.