Une analyse conjointe dévoile l’ampleur des menaces hybrides
Le 28 novembre 2025, les services de sécurité allemands ont conclu que l’Allemagne est aujourd’hui l’un des principaux théâtres des opérations clandestines menées par les services russes. Selon une enquête publiée par Spiegel, le Bureau fédéral pour la protection de la Constitution (BfV) et l’Office fédéral de la police criminelle (BKA) ont compilé pendant plusieurs mois des informations sur des activités suspectes, avant de présenter une évaluation détaillée des opérations de sabotage et d’ingérence documentées dans un rapport d’ensemble publié par Spiegel. Les analystes estiment que la majorité des menaces hybrides visant Berlin — espionnage, manipulation, sabotage et campagnes de désinformation — proviennent directement de la Russie de Vladimir Poutine.
Une stratégie russe qui cible toute l’Europe
Les services allemands rappellent que la Russie a été liée ces dernières années à des explosions dans des dépôts de munitions en Europe centrale, à un financement occulte de partis d’extrême droite, à des opérations de désinformation, ainsi qu’à des tentatives d’ingérence électorale en Roumanie et en Moldavie. Des drones russes ont violé l’espace aérien de plusieurs pays, tandis que d’autres appareils non identifiés ont provoqué des perturbations dans des aéroports et au-dessus d’infrastructures militaires stratégiques. Ces actions s’ajoutent au brouillage massif des signaux GPS, à des incursions aériennes et maritimes, ainsi qu’à des actes de sabotage comme l’explosion sur un tronçon ferroviaire polonais essentiel à l’acheminement de l’aide militaire destinée à l’Ukraine.
Des intrusions aériennes préoccupantes au-dessus de sites militaires allemands
Lors d’un entretien accordé à la presse, le vice-président du service allemand de renseignement militaire, Thorsten Akmann, a indiqué qu’en octobre 2025, un nombre record de drones avait été observé au-dessus de bases de l’armée et de la marine, ainsi que d’installations accueillant des militaires ukrainiens en formation. Berlin estime désormais que ces survols constituent une menace directe pour la sécurité nationale, une inquiétude renforcée par les intrusions répétées dans l’espace aérien autour de grands aéroports allemands, contraints de suspendre temporairement leurs opérations.
Vers un durcissement du cadre législatif
Face à la multiplication des incursions, la Bavière a approuvé un projet de loi autorisant sa police à abattre les drones jugés menaçants. Le gouvernement fédéral a ensuite soutenu une réforme du droit encadrant l’usage de la force par les forces de l’ordre afin de faciliter la neutralisation de drones suspects. Le Bundestag estime désormais que des modifications de la Constitution pourraient être nécessaires pour garantir une défense plus efficace contre les appareils opérés ou dirigés par des acteurs étrangers.
Une réponse européenne en cours de préparation
Les États membres de l’Union européenne et de l’OTAN envisagent une série de mesures communes : des opérations offensives coordonnées dans le cyberespace, une attribution rapide et publique des actions hybrides imputables à Moscou, ainsi que l’organisation d’exercices militaires soudains près des frontières russes. Selon la ministre lettone des Affaires étrangères, Baiba Braže, la Russie teste en permanence les « lignes rouges » européennes. Elle appelle les États occidentaux à adopter une posture plus proactive, estimant que les déclarations ne suffisent plus. Le secrétaire d’État allemand à la Défense, Florian Hahn, avertit pour sa part que l’Europe et l’Alliance devront bientôt se demander combien de temps elles peuvent tolérer les attaques hybrides russes sans adopter une stratégie plus affirmée.
