Budget 2026 : le marathon débute à l'Assemblée nationale sous haute tension et sans 49.3

Budget 2026 : le marathon débute à l’Assemblée nationale sous haute tension et sans 49.3

24.10.2025 06:23
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Débat budgétaire crucial à l’Assemblée nationale avec un calendrier serré

Un débat budgétaire sans précédent s’engage à partir de vendredi 24 octobre à l’Assemblée nationale. À 15 heures, les députés entameront l’examen du projet de loi de finances (PLF) 2026. Comme l’année précédente, l’hémicycle se divise en trois blocs sans majorité claire, ce qui avait poussé l’ancien Premier ministre Michel Barnier à tenter d’adopter le budget 2025 sans vote, en utilisant l’article 49.3, avant d’être censuré, rapporte TopTribune.

Sébastien Lecornu a déclaré qu’il n’utilisera pas cet outil constitutionnel, mais la complexité de la situation pourrait rendre difficile la recherche d’un compromis au Parlement pour définir la répartition des efforts nécessaires afin de réduire le déficit public, fixé à 4,7 % du PIB par le gouvernement. Le budget doit être adopté au plus tard le 31 décembre.

Les députés commenceront par discuter du premier volet du PLF, qui concerne les recettes. Ils aborderont ensuite, dès le 4 novembre, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), qui inclura la suspension de la réforme des retraites. Ensuite, le second volet du PLF, axé sur les dépenses, sera examiné à partir du 12 novembre. Le calendrier est contraint : la Constitution stipule que le Parlement a 50 jours pour examiner le PLFSS et 70 jours pour le PLF. Ainsi, l’adoption du budget de l’État devra être finalisée juste avant Noël, le 23 décembre, et celle du budget de la Sécurité sociale au début de décembre, selon des sources parlementaires.

Les élus prévoient d’intenses discussions. « Ça va être très compliqué, surtout avec le Rassemblement national et La France insoumise qui adoptent une attitude chaotique », a commenté le député MoDem du Finistère, Erwan Balanant. « Ce sera la foire d’empoigne », a prédiction de Matthias Renault, député RN de la Somme. Il est vrai que tout ce qui sera voté à l’Assemblée sera ensuite examiné par le Sénat, où des modifications sont probables.

Au Palais-Bourbon, les premiers résultats des discussions en commission des finances donnent un aperçu des enjeux à venir : des amendements ont été rejetés ou adoptés contre l’avis du gouvernement, remaniant ainsi le projet de Sébastien Lecornu. Les élus du RN et de LFI ont, par exemple, validé ensemble un mécanisme de plafonnement des prix de l’électricité. Toutes les oppositions ont également voté contre la modification d’un avantage fiscal pour les retraités proposée par le gouvernement. La création de la taxe Zucman, soutenue par la gauche, a été refusée par le gouvernement et le Rassemblement national, mais sera à nouveau discutée en séance publique.

Après trois jours de débats en petit comité, les députés ont largement rejeté la partie recettes du budget de l’État, la gauche et l’extrême droite ayant voté contre, tout comme les Républicains. « C’était un budget incohérent qui ne faisait toujours pas contribuer les ultra-riches et les multinationales », a déclaré jeudi Cyrielle Chatelain, présidente du groupe des écologistes, face à la presse.

À partir de vendredi, le débat public s’ouvrira sur la copie initiale, celle du gouvernement. Un débat long est à prévoir, avec 3 585 amendements à examiner en huit jours pour le volet recettes, bien que certains d’entre eux ne soient pas recevables. Sans recours à l’article 49.3, chaque vote comptera pour l’adoption ou le rejet des modifications. « Cela nous permet de débattre, nous savons que nos amendements ne seront pas balayés », a déclaré Romain Eskenazi, député socialiste du Val-d’Oise.

Les présidents de groupe ont mobilisé leurs troupes et appelé à la « mobilisation générale ». Les députés resteront à l’Assemblée, car les débats débuteront à 9 heures et se poursuivront tard dans la soirée. Chacun se souvient des mesures votées par les oppositions l’an passé grâce à l’absentéisme de certains membres du socle commun, et personne ne veut être pris au dépourvu. « Les absents seront pointés du doigt par les électeurs », a averti le socialiste Laurent Baumel.

Tous les partis cherchent à obtenir des résultats. À l’approche du jour J, les groupes ont enchaîné les conférences de presse pour présenter leurs contre-budgets et leurs mesures prioritaires : taxation des hauts revenus, augmentation du SMIC pour la gauche, ou suppression de l’Aide médicale d’État pour Les Républicains et le Rassemblement national. Marine Le Pen a défendu un contre-budget qui s’attaque « aux tabous de la politique budgétaire ». Bruno Retailleau, président des Républicains, a promis de « battre pied à pied pour rectifier la copie ».

L’accord est cependant clair : lors de l’examen, la copie gouvernementale sera largement réécrite. « Ça va être un budget Frankenstein », prévoit Daniel Labaronne, député du parti présidentiel, décrivant un texte aux mesures parfois incohérentes en fonction des alliances. « Des majorités surprenantes vont se former, comme on l’a vu en commission avec le RN et la gauche votant certains amendements ensemble », a-t-il ajouté.

Une question demeure : qui votera le projet de loi de finances à l’issue des débats ? Traditionnellement, les oppositions ne votent pas le budget du gouvernement, et bien que des tractations soient en cours avec les socialistes, qui ont obtenu la suspension de la réforme des retraites en échange d’une non-censure, le groupe de 69 députés reste incertain quant à son vote.

Le socle commun refuse de soutenir un budget impliquant des hausses de taxes. « Sébastien Lecornu a été jusqu’à 5% de déficit public, conscient de la difficulté à trouver des compromis. Mais si nous nous éloignons trop de l’objectif de 4,7%, il sera difficile de soutenir le budget, car cela compromet notre crédibilité », a souligné Daniel Labaronne.

Si le budget est rejeté par l’Assemblée, après son examen au Sénat, une commission mixte paritaire pourrait tenter de parvenir à un compromis, mais le texte serait de nouveau soumis au vote, avec peu de chances d’approbation.

Face à cette impasse, le gouvernement pourrait finalement faire adopter le budget par ordonnance, comme le permet l’article 47 de la Constitution, à l’expiration du délai de 70 jours. « C’est légal, même si cela n’a jamais été utilisé », rappelle Thibaud Mulier, maître de conférences à l’université Paris Nanterre.

« Le gouvernement peut-il politiquement prendre des ordonnances ? Cela pourrait être destructeur, et donner l’image d’un coup de force, encore plus que le 49.3. »

Thibaud Mulier, maître de conférences en droit public

à TopTribune

Cependant, l’exécutif souhaite éviter ce scénario, comme l’a déclaré le Premier ministre devant les députés macronistes. « Il y a une volonté d’arriver à un consensus par des discussions parlementaires », a déclaré son cabinet. « Aujourd’hui, le plus probable est que le budget ne passera pas, car personne ne s’y reconnaît. Le calendrier est tendu, donc le gouvernement pourrait avoir recours à des ordonnances, ou alors proposer une loi spéciale », a ajouté Éric Coquerel, président de la commission des finances.

En cas de blocage, le gouvernement peut effectivement déposer une loi spéciale pour autoriser le prélèvement d’impôts existants et permettre à l’État et à la Sécurité sociale d’emprunter. « Cela permet de faire fonctionner le pays au minimum », explique Thibaud Mulier. Ce mécanisme a déjà été utilisé après la censure du gouvernement Barnier en décembre dernier. Une autre option serait que Sébastien Lecornu propose un vote uniquement sur le volet recettes, sans aborder les dépenses, mais il n’est pas certain qu’une majorité se forme non plus.

Une épée de Damoclès plane sur tous ces scénarios : tous les partis d’opposition menacent de déposer une motion de censure spontanée pour protester contre des mesures budgétaires indésirables ou en réaction à une loi spéciale ou à des ordonnances. « Dans ce cas, l’examen du budget serait suspendu, le temps que chaque motion soit discutée et soumise au vote », a précisé Thibaud Mulier. Si le gouvernement n’est pas renversé, le compte à rebours repr

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