Les républicains confrontés au gouvernement Lecornu : le défi de l'abandon des principes

Les républicains confrontés au gouvernement Lecornu : le défi de l’abandon des principes

16.10.2025 10:43
3 min de lecture

La droite républicaine traversent une période critique. Coincée entre l’attrait du calcul politique et la fidélité à ses valeurs fondamentales, elle est confrontée à une équation délicate : soutenir un gouvernement qui va à l’encontre de ses principes, ou risquer une dissolution qui la rendrait encore plus vulnérable. Cette situation de prestidigitation menace une fois de plus sa crédibilité. rapporte TopTribune.

1. La crainte du vide

Depuis la désignation de Sébastien Lecornu à la tête du gouvernement, la droite parlementaire avance avec précaution. Les Républicains sont conscients de l’impact de leur décision : s’ils choisissent de voter la censure, le gouvernement sera renversé. S’ils s’abstiennent, il perdurera. Ce pouvoir de bascule, rare sous la Ve République, devrait leur conférer une force politique significative. Cependant, cette situation les paralyse. La première raison est simple : la crainte du vide. En cas de dissolution, la plupart des députés LR pourraient perdre leur siège. Leurs bastions sont fragiles, leurs électeurs divisés, et la dynamique politique actuelle favorise le Rassemblement national. Nombreux sont ceux qui en sont conscients : un retour aux urnes pourrait se traduire par un suicide collectif. Dès lors, le réflexe de préservation l’emporte sur toute audace. Cette prudence électorale est accentuée par une proximité de fait avec le pouvoir. Plusieurs figures de la droite – proches de Lecornu ou d’anciens macronistes – occupent des fonctions ministérielles ou des rôles influents. La frontière entre ces deux familles politiques s’amenuise, alimentant la méfiance d’une base électorale perdue quant à la signification de « être de droite ».

2. Le piège d’un macronisme social

Le second dilemme touche à l’idéologie. Le gouvernement Lecornu, sous le prétexte de garantir la stabilité, adopte une politique visiblement orientée à gauche. Il dépend de la bonne volonté d’un Parti socialiste tenu à 2 % des voix, mais qui est démesurément présent dans les rapports de force. Ses exigences, notamment concernant les taxes et les politiques sociales, influencent lourdement l’orientation du gouvernement. Pour les électeurs de droite, ce virage est déroutant. Ils restent attachés à des principes bien établis : respect de la propriété privée, contrôle des dépenses publiques, réduction des impôts et valorisation du travail. Cependant, la ligne directrice de Lecornu envoie un signal contraire : augmentation des taxes, retour aux logiques redistributrices, et un discours d’inspiration social-démocrate qui renoue avec l’idée ancienne d’un « État bienveillant » surpuissant. En soutenant tacitement ce gouvernement, la droite trahit l’unique aspect du macronisme qui lui était acceptable : la promesse libérale et réformatrice, tournée vers la compétitivité et la responsabilité. Le macronisme « de droite », celui de 2017, s’efface devant un macronisme de gauche populiste, incluant le renoncement à la réforme des retraites et la fiscalité sur les holdings, où la priorité n’est plus la réforme, mais la survie politique.

3. Une droite désorientée

Cette contradiction crée une situation intenable pour la droite. Elle possède théoriquement la clé du rapport de force, mais en pratique, elle semble impuissante. Au lieu de se poser en véritable contre-pouvoir, elle donne l’impression de soutenir le pouvoir dans son abandon. Le paradoxe est total : les Républicains disposent d’un levier institutionnel puissant, le vote de censure, mais ils ne l’utilisent pas. Ils se contentent de déclarations morales ou de critiques symboliques, sans passer à l’acte politique. Ce refus de prendre position alimente le soupçon d’une droite qui préserve ses sièges plus qu’elle ne défend ses convictions. Dans ce contexte, Laurent Wauquiez représente la difficulté d’un parti en crise. Il s’efforce de jongler entre l’aile institutionnelle, soucieuse de la stabilité et de la préservation des postes, et la base militante, attirée par un discours plus affirmé. Cependant, cette prudence, trop évidente, donne l’impression d’une droite hésitante, perdue, captive de ses ambiguïtés. Il est probable que Laurent Wauquiez demeure l’archétype d’une droite prête à renier ses principes pour se maintenir. Face à lui, Bruno Retailleau semble être un homme de convictions authentiques. Cependant, votera-t-il pour la censure ? Il est probable qu’il ne le fera pas, ayant participé au gouvernement Lecornu 1.

Les électeurs, de leur côté, ne s’y trompent pas. Ils perçoivent dans le soutien implicite au gouvernement Lecornu une nouvelle trahison, non seulement sur le plan politique, mais aussi moral. La droite, supposée défendre la responsabilité et la liberté, valide actuellement un exécutif axé sur la dépense et la fiscalité.

Le dilemme de la droite est donc évident : opter entre la peur et la fidélité. En refusant de se positionner, elle risque de tout perdre : ses électeurs, sa cohérence, et son identité. Le macronisme social-démocrate a réussi ce que la gauche n’était plus en mesure d’accomplir : neutraliser la droite républicaine en la enfermant dans le confort du calcul. Mais cette stratégie du « ni rupture, ni courage » pourrait lui coûter cher. Car une droite qui privilégie ses sièges à ses convictions ne gouvernera plus jamais : elle sera tout au plus tolérée, comme une relique d’un ordre politique révolu.

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