La démission de Sébastien Lecornu entraîne une volatilité des marchés français
Le départ de l’éphémère Premier ministre, Sébastien Lecornu, a provoqué une réaction immédiate sur les marchés financiers, accentuant le climat d’incertitude qui pesait sur l’économie française depuis la dissolution du gouvernement en juin 2024. Le 6 octobre 2025, alors que le CAC 40, principal indice boursier de Paris, s’effondrait de plus de 2%, la chute des actions des banques françaises, telles que BNP Paribas et Société Générale, a également été significative, rapportent TopTribune.
Cette démission, survenue moins de quatorze heures après la nomination d’une partie du gouvernement, a soulevé des inquiétudes quant à l’avenir économique du pays. Selon Anne-Sophie Alsif, cheffe économiste chez BDO, « la première conséquence de cette annonce, c’est la hausse du taux d’endettement de la France sur les marchés ». Les taux d’intérêt à dix ans ont subitement augmenté, passant de 3,51% à 3,61%, un niveau inédit depuis mars de cette année.
Parallèlement, le « spread », l’écart des taux d’emprunt entre la France et l’Allemagne, a atteint 89 points, son maximum depuis janvier. Eric Dor, directeur des études économiques à l’Iéseg, précise que cet écart était de 81 points avant la démission. « Cela augmente encore le coût de la dette pour l’État », ajoute-t-il, bien que le contexte actuel soit sans commune mesure avec la crise de la dette souveraine grecque. Toutefois, il avertit qu’une augmentation continue du spread pourrait avoir des conséquences négatives pour les ménages et les entreprises.
Les experts s’accordent à dire que ce départ ajoute une pression supplémentaire dans un contexte déjà tendu. « Depuis la dissolution, les marchés financiers s’attendent à une crise politique en France jusqu’à l’élection présidentielle de 2027 », explique Alsif. Ce revirement, à peine un mois après la prise de fonction de Lecornu, suscite des craintes d’un « scénario rouge-noir », où la France se trouverait dans une situation économique plus grave que prévu.
Selon Mathieu Plane, économiste à l’OFCE, l’incertitude qui entoure le paysage politique incite les ménages à épargner davantage et les entreprises à réduire leurs investissements. « À partir du moment où il y a de l’incertitude, il y a plus de précaution, et cette précaution se traduit par une croissance en moins », souligne Plane. Jusqu’à récemment, l’impact de la situation politique sur la croissance était évalué à 0,4 point de PIB pour la période 2024-2025, mais désormais, ce nouvel événement pourrait aggraver cette estimation de quelques dixièmes.
La capacité de la France à redresser sa situation budgétaire est également remise en question, alors que le déficit est prévu à 5,4% du PIB pour 2025. « La question fondamentale est de savoir si le Parlement parviendra à adopter un budget », résume Plane. Les tensions politiques rendent le calendrier d’adoption du projet de loi de finances pour 2026, prévu pour mi-octobre, presque irréaliste.
Face à cette incertitude, l’exécutif pourrait devoir recourir à une loi spéciale pour éviter un blocage budgétaire. Toutefois, les agences de notation pourraient punir cette instabilité en dégradant la note de la France. Eric Dor anticipe des dégradations futures, même si elles ne devraient pas gravement affecter l’augmentation des taux, celles-ci représentant une réaction à la situation politique plutôt qu’une anticipation des défis économiques.