Prague réclame plus de 200 millions d’euros à Agrofert
Prague réclame plus de 200 millions d’euros à Agrofert

Prague réclame plus de 200 millions d’euros à Agrofert

16.09.2025 09:30
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Le gouvernement tchèque a annoncé le 28 août 2025 son intention de récupérer plus de 200 millions d’euros auprès du conglomérat Agrofert, fondé par l’ancien Premier ministre Andrej Babiš. Sur ce montant, environ 4,24 milliards de couronnes correspondent directement aux subventions européennes, le reste provenant de programmes nationaux. Cette décision intervient après plusieurs défaites judiciaires du groupe et la confirmation par les tribunaux que Babiš exerçait un contrôle effectif sur Agrofert entre 2017 et 2021, malgré son transfert formel en fiducie.

Conflit d’intérêts et audits européens

Dès 2021, un audit de la Commission européenne avait conclu à un conflit d’intérêts, qualifiant de « non réguliers » les paiements versés à Agrofert depuis 2017. L’affaire a mis en lumière les failles de la politique agricole commune, qui favorise les grands propriétaires fonciers et a alimenté l’empire économique de Babiš pendant qu’il était au pouvoir. Pour Bruxelles, la question ne se limite pas à une affaire privée : elle engage l’utilisation des fonds publics et le respect de l’État de droit dans un pays membre de l’UE.

Procès et enquêtes en cours

Parallèlement, l’affaire dite « Čapí hnízdo », portant sur l’obtention de 2,8 millions d’euros de subventions destinées aux petites entreprises, a été relancée en juin 2025 par la Haute Cour de Prague. D’autres épisodes entachent la réputation de Babiš, notamment la révélation par les Pandora Papers de l’acquisition via des sociétés offshore d’un bien immobilier de luxe sur la Côte d’Azur pour 22 millions de dollars. Ce bien, mis en vente en 2024, fait désormais l’objet d’une enquête des autorités françaises pour blanchiment présumé.

Héritage du passé et risques politiques

La controverse autour de l’ancienne police secrète tchécoslovaque (StB), dans laquelle Babiš est cité sous le pseudonyme « Bureš », reste politiquement toxique malgré des décisions contradictoires de la justice slovaque. Ses liens politiques avec le Premier ministre slovaque Robert Fico renforcent ces suspicions. De plus, la vente en 2023 de ses actifs médiatiques MAFRA et LONDA a réduit mais non éliminé les inquiétudes concernant la concentration de la presse en Tchéquie.

Alignement européen et conséquences pour l’Ukraine

Sur le plan international, Babiš a rapproché son parti ANO du camp souverainiste européen, notamment en rejoignant « Patriots for Europe » aux côtés de Fidesz et du FPÖ. Ce groupe parlementaire critique le soutien militaire accru à l’Ukraine et prône un « pragmatisme » vis-à-vis de Moscou. Si ANO revenait au pouvoir, la Tchéquie pourrait bloquer les initiatives européennes en matière de sanctions, de soutien militaire et de financement à Kiev. Cela créerait un nouveau point de tension au sein de l’UE et compliquerait la coordination au sein de l’OTAN, d’autant que Babiš a déjà exprimé des doutes quant aux engagements de défense collective.

Un test pour Bruxelles et Washington

La combinaison de contentieux financiers, de soupçons de corruption et d’orientations politiques eurosceptiques fait de Babiš un partenaire difficile pour Bruxelles et Washington. Les exigences de remboursement de subventions, la réouverture de procès sensibles et ses positions vis-à-vis de l’Ukraine posent un défi direct à la capacité de l’UE et de l’OTAN à préserver leur unité face aux pressions extérieures.

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