A quelques jours du vote de confiance qui déterminera son avenir à Matignon, François Bayrou s’affaire à trouver une solution miracle en recevant un à un les partis. Un bourbier dans lequel il a emporté avec lui le président de la République, son gouvernement et… Les Républicains, rapporte TopTribune.
Alors que le Premier ministre tend la main aux socialistes, tout en faisant des clins d’œil au Rassemblement national, le parti de Bruno Retailleau se demande quelle doit être sa place, ou celle qu’il souhaite occuper, s’il veut en sortir indemne, ou du moins, pas trop amoché.
Le cadeau empoisonné des postes au gouvernement
Au fond du trou il y a à peine plus d’un an avec un score historiquement bas aux élections européennes et la séquence lunaire d’Éric Ciotti jouant à Fort Alamo au siège du parti, les Républicains ont connu une renaissance presque miraculeuse en quelques mois avec la prise de pouvoir de Bruno Retailleau et l’entrée de sept de ses membres au gouvernement.
Un retour en force notable au regard du prestige de certains maroquins qui leur ont été alloués avec le porte-parolat (Sophie Primas), le ministère de l’Intérieur (Bruno Retailleau) et le ministère de l’Agriculture (Annie Genevard) notamment, mais un véritable dilemme désormais à l’heure du vote de confiance.
Car s’il s’est toujours montré très critique du macronisme, Bruno Retailleau a accepté Beauvau et l’exercice de funambule d’être à la fois membre du gouvernement et de se déclarer opposant. Comment alors défendre l’action de ce même gouvernement sans être amalgamé au président de la République et devenir comptable de son bilan ?
Une consigne de vote contestée
La question a dû lui faire chauffer la caboche et explique sans doute les quelques heures qu’il lui a fallu pour annoncer, dans un communiqué, la position du parti le 26 août dernier : « Voter pour la chute du gouvernement, ce serait voter contre les intérêts de la France. »
Une consigne passée à la petite cinquantaine de députés de la droite républicaine… qui ne l’entendent pas tous de cette oreille. Dans la foulée, le groupe mené par Laurent Wauquiez à l’Assemblée nationale a communiqué : « Nous refusons de nous faire complices des artisans du chaos. Cependant, nous assumons des désaccords avec le projet de budget présenté par François Bayrou » avant d’ajouter : « Nous attendons du Premier ministre des clarifications. »
Tout sauf un « oui chef ! » en somme de la part d’un autre leader du parti qui espère voir le gouvernement avancer davantage sur ses thèmes de prédilection (« bureaucratie », « assistanat » et « immigration »), contraires à ceux des socialistes dragués par le Premier ministre, et éviter de « signer un chèque en blanc » au gouvernement.
« Si François Bayrou se suicide, ce n’est pas aux LR de prendre du cyanure »
Selon Le Point, d’autres parlementaires ne seraient pas non plus enclins à voter en ce sens, comme l’indique un pilier du groupe : « On en a une quinzaine qui ne veut pas voter pour et certains voteront contre. » D’après l’hebdomadaire, le député Ian Boucard a même, lors d’une réunion du groupe le 26 août, comparé le gouvernement à la secte du Temple solaire : « C’est un gars qui se suicide, et tous les autres le suivent ! Il ne faut pas qu’on soit ceux-là. »
« Si François Bayrou se suicide, ce n’est pas aux LR de prendre du cyanure et de s’afficher comme les dépositaires de ce qu’ils combattent », abonde au Monde le maire de Cannes, de plus en plus influent, David Lisnard.
D’autres ténors du parti, Jean-François Copé, Valérie Pécresse ou encore Xavier Bertrand s’opposent également au vote en faveur de François Bayrou et vont même jusqu’à évoquer la démission d’Emmanuel Macron et une présidentielle anticipée plutôt que d’envisager une nouvelle dissolution.
Nicolas Sarkozy s’en mêle et emmêle le parti
Si Bruno Retailleau doit tenter d’éteindre le léger début d’incendie dans son parti, il ne pourra pas compter sur Nicolas Sarkozy qui s’est chargé, mardi, de souffler sur les braises au travers d’une interview donnée à nos confrères du Figaro.
S’il n’a pas sorti le lance-flammes, l’ancien président a toutefois brumisé toute la pièce à l’essence en s’en prenant d’abord à Emmanuel Macron, ancien disciple renié pour ne l’avoir pas suivi dans ses conseils et coupable de lui avoir retiré sa légion d’honneur, et à François Bayrou, accusé d’avoir soutenu Ségolène Royal en 2007 et voté François Hollande en 2012.
Pire, Nicolas Sarkozy a, volontairement ou non, remis en cause le leadership de Bruno Retailleau. D’abord en soulevant la confusion qui pourrait advenir en cas de législatives anticipées en prônant l’abstention au vote de confiance comme « alternative crédible ».
Mais surtout, il a critiqué le manque de « leader incontournable » et avancé l’idée d’une primaire nécessaire au rassemblement et qui irait du centre macroniste à la droite, citant lui-même, Edouard Philippe, Gabriel Attal, Bruno Retailleau, Gérald Darmanin, Laurent Wauquiez, Xavier Bertrand et David Lisnard… De quoi inquiéter le ministre de l’Intérieur qui s’est toutefois assuré de remodeler le parti à sa main récemment en s’octroyant davantage de pouvoirs.
« Il n’y a aucune manière d’en sortir grandi, nous souffle une figure du parti en Île-de-France, aujourd’hui notre avenir est dans une alliance avec le centre macroniste. Tout comme le leur. Mais nous devons éviter de le faire ouvertement pour le moment au risque de prendre la foudre avec eux… »