Après la présentation de son plan de rigueur budgétaire, impliquant des économies de 43,8 milliards d’euros pour l’année 2026, rarement une déclaration de François Bayrou n’a suscité autant de rejet. La proposition d’abrogation de jours fériés, le gel des prestations sociales, le non-remplacement de la plupart des fonctionnaires partant à la retraite et les exigences de plus de cinq milliards d’euros faites aux collectivités locales ont provoqué une forte réaction. « Un braquage en bande organisée », a estimé Fabien Roussel, le secrétaire national du PCF, tandis que Jordan Bardella, président du Rassemblement National, a qualifié cette initiative de « provocation », appelant à des mesures de censure avec le soutien du PS et de LFI si le Premier ministre ne modifie pas sa position, rapporte TopTribune.
Des critiques émanent même de la part des alliés, mettant en doute l’efficacité de cette cure d’austérité. Edouard Philippe (Horizons) a déclaré qu’« il n’y a presque rien dans la proposition de Bayrou qui corrige le problème ». Laurent Wauquiez, président des députés Les Républicains, a mentionné que bien que le plan tente de chercher des solutions, des ajustements sont nécessaires. Quant à Gabriel Attal, le président du groupe Ensemble pour la République à l’Assemblée nationale, il est resté silencieux.
Face à l’absence de majorité dans l’Hémicycle et à la menace de censure, on se demande si François Bayrou pourra réellement mettre en œuvre son plan pour redresser les finances publiques, ou si sa proposition de budget est déjà compromise. Le site 20 Minutes explore les éventualités pour le gouvernement.
La censure du gouvernement de François Bayrou
La présentation du plan d’économies par le Premier ministre a été soigneusement choisie : les députés sont actuellement en vacances et ne reviendront à l’Assemblée nationale qu’en septembre, avec des discussions budgétaires qui ne commenceront qu’à la fin d’octobre. Cela permet à François Bayrou d’échapper à toute motion de censure pendant trois mois. Toutefois, un scénario de censure demeure « envisageable », selon Julien Robin, doctorant en science politique au Centre d’études et de recherches internationales (Cérium) à l’université de Montréal. « Si le RN et le PS s’unissent, une motion de censure pourrait voir le jour, mais je pense qu’un texte bipartisan serait nécessaire pour aboutir », a-t-il déclaré.
Si François Bayrou devait être censuré, comme son prédécesseur Michel Barnier, son projet de budget risquerait d’être abandonné. Dans ce cas, il pourrait garder une image d’alerte, tentant d’alerter sur les défaillances des politiques en vigueur. Cependant, le retrait de son plan d’économies pourrait engendrer une augmentation du déficit et miner l’autorité du gouvernement face à la crise.
Un accord avec le Parti socialiste
Dans le cas où LFI et le RN tentent de renverser le gouvernement, le soutien du Parti socialiste sera crucial. Lors de l’examen du budget précédent, le PS avait choisi de ne pas soutenir la censure. Ce scénario est celui que le gouvernement espère, envisageant un potentiel « compromis » avec la gauche. « Nous prévoyons de discuter avec tous les partis », a affirmé Eric Lombard, ministre de l’Économie.
Néanmoins, les socialistes sont loin d’être conciliants pour l’instant. Boris Vallaud, le chef des députés socialistes, a qualifié le budget de « brutal et inacceptable », tandis qu’Olivier Faure a averti que sans changements significatifs, la censure semblerait inévitable. Cependant, les socialistes pourraient envisager des négociations si le gouvernement acceptait de discuter des propositions telles que la taxe Zucman, destinée à imposer une charge de 2 % sur le patrimoine des milliardaires, proposition actuellement rejetée.
Un accord avec le Rassemblement national
Marine Le Pen, cheffe du RN, a mis en garde contre d’éventuelles répercussions, exigeant du gouvernement des modifications dans son plan. Julien Robin considère qu’un accord avec le RN pourrait être complexe, mais envisageable, si le gouvernement modifie certaines mesures affectant les retraités, population clé pour le parti. Les discussions pourraient être âpres, le RN établissant des lignes rouges en matière d’immigration. Selon Julien Odoul, député RN, « François Bayrou semble ignorer les différences entre les préoccupations des Français et celles des migrants et étrangers ».
La survie politique de François Bayrou est incertaine. Du côté des syndicats, la rentrée s’annonce turbulente, avec des manifestations attendues dès septembre. La secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, a ainsi appelé à la mobilisation pour contrer ces régressions sociales.